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LE COMPLEXE DE FACHODA : POURQUOI LA FRANCE SOUTIENT L’ISLAMISME DANS LE MONDE

Soudan, Darfour, politique de la France, Iran, Irak,  

Paru dans www.europolitica.org  - le 26 Juillet 2004

 

Les éléments peu à peu s’accumulent, révélant peu à peu les liens d’une French Connexion avec les réseaux islamistes de la djihad mondiale, apparue au monde en 1978 quand l’ayatollah Khomeiny renversa le Shah d’Iran qui tentait de promulguer de nouveau droits civils pour les femmes au grand damne des autorités religieuses islamistes du pays.

Venant de France, d’où il a constitué ses réseaux et préparer tranquillement sous la protection des autorités françaises, sa prise de pouvoir et sa révolution islamique qui allait embraser le monde arabo-musulman en une vingtaine d’années, jusqu’au 11 septembre 2001 où l’indifférence des occidentaux fut stoppée net, l’ayatollah Khomeiny est indéniablement l’homme qui le plus bouleversé la géopolitique mondiale depuis la fin de la seconde guerre mondiale en intronisant l’islam militant dans les rapports internationaux.
La France n’a jamais manqué à sa parole, et toute sa politique est fondée sur un rapport purement d’intérêt géopolitique fait d’unité de façade avec le reste de l’occident (Guerre du Golfe) et d’un réel activisme pro-islamiste en sous main (dont la Côte d’Ivoire et le Soudan, mais aussi le conflit arabo-israélien sont les derniers théâtres).
Le rôle de la France à chaque fois est indéniable, discret mais puissant aux forces islamistes qui mènent partout dans le monde la dijhad, sa conquête islamique au service d’un impérialisme religieux dont les pouvoirs de gauche comme de droite à Paris, sont tellement convaincus de l’inéluctable victoire, influencés qu’ils sont par une situation intérieur politique et démographique inquiétante, se sont accommodés, mieux assurés la complaisance par un soutien dont la seule ambiguïté est un discours officiel trouble, mais dont les actes sont, eux, parfaitement clairs.
L’un de nos documents, un compte rendu officiel de la conférence de presse accordée par Dominique De Villepin – alors ministre des affaires étrangères – le 20 février 2004, ne laisse guère de doute sur l’extraordinaire hypocrisie de Paris sur le conflit du Darfour. Évoquant les relations d’estime et d’amitié profonde entre le président de la République Jacques Chirac et le président El-Béchir, Dominique De Villepin ne tarit pas d’éloge au gouvernement soudanais, saluant même ses prises de position face à ce qu’il déqualifie de « situation humanitaire », prenant bien soin de ne pas aborder la question de fond politique, alors qu’à cette date et depuis déjà de longues années, le soutien du président dictateur soudanais aux milices arabes qui organisent le génocide des populations noires et chrétienne du sud du pays est parfaitement connu et avéré.
Il est vrai que la relation « d’estime et d’amitié profonde » entre le président Chirac et le président dictateur El Béchir se déclinent en une multitude d’intérêts économiques et politiques bien compris. Il y a longtemps que la France soutient le régime despotique et islamique d’El Bechir. Quand El Bechir prend le pouvoir en 1989 et impose la mise en place d’un modèle politique « à l’iranienne » liant étroitement le Front National Islamique de Hassan El Tourabi, qui passe pour être l’autorité politico-religieuse du pays, et le pouvoir militaire, la France comprend vite son intérêt à soutenir le régime islamiste de Khartoum.

'Forum Soudan’ (mouvement d’opposition au régime islamiste de Khartoum) et le rapport du très sérieux "think tank chrétien Pax Christi’" édité aux Pays Bas en 1995, sont très clairs sur la collaboration qu’apporte la France au régime islamiste de Khartoum à travers un soutien logistique et militaire allant jusqu’à la transmission de photos satellite du sud-Soudan pour aider l’armée soudanaise à vaincre la résistance des populations noires chrétiennes et animistes en lutte depuis 1983 pour faire reconnaître leur droit à l’autodétermination [[1]]. Vaincues, ce sont ces populations qui subissent d’ailleurs aujourd’hui le génocide mené par les milices arabes de Khartoum.

