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ÉTRANGER DANS MON PAYS

 

Par Stewart Weiss, directeur du centre juif d'assistance de Raa'nana

Paru dans Opinion- Jerusalem Post International Edition –14 novembre 2003

Traduit par Albert Soued, écrivain, www.chez.com/soued

 

Dîtes-moi, à qui appartient ce pays? Le mois dernier ma femme voulait faire un pèlerinage au Tombeau de Rachel, qu'elle n'avait pas visité depuis de nombreuses années. Malgré que l'enceinte abritant la tombe ait été rénovée et soit devenue impressionnante, l'expérience est plutôt déchirante. La route qui relie la limite sud de Jérusalem et la tombe elle-même n'a que 300 m de long, mais on ne peut y circuler   que dans des véhicules blindés spéciaux qui n'avancent qu'en convoi sur une seule file.

Les particuliers civils ne sont pas autorisés à en sortir, ce qui fait que les véhicules vous conduisent jusqu'à l'entrée même et les visiteurs sont obligés de courir comme des lapins jusqu'à la tombe-forteresse.

Mais la situation sur ce site n'est pas unique. À chacun de nos 4 lieux saints, un accès libre et facile est exceptionnel. Chaque pèlerinage est une expédition militaire et chaque entrée et chaque sortie est une gageure sur le plan de la sécurité.

 

Le Caveau de la Makhpélah situé à Hébron (où sont inhumés nos patriarches et matriarches), fait que cette ville est un des quatre hauts-lieux saints du judaïsme.

La police et l'armée y sont fortement représentées, ce qui est compréhensible, étant donné les attaques terroristes incessantes. Après une fouille serrée, les visiteurs juifs sont autorisés à aller prier dans les zones "Abraham" et "Jacob", mais pas à "Isaac", le caveau le plus conséquent, car il est réservé aux visiteurs musulmans. Ce caveau n'est ouvert aux Juifs, alternativement avec les Arabes, que pendant 10 jours par an.

Il sera intéressant de voir comment cela se passera cette année, car l'anniversaire de la mort de Sarah (la première matriarche à être enterrée là) coïncide avec la fin du Ramadan; et les deux communautés ont demandé l'accès exclusif!

Dehors, près de l'entrée du Caveau, il y a un endroit qui s'appelle "les 7 marches". À l'époque où les Arabes contrôlaient les lieux, les Juifs n'avaient pas accès au caveau lui-même. On les autorisait à prier sur le côté du bâtiment, là où il y a 7 marches qui ne mènent nulle part. Là, ils allumaient des bougies et récitaient des psaumes comme des misérables, tout près et pourtant si loin du Lieu Saint.

L'Autorité Palestinienne, notre ex-partenaire dans le "processus de paix", s'est vantée du fait que le jour où elle aura la pleine souveraineté sur Hébron, le Caveau sera de nouveau interdit aux Juifs qui devront se contenter de se presser sur les "7 marches", comme des mendiants.

Et qu'en est-il du Mont du Temple? Le site du Temple de Jérusalem, le lieu le plus saint du Judaïsme est "judenrein". Même dans les rares occasions où les Juifs étaient autorisés à y pénétrer, le Waqf musulman vérifiait minutieusement que les lèvres des pèlerins ne remuaient pas en des prières et qu'elles ne payaient pas un hommage à D.; autrement les Juifs étaient emmenés vers la sortie, et même souvent ils étaient arrêtés.

Il est vrai aussi que de nombreux rabbins interdisent aux juifs d'entrer sur le Mont du Temple de crainte qu'ils ne foulent par inadvertance l'endroit où était érigé le Saint des Saints. Mais des rabbins comme Shlomo Goren en ont décidé autrement, car une grande partie de la surface de l'esplanade n'est pas concernée par la sainteté, et par conséquent, elle devrait être librement accessible.

Notre répugnance à visiter le Mont du Temple a enhardi certains de nos politiciens, qui ne sont liés à la tradition que par pragmatisme au mieux; ces hommes ont offert au Waqf musulman le contrôle total du site du Mont du Temple. Et leur décision a affaibli notre revendication concernant le site. Comme l'a dit un membre du congrès américain "Comment pouvez-vous, vous Juifs, prétendre vénérer ce lieu, quand vous ne voulez même pas y mettre les pieds?"

