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POUR LES FEMMES SAOUDIENNES, CHAQUE JOUR EST UN COMBAT

 

Par Wajeha Al-Huwaidar, militante saoudienne pour les droits de la femme

Hurra TV le 26 mai 2007. (1) Voir les extraits vidéo sur http://www.memritv.org/search.asp?ACT=S9&P1=1465

Traduction et publication MEMRI -Dépêche spéciale n° 1604

 

"Il existe cinq types de chaînes, ou de prisons, pour la femme : si elle arrive à éviter un type de chaînes, il leur en reste d'autres."

 

Interviewer : Merci de nous décrire la société saoudienne.

Wajeha Al-Huwaidar : La société saoudienne est basée [sur un système] de maîtres et d'esclaves ou, pour être plus précis, de maîtres et de servantes, parce que les maîtres sont les hommes et les esclaves sont les femmes.

La possession d'une femme se transmet d'homme à homme, du père ou du frère à un autre homme : le mari. La femme n'est qu'une marchandise qui se transmet à quelqu'un d'autre - son tuteur. Comment reconnaît-on une servante ou une esclave ? La servante ne prend pas de décisions. Toutes les décisions sont prises par le maître. Les femmes, aujourd'hui, ne sont pas autorisées à prendre quelque décision que ce soit - ni de mariage, ni de travail, ni d'études, ni de traitement médical, ni de quitter leur domicile ou de partir en voyage.

Je pense que de façon générale, pour la femme saoudienne, chaque jour est un nouveau combat. Elle doit trouver les moyens de vivre sur cette terre sans entrer en collision avec la loi, les hommes, la société, les dignitaires religieux ou l'establishment politique. Elle est assiégée. Il existe cinq types de chaînes, ou de prisons, pour la femme - si elle arrive à en éviter un, elle peut fort bien être prise par un autre [type de chaînes]. Le premier [type de chaînes] est la tribu, puis vient la famille, puis les institutions religieuses, puis l'establishment politique, et finalement, la société. Où que vous alliez, vous devez vous battre. Que faire ? En toute femme saoudienne dort une Shéhérazade. Imaginez Shéhérazade s'efforçant chaque nuit de rester éveillée jusqu'à la nuit suivante. Voilà comment je considère les Saoudiennes. Certaines diront que j'exagère, mais…

 

"La femme est éduquée à craindre l'homme et la société"

 

Interviewer : Certains disent que votre vision des choses est lugubre.

Wajeha Al-Huwaidar : Elle n'est pas lugubre. Je suis réaliste. Je sais que certaines femmes chez nous vivent dans la prospérité et la liberté, et je fais partie de ces femmes, mais jusqu'à quel point ? Jusqu'à quel point êtes-vous le propriétaire de vos biens ?

La femme est éduquée à craindre l'homme et la société.

 

L'écrivain saoudien Khaled Al-Ghanami: Alors pourquoi accepte-t-elle cette éducation ?

Wajeha Al-Huwaidar : Parce qu'elle a beaucoup à perdre, si elle se rebelle. Quand un homme se rebelle, il risque d'entrer en collision avec le système politique uniquement. Mais une femme s'attaque à plusieurs institutions. Au bout du compte, je ne sais pas si vous avez remarqué que quand une femme s'émancipe, elle n'est plus respectée par la société. En revanche, quand c'est un homme qui brandit la bannière de la libération, qui appelle à l'égalité et au libéralisme, il est hautement respecté et on lui accorde la notoriété. Même l'Etat manifeste du respect à l'égard d'un homme qui s'exprime librement, mais par pour une femme, dans le même cas de figure. Elle paie le prix à tous les niveaux : au niveau de sa famille, de sa religion et de la société. En fin de compte, je pense que les femmes sont craintes. Quand je compare les Saoudiens aux Arabes, je me dis que le Saoudien est le seul homme qui ne peut pas rivaliser avec la femme.

 

Khaled Al-Ghanami : Il n'a pas su lui faire concurrence, alors que lui a-t-il fait ? Pourquoi ne pouvait-il rivaliser avec elle ?

Wajeha Al-Huwaidar : Parce qu'il a très peur des femmes. La femme a des capacités. Quand les femmes étudient, elles deviennent les concurrentes des hommes sur le marché de l'emploi. Tous les emplois sont permis aux hommes. 90% d'entre eux le sont. Vous ne ressentez aucune concurrence. Je ne menace pas de vous prendre votre emploi. [En outre,] les Saoudiens ne subissent pas la concurrence des non Saoudiens, considérés comme de statut inférieur. Le Saoudien est un homme qui ne sait pas ce que c'est que de fournir des efforts pour réaliser un rêve. Le Saoudien est ainsi. Je ne parle pas de tous les hommes, mais de la plupart d'entre eux. Ne subissant pas la concurrence des Saoudiennes, ni celle des non Saoudiens, vous avez toute la scène pour vous tous seuls. Toutes les positions et tous les emplois vous sont réservés, ce qui fait que vous êtes un homme gâté qui ne se refuse rien."

 

Note

(1)     Pour en savoir plus sur Wajeha Al-Huwaidar, voir la dépêche spéciale de MEMRI n° 1597 : " 'Ce n'est pas un complot occidental' : la réformiste saoudienne Wajeha Al-Huwaidar publie une suite à son poème satirique 'Quand' " sur http://memri.org/bin/french/latestnews.cgi?ID=SD159707 ; la Dépêche spéciale n° 1479 de MEMRI : "In a Satirical Poem, Saudi Author Laments Conditions in the Arab World," http://memri.org/bin/articles.cgi?Page=archives&Area=sd&ID=SP147907, et  l'Enquête et analyse n° 312 : "Saudi Writer and Journalist Wajeha Al-Huwaider Fights for Women's Rights," http://memri.org/bin/articles.cgi?Page=archives&Area=ia&ID=IA31206.