Ce soutien n’est pas seulement logistique – à travers la livraison de matériel militaire ou comment les services de « sécurité » du régime islamiste d’El Bechir seront entraînés en France, notamment Nafeh Ibrahim Nafeh, chef de la sécurité intérieure, El Fatih Mohammed Irwa, conseiller du président soudanais sur les questions de sécurité, Ashim Abou Saïd, responsable du contre-espionnage, Hanafi Baha El Dine enfin le sinistre Ibrahim Shams Eldin qui se sont tous particulièrement distingués dans de nombreux actes de tortures, viols et massacres, la France assurera aussi sur son sol la ‘formation’ de 120 officiers de police soudanais aux « techniques de recherche d’information » - le soutien de Paris est aussi diplomatique.

Dès le début des années 90 la France milite activement en faveur de la réhabilitation internationale du Soudan islamiste. Ce lobbying apporte même de tangibles résultats, obtenant auprès du FMI et de la banque mondiale diverses remises de dettes, de nouveaux prêts et même un rééchelonnement global de la dette de 1,6 milliards de dollars en décembre 1994. Car commencé sous Mitterrand-Rocard en 1989, cette politique de collaboration entre Paris et Khartoum ne souffrira pas de l’alternance de 1993 qui voit Edouard Balladur arriver à Matignon. L’association France-Soudan, présidée par Charles Pasqua a veillé soigneusement à ce que dès décembre 1992, la politique française vis-à-vis du Soudan demeure strictement la même après l’alternance de mars 1993.
Et ce malgré en février 1994, un rapport accablant du rapporteur spécial de l’ONU, Gaspard Biro, qui conclut « sans hésitation que de graves violations des droits de l’homme ont lieu au Soudan, notamment un grand nombre d’exécutions sommaires et extrajudiciaires, de disparitions forcées ou involontaires, de tortures systématiques et d’arrestations arbitraires généralisée de personnes soupçonnées d’être des opposants ». Enfin le soudan est pointé du doigt dès cette époque pour abriter des terroristes internationaux recherchés et plus encore, pour son soutien à toute une somme de réseaux et mouvements fondamentalistes qui tentent de déstabiliser divers régimes en place en Centre-Afrique, au Tchad, au Nigéria, en somalie, au Cameroun, en Erythrée, et… en Algérie (le fameux et cruel GIA) et en Côte d’Ivoire, les fameux « rebelles du Nord » qui ont tenté de renverser le président chrétien du sud, Laurent Gbagbo.
C’est qu’au-delà d’intérêts commerciaux divers, depuis la vente d’Airbus en investissements divers de grandes entreprises français tel que Total, les Grands Travaux de Marseille (BTP) ou Iranex, pour ne citer que les plus importantes, à l’organisation pas plus tard qu’en ce début d’année 2004 d’une Foire Internationale de Khartoum où 46 société françaises tenaient le haut du pavé pour négocier des contrats allant de la mise en place et de l’entretien de voies ferrées à l’exploitation de l’industrie sucrière du Nil Blanc, la France joue une autre partie, plus politique celle là : celle du complexe de Fachoda.
Ce complexe remonte à la fin du XIXème siècle, quand la France tente de devancer l’Angleterre dans la conquête du haut Nil (nom du Soudan à cette époque) et échoue à Fachoda, scellant le partage des terres africaines entre britanniques et français qui seront stoppés dans leur progression à l’Est et au Sud par l’Empire de sa gracieuse Majesté. Le ressentiment est vif en France, que l’entente cordiale de 1904 ne calmera pas. Une vielle rancune de plus diront certains, une question de principe au Quai d’Orsay où s’entretiennent plus facilement qu’ailleurs ces anciennes amertumes, que l’humiliation de la défaite militaire en 1940, puis celle de la libération, enfin l’effondrement de l’Empire par la décolonisation et l’effacement relatif de la France qui s’en suit sur la scène internationale où elle devient une puissance moyenne de second rang, loin de son rayonnement d’antan et de la nouvelle influence des puissances montantes que sont la Chine, l’Inde, et bien sûr l’Amérique, ne font qu’entretenir.