Il y a aussi la tombe de Joseph à Naplouse. Le mois dernier, pour la deuxième fois en 2 ans, une foule sauvage de Palestiniens s'est déchaînée et a mis le feu à ce lieu saint en jubilant, incendiant tout livre de prières et tout écrit saint trouvé là. C'est là où le rav Hillel Lieberman a été assassiné il y a deux ans, quant il avait essayé de sauver quelques rouleaux de Torah abandonnés. L'armée venait de quitter ce lieu après une attaque meurtrière. Notre présence là est intermittente et alourdie par le danger.

 

Tout cela m'incite à lancer deux messages distincts.

D'abord les Arabes n'ont jamais respecté et ne respecteront jamais la sainteté des lieux Juifs, en dépit de toute pression. Les Jordaniens ont systématiquement détruit toute synagogue dans la vieille ville de Jérusalem, quand celle-ci est tombée entre leurs mains en 1948. Comme eux, les Palestiniens désacraliseront ou détruiront tout lieu sacré pour nous, si par malheur il tombait entre leurs mains (cf le tombeau de Joseph saccagé et transformé en mosquée). Et cela inclut le mur Occidental du Temple. Je n'ai aucun doute que les Palestiniens feront ce que même les Romains n'on pas fait; ils transformeront le Mur en un tas de pierres. La décision catastrophique de Moshé Dayan de donner les clés du Mont au Waqf devrait être dénoncée au lieu d'être confirmée.

Le deuxième message nous concerne, car nous sommes aujourd'hui prisonniers dans notre pays. Quand l'adversaire est libre de circuler partout et quand il dort du sommeil du juste, nous sommes, nous, limités dans nos déplacements et de nombreux endroits nous sont interdits, partout sur notre terre! Parfois je me dis que certains pays ont peut-être raison de contester notre légitimité sur ce pays, puisque nous-mêmes, nous en doutons. Nous avons peur d'affirmer nos pleins droits sur notre terre, et nous sommes perçus comme des locataires plutôt que des propriétaires (1).

Si nous voulons maintenir notre souveraineté sur cette terre, nous devons chanter "Cette terre est ma terre…" , relever la tête et cesser de nous cacher. Nous devons récupérer nos droits sur notre terre! (2)

 

Notes du traducteur

 

(1)  Il est probable que cette perception vienne du fait que dans la Tradition juive la terre n'appartient à personne, mais à D.. Toujours est-il que même les visites aux sépultures du mont des Oliviers deviennent aujourd'hui problématiques.

(2) Trois lieux saints ont été achetés en bonne et due forme par les ancêtres bibliques, malgré que leur propriétaire ait voulu leur en faire cadeau.

La Makhpélah a été achetée par Abraham à Efron, fils de Tsoar, le H'éthéen, 400 sicles d'argent, y compris le champ et le caveau (Genèse chap 23, 49/29-33, 50/13). Sikhem a été acheté par Jacob aux fils de H'amor, père de Sikhem, pour 100 pièces d'argent ou "agneaux" (qessithah), pour y ensevelir les ossements de Joseph, mort en Egypte (Josué 24/32).

Le mont du Temple (Moryah), le champ (goren) et le bétail qui y était contenu, a été acheté par David à Aravna (ou Avarna ou Aranya), ou Arnan le Jébuséen, pour 50 sicles (2 Samuel 24/18-25) ou 600 sicles d'or (1Chroniques 21/18-26).

 

Un sicle d'argent pesait environ 12g, mais valait l'équivalent de 120 euros.

Un sicle d'or valait 15 fois plus à cette époque. À titre d'équivalence, il fallait compter le prix d'un agneau dans un cas, et 15 agneaux dans l'autre, et à cette époque l'aisance d'un individu était liée à la dimension de son troupeau.

Avec ces données, on peut estimer la valeur des 3 sites:

-         Makhpélah:  48 000 euros

-         Sikhem: 12 000 euros

-         Mont Moryah: 90 000 ou 1 080 000 euros, selon les sources.

 

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