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L’Etat
Imaginaire des Palestiniens
Par Steven J. Rosen,
directeur du Projet pour le Forum sur le Moyen-Orient à Washington
, ex-représentant de l'AIPAC
Middle East Forum -03/08/11
Adapté par Marc Brzustowski pour aschkel.info
& lessakele
http://www.meforum.org/3000/palestinians-imaginary-state
Dans quelques semaines, il est
probable qu’une majorité écrasante, à l’Assemblée Générale des Nations-Unies
vote pour une reconnaissance collective d’un Etat palestinien. Mais quel Etat
palestinien ? Des trois Etats palestiniens que l’Assemblée pourrait
reconnaître, deux sont réels et pourraient, sans doute, remplir les conditions
requises pour l’instauration d’un Etat. Mais c’est bien le troisième, purement
imaginaire, que l’Assemblée approuvera, celui qui n’a jamais eu de gouvernement
fonctionnel ni ne remplit les conditions de la loi internationale.
Selon les normes légales qui prévalent,
la Convention de Montevideo sur les
droits et devoirs des Etats de 1933, un Etat, en tant que personne
morale constitutive de la loi internationale, devrait posséder les
qualifications suivantes :
a) une population permanente ; b) un territoire
défini ; c) gouvernement ; et d) la capacité d’entrer en relation
avec d’autres pays.
On peut dire, aussi bien l’entité
palestinienne contrôlée par le Hamas que sa rivale, l’entité palestinienne
gouvernée par le Fatah, dans la Bande Occidentale (Judée Samarie), qu’elles
remplissent ces critères concernant la loi sur l’Etat. Pas celui sur lequel les
Nations Unies voteront.
A Gaza, le Hamas contrôle une population
permanente dans un territoire défini ( c’est-à-dire
Gaza, dans les lignes d’armistice de 1949).
Gaza dispose d’un gouvernement fonctionnel, même s’il est odieux. Et la Bande
de Gaza contrôlée par le Hamas mène déjà des relations internationales avec un
grand nombre d’états. D’un strict point de vue légal, l’entité du Hamas à Gaza
pourrait devenir un Etat, une nouvelle addition misérable dans un monde très
imparfait.
Evidemment, un Etat Hamas à Gaza
n’est pas quelque chose que la majorité du monde souhaite voir émerger. Un Etat
Hamas allié à l’Iran constituerait un grave revers à la paix internationale et
à la sécurité, et ce ne serait pas un Etat qui mériterait la reconnaissance de
quelque démocratie que ce soit. Ce serait un Etat accouchant du coup militaire
de juin 2007, un Etat qui implique des violations à grande échelle des
obligations imposés par les traités et des droits de l’homme. Pas plus que le
Hamas ne cherche à obtenir un Etat pour Gaza seulement. Le Hamas souhaite
éventuellement diriger l’ensemble de la Palestine mandataire, comprenant non
seulement la Bande Occidentale [Judée-Samarie], mais également, tout l’actuel
Israël.
L’entité palestinienne du Fatah,
dans la Bande Occidentale, pourrait aussi remplir les conditions requises pour
l’établissement d’un Etat, et elle obtiendrait un meilleur soutien
international. Elle dispose d’un gouvernement en état de marche dans l’Autorité
Palestinienne (AP), d’une population permanente, et de relations
internationales avec un très grand nombre d’Etats. Elle contrôle également un
territoire défini, qui comprend ce qu’on appelle les zones A et B, telles que
définies par les Accords d’Oslo II, de
septembre 1995, plus le territoire supplémentaire transféré par la suite, par
Israël, lors de nouveaux redéploiements concertés -- la zone A est le secteur
de contrôle total civil et sécuritaire de l’Autorité Palestinienne, et la zone
B est une aire de contrôle civil palestinien et de contrôle sécuritaire
conjoint israélo-palestinien. L’Entité du Fatah dans la Bande Occidentale à
l’intérieur de ces lignes pourrait tout aussi bien être reconnue comme un Etat,
selon les lois internationales.
Mais le Fatah, l’AP, et l’ensemble
de l’OLP ne recherchent pas un Etat pour cette entité de la Bande Occidentale
qui pourrait, sans doute, remplir les conditions légales. Leur exigence
minimale est un Etat qui comprend Gaza aux côtés de la Bande Occidentale, la
partie Est de Jérusalem, et toutes les autres parties de la Palestine
mandataire qui étaient sous le contrôle jordanien et égyptien avant 1967. Le
Fatah, l’AP et l’OLP exigent le titre de territoires et l »autorité sur
les populations qu’ils ne contrôlent pas, du fait qu’ils soient sous le
contrôle du Hamas et d’Israël.
Au contraire des deux entités
palestiniennes qui existent déjà, chacune d’entre elles pouvant être reconnu
comme un Etat palestinien, parce qu’elles semblent remplir les conditions
légales, l’entité palestinienne qu’une majorité de l’Assemblée générale
reconnaîtra comme un Etat en septembre n’existe absolument pas sur terre
actuellement. Il s’agit d’un état imaginaire auquel aspirent les Palestiniens,
pas une réalité. Cette entité ne remplit pas les conditions légales.