La vieille Angleterre et la jeune Amérique semblent vouées à disputer à la France la maîtrise de l’influence occidentale sur le monde. La concurrence est globale, lutte de civilisation, intellectuelle, politique, géopolitique, territoriale même dans la dernière zone d’influence possible et disputée de l’Afrique au Cachemire, de la rive sud de la Méditerranée à celles du Golf persique. Là est la véritable source des divergences actuelles entre Paris d’une part, et l’axe Washington-Londres d’autre part, sur tant de conflits, depuis l’Irak au conflit arabo-israélien. Jacques Chirac ne s’oppose pas à George W Bush par souci "pacifiste" ou pour des questions de démocratie internationale (la fameuse et creuse théorie du "multilatéralisme") mais bien au-delà de la pommade des discours, pour une raison d’intérêt et d’influence géopolitique internationale, et à travers cela des intérêts économiques.

C’est bien davantage les intérêts de Total Elf Fina qui ont motivé l’opposition française à la guerre en Irak, que la question du droit international que Paris a d’ailleurs elle-même bloqué, et discrédité en agitant la menace du veto qui a poussé les Etats-Unis et la Grande Bretagne a disqualifié du jeu l’ONU. Ce sont des intérêts similaires qui ont conduit la France depuis 1989, au-delà des alternances de gauche et de droite, à soutenir le régime génocidaire du Soudan, dont la politique atteint aujourd’hui son paroxysme au Darfour. En ce début d’année donc, encore, alors que le drame du Darfour est un fait ancien, Dominique De Villepin n’entretenait-il pas ce discours rodé des grandes connivences entre Paris et Khartoum, alors que l’opinion internationale s’alarmait depuis plusieurs mois de ce qui se passait dans la région du haut Nil ?
Ce soutien français à Khartoum est une vieille histoire, une constante, que ne parviendra pas à dissimuler aujourd’hui la manœuvre grossière de communication que tente le gouvernement français et l’Elysée qui simulent dans leurs positions « officielles » un apparent alignement de la France sur l’indignation internationale vis-à-vis de la situation au Darfour. Situation qu’ils ne pouvaient ignorer depuis des années, sans que jamais cela ne les empêche de continuer à soutenir le régime islamiste de cet « autre ami » du président Chirac. Situation qui cependant sera présentée aux français à travers des media plus que complaisants avec le pouvoir – il en est ainsi de la « liberté de la presse » ici – comme une simple affaire humanitaire et des histoires de milices énigmatiques – dans l’espoir sans doute que personne n’y comprenne rien des enjeux véritables qui s’y jouent -, comme hier le conflit ivoirien fut présenté tantôt comme de simples questions de luttes de pouvoir entre « noirs », tantôt comme des conflits tribaux, alors qu’en vérité la France soutenait la tentative de prise de pouvoir finalement avortée – mais pour combien de temps ? - à Abidjan par les « rebelles du Nord » qui rêvent d’instaurer en Côté d’Ivoire un régime islamiste.

Cette situation illustre bien le conflit d’intérêts qui se joue entre les Etats-Unis et la Grande Bretagne d’une part, et la France d’autre part. Et si chaque « puissance » a vocation à défendre ses « intérêts », on peut néanmoins se poser la question du sens de cette finalité quand sont déployés de tels moyens pour y parvenir. Car pour être clair, la France parait dans la défense de ce qui lui reste d’influence et de pré carrés, s’enferrer dans une attitude qui consiste à se ranger systématiquement du « mauvais côté », c'est-à-dire aux côtés de dictateurs sinistres ici (El Bechir étant le dernier d’une liste passant par Saddam et dont Khomeiny fut le dernier), et par une politique étrangère qui se rend objectivement complice du terrorisme islamiste dans le monde, depuis un soutien indéfectible à Arafat que contestent pourtant de plus en plus ouvertement les palestiniens eux-mêmes dont ils voient bien l’impasse à laquelle les a mené le vieux leader de l’OLP, à de lourdes responsabilités qu’elle porte dans différents dossiers tel l’affaire bosniaque où en poussant avec l’Allemagne à l’éclatement de la Yougoslavie, elle a induit la réaction serbe qui s’est soldé comme on le sait. Mais aussi en Algérie, où par son soutien au Soudan qui était le principal point d’appui du GIA, Paris endosse une responsabilité certaine dans chaque mort algérien victime du terrorisme islamiste (est-ce d’ailleurs pour se racheter « moralement » que la France, depuis, soigne autant sa relation avec Alger, ou simplement pour éviter que tout cela ne sorte publiquement ?).

