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La Mythologie Palestinienne Préserve l’Unité
de Jérusalem
Par Emmanuel Navon, dirige le département de science politique et de communication au Collège universitaire orthodoxe de Jérusalem et enseigne les relations internationales à l'Université de Tel Aviv et au Centre interdisciplinaire d’Herzliya. Il est membre du Forum Kohelet de politique publique.
i24News 28/5/14
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Dans le calendrier hébraïque, le 28 du mois d’Iyar
(qui cette année tombe le 28 mai) marque le 47e anniversaire de la réunification
de Jérusalem lors de la guerre des Six Jours. La "Journée de Jérusalem",
comme on l'appelle en Israël, est surtout célébrée aujourd'hui par les sionistes
religieux. Certains Israéliens se désolidarisent de cette célébration et partagent
le point de vue arabe que Jérusalem-Est est "occupée".
Ces divergences de vue parmi les Israéliens ne sont pas nouvelles. Juste après
qu’Israël a libéré sa capitale il y a 47 ans, l’aumônier de Tsahal, le Rabbin
Shlomo Goren, sonna le shofar (corne de bélier,
ndlr) au Mur des Lamentations et sur le Mont du Temple, proclamant que
le peuple juif avait retrouvé son lieu saint pour la première fois depuis
la destruction du Second Temple par Titus en 70 de notre ère. En revanche,
Moshe Dayan, alors ministre de la Défense, se demanda, alors qu’il contemplait
la Vieille Ville après la victoire d'Israël : "Avons-nous besoin de
tout ce Vatican ?"
Ce "choc des civilisations"
juif est relaté par Yossi Klein Halevi dans son
livre "Comme des rêveurs :
L'histoire des parachutistes israéliens qui ont réunifié Jérusalem et divisé
une nation".
Halevi retrace la vie des parachutistes israéliens qui ont libéré Jérusalem.
D'un côté du spectre se trouve Yoel Bin-Noun, un
rabbin sioniste qui était étudiant à la yeshiva
(académie talmudique) "Merkaz Harav" et qui est devenu l'un des fondateurs du mouvement
"Gush Emunim".
De l'autre côté se trouve Udi Adiv,
un marxiste radical antisioniste qui s’est secrètement rendu en Syrie dans
les années 1970 pour rejoindre la guérilla de l'OLP.
Depuis la guerre des Six Jours, les gouvernements israéliens successifs ont
été ambivalents sur la question de Jérusalem. Israël a officiellement appliqué
la loi israélienne à l'ensemble de Jérusalem, mais laisse le Waqf
islamique administrer le Mont du Temple. Israël a adopté et appliqué une loi
garantissant la liberté de culte pour toutes les religions et la préservation
de tous les lieux saints, mais ne laisse pas les Juifs prier sur le
Mont du Temple.
Pourtant, même les Israéliens laïques qui sont prêts à se défaire de "tout
ce Vatican" doivent se rendre à l’évidence : il n’y a que sous la souveraineté
israélienne que les Hiérosolomytains de toutes confessions sont libres, et
que tous les lieux saints sont préservés.
Lorsque la vieille ville de Jérusalem était sous contrôle jordanien entre
1949 et 1967, cinquante-huit synagogues furent détruites (y compris la magnifique
synagogue du "Hourva"), et le cimetière
juif du Mont des Oliviers fut profané (les pierres tombales étaient utilisées
pour le pavage de routes).
Après que l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) eut pris le contrôle
partiel du Waqf de Jérusalem avec les accords d'Oslo,
le Waqf entreprit des activités de forage et de
construction massifs sur le Mont du Temple, détruisant d'innombrables vestiges
juifs des périodes des premier et deuxième Temples. C’est ainsi que des personnalités
israéliennes résolument laïques telles que les romanciers A.B. Yehoshua
et Haim Guri ont rejoint le Comité pour la prévention
des destructions archéologiques sur le Mont du Temple.
Le vandalisme archéologique du Waqf musulman a eu l'effet inattendu et ironique
de transformer des figures emblématiques de la laïcité israélienne en défenseurs
du Saint des Saints. De même, le déni officiel par l'OLP de l'existence des
Temples de Jérusalem a mis la vieille garde travailliste d'Israël sur la défensive.
C’est ainsi que l'ancien Premier ministre travailliste Ehud Barak répliqua
au “négationnisme du Temple” d'Arafat que le Mont du Temple est "le point
d'Archimède" de l'existence d'Israël.
Le "négationnisme du Temple",
cependant, est un phénomène récent qui contredit la tradition islamique. Au
cours de la première période musulmane (entre le septième et le
onzième siècle), les Arabes appelaient Jérusalem et le Mont du Temple,
de façon interchangeable, Bayt Al Maqdis,
une translittération arabe de l'Hébreu Beit Hamikdach (Temple).
Un guide touristique publié par le Conseil suprême musulman en 1924 explique
que le Mont du Temple est le site du Temple de Jérusalem. Araf
al-Araf, un historien arabe palestinien qui, en
tant qu’ami proche de Haj Amin al-Husseini pourrait
difficilement être soupçonné de sympathies pro-sionistes, écrit dans son livre
Tariah Al-Qods (publié en 1951)
que le Mont du Temple "a été acheté par David pour construire le Temple,
mais que c’est Salomon qui l'a construit en 1007 avant notre ère."
Le "négationnisme du Temple"
est donc un phénomène récent ; l’importance que l’Islam accorde au Mont du
Temple l’est également. Muhammad prit soin d’éliminer les lieux de culte païens et de ne sanctifier qu’un seul endroit : la Kaaba
à La Mecque. Au XIVe siècle, l’érudit islamique Taqi
al-Din Ibn Taymiyya écrivit
que les lieux saints islamiques ne se trouvent que dans la péninsule arabique.
Le Coran ne mentionne pas Jérusalem, et les Musulmans de Jérusalem prient
vers La Mecque. Ils ne se déchaussent pas dans l'espace entre le Dôme du Rocher
et la Mosquée Al Aqsa.
Sans le sionisme, il n’y aurait pas eu de sanctification
musulmane du Mont du Temple et pas de négationnisme arabe sur les deux Temples
de Jérusalem.
Les Israéliens sont certes toujours divisés sur leur ville réunifiée.
Mais le fossé qui les sépare
se réduit grâce à la mythologie palestinienne.