Et n’évoquons pas la situation du Rwanda, le jeu trouble de la France, son implication avérée dans les massacres fomentés par des groupes hutus contre les tutsis et qui n’était pas ce que les media français en ont dit, qui n’était pas une « énième guerre tribale dont l’Afrique serait supposée coutumière », mais un épisode de la lutte d’influence entre l’Amérique qui soutenait le régime alors en place dans ce pays et la France qui acceptait mal de voir ce pays, hier dans sa zone d’influence, s’angliciser et échapper à son influence. Enfin et bien sûr au Proche Orient, où en entretenant une attitude contre productive, la France, contrairement à ce qu’elle prétend, a plutôt desservi les intérêts palestiniens en entretenant l’illusion que le terrorisme pourrait obtenir des résultats politiques tangibles, en vérité qui lui soit favorable face à Israël, perçu en porte avions de l’Amérique au Proche Orient.

Car en dehors d’intérêts très particuliers, comme au Sierra Léone, où la France dispute à l’Amérique le contrôle de mines de diamants, Paris partage très objectivement un intérêt commun avec l’islamisme, qui l’amène plus que de raison et en dehors de tout questionnement éthique ou moral qui devrait s’y opposer, à confondre confusément mais véritablement sa cause avec celle des pires ennemis de l’Occident judéo-chrétien : sa lutte acharnée contre la puissance anglo-américaine. Et tout le sens de sa politique arabe trouve ici son obstinée raison, depuis que la décolonisation a diminué sa puissance déjà largement affectée et entamée par son humiliante défaite militaire lors de la seconde guerre mondiale qui s’était soldée par une occupation militaire longue de 4 ans.
Mais cette politique est doublement suicidaire. D’abord d’un point de vue purement tactique, parce que la France s’est simplement rangée de ceux qui sont voués à la défaite face au monde libre et démocratique dont les valeurs s’imposent peu à peu, en dépit des fortes difficultés, ici en Irak, là au Proche Orient, et en fait partout pour la bonne raison que le terrorisme ne peut mener qu’à l’impasse, et que la liberté des peuples est inéluctable. Ce n’est qu’une question de temps. Ensuite d’un point de vue de la civilisation, et en déduction du raisonnement tactique, parce que la France s’est discréditée aux yeux du monde, plus que ne le laissent évidemment filtrer les media parisiens qui de par leurs intérêts confondus avec ceux du pouvoir n’évoquent pas la réalité des choses, mais dont il est pourtant indéniable que la parole de la France dans le monde se trouve gravement décrédibilisée par ses actes. Or à travers ce discrédit, c’est sa vision de la civilisation occidentale qui s’en trouve atteinte, son modèle qui ne peut plus être référent tant il parait aux yeux du monde de plus en plus s’être fondé sur une hypocrisie historique sans précédent vantant dans ses mots les valeurs les lumières, mais dont les actes nourrissent les puissances les plus obscurantistes de notre époque.
Car le complexe de Fachoda n’amène pas seulement la France du mauvais côté de la barrière, il est la négation de toutes les valeurs qui l’ont fondé, la négation, en somme, du sens même de son existence. En fait, dans une constance historique remarquable, tous les pouvoirs politiques qui se sont succédés en France depuis de longues décennies, toutes les élites qui s’en sont rendues complices, des journalistes aux intellectuels bien pensants qui ont, les premiers relayé, les seconds théorisé, ce complexe, érigé en doctrine nationale indépassable, ne se sont pas tant rendus coupables d’anti-américanisme, que d’une politique foncièrement anti-française. Car il n’est pire ennemi que celui, non qui combat, mais que celui qui trahit.

[1] Ce que confirmera le terroriste Carlos, qui a parfaitement détaillé la façon dont la France a transmis des photos satellite déterminantes sur les positions de la guérilla au sud du Soudan, pour permettre aux troupes de Khartoum de les prendre en tenaille et des anéantir