D’abord, elle a deux Présidents
rivaux poursuivant des politiques incompatibles. Mahmoud Abbas se présente
comme le Président de Palestine qui fait pression pour affirmer ses prétentions
devant l’Assemblée Générale des N U, mais il n’est pas considéré du tout comme le
président par le Hamas, qui
reste le plus important parti dans l’Etat virtuel. Et le Hamas dispose de ses propres lois concernant la Palestine dans
cette controverse.
Abbas a été élu en 2005 pour
servir jusqu’en janvier 2009, aussi son mandat a-t-il expiré. En 2009, il a
prolongé unilatéralement son mandat, pour un an encore, jusqu’en janvier 2010
(autre prolongation qui a également expiré), mais cette prolongation n’est pas
conforme à l’article 65 de la constitution palestinienne, la Loi fondamentale. Le Hamas, qui dispose de
la majorité dans le désormais défunt Conseil Législatif Palestinien (CLP),
s’est opposé à cette extension. Selon l’article 65 de la Loi Fondamentale, le
Président légalement en place de la Palestine, depuis janvier 2009, aurait dû
être le porte-parole du CLP, Abdel Aziz Dweik, un député représentant le Hamas. Le parti
qui domine la Palestine, le Hamas, considère que c’est Dweik,
et non Abbas, qui doit être le Président légal de Palestine, et il est en
possession d’un dossier solide pour le prouver.
Deuxièmement, cette Palestine que
l’Assemblée Générale reconnaîtra, affichera également deux Premiers Ministres
rivaux, poursuivant des politiques incompatibles. . Hamas dément que c’est Abbas qui a toute autorité
pour désigner Salam Fayyad comme Premier Ministre,
pour la bonne raison qu’Abbas n’est pas le Président de Palestine, selon
l’article 65 et parce que Fayyad n’a pas été nommé
comme Premier Ministre par le Conseil Législatif Palestinien, comme il est
requis par l’article 66 de la Loi Fondamentale. Pas plus sa première
nomination, le 15 juin 2007, que sa seconde désignation au poste, le 19 mai
2009, n’ont été confirmés par le CLP, comme il est requis. Le Hamas qui jouit
de la majorité au CLP, considère que le Premier Ministre légal de l’Autorité Palestinienne doit continuer à
être Ismaïl Haniyeh, l’un des principaux dirigeants
politiques du Hamas. Haniyeh a été consacré par le
CLP en tant que Premier Ministre de Palestine, en février 2006. Annas a démis Haniyeh de ses
fonctions, le 14 juin 2007, après le coup à Gaza, mais Haniyeh
contre-attaque en répliquant que ce décret viole les articles 45, 78 et 83 et
que, de fait, c’est lui qui continue à exercer l’Autorité du Premier Ministre
selon l’article 83. Le CLP continue également à reconnaître l’autorité de Haniyeh en tant que Premier Ministre. Là encore, le Hamas a
la loi de son côté.
Troisièmement, cet état virtuel de
“Palestine”, de même, disposera d’une Législation qui ne s’est jamais
constituée. Elue le 25 janvier 2006, pour une durée de quatre ans, , le CLP n’a acté aucune loi,
n’a validé aucun poste de ministre, et n’a mené aucune réunion depuis 2007. Au
lieu de quoi, Abbas déclare: “C’est
mon droit, en tant que Président, de promulguer les lois et décisions, qu’on
appelle décrets. Ces décrets sont légaux, aussi longtemps que le Conseil
Législatif Palestinien (CLP) n’est pas capable de se réunir ».
C’est un lieu commun, pour ceux
qui observant l’actualité palestinienne et leurs supporters en Occident
d’attribuer l’inaction du CLP au fait qu’Israël a arrêté 21 de ses membres les
plus radicaux, en juin 2006, après l’enlèvement de Gilad
Shalit, dont la plupart restent en détention. Le
Centre Carter, par exemple, déclare :”Avec la
plupart de ses représentants dans les prisons israéliennes, le Conseil
Législatif Palestinien n’a jamais pu réunir le quorum nécessaire pour valider
ses assemblées, et, de fait, s’est montré incapable d’assumer les fonctions
attribuées au CLP ». Mais le CLP dispose de 132 membres, parmi lesquels à peine 20 sont détenus par Israël, et un
quorum du CLP ne requiert qu’une voix de plus de la moitié de ses membres –
donc 67- qui doive être présent. Aussi n’est-ce pas Israël qui empêche la tenue
d’un quorum.
En fait, aucune des factions qui
prétendent diriger la Palestine, ne veut actuellement que le CLP se réunisse,
pour différentes raisons. . Hamas ne veut pas qu’il se
réunisse en session pour promulguer de nouvelles lois ou amendements
renforçant les lois déjà existantes, depuis que sa majorité a été dissoute,
principalement parce qu’il craint des amendements défavorables ajoutés à la loi
sur les élections. Et le Fatah n’en est que plus content de voir que les
membres du Hamas sont en prison, parce que, lui non plus, ne souhaite que le
CLP se réunisse, de peur qu’il ne renforce la Loi fondamentale pour remplacer
Abbas et Fayyad. Le porte-parole du CLP, Dweik, que le Hamas considère comme le Président légalement
appointé de Palestine, a has dit de sa propre arrestation par Israël : « toute action qui met fin
à nos activités au Parlement a été bien accueillie par beaucoup d’entre eux, au
sein de l’Autorité Palestinienne.
Quatrièmement, cette Palestine que
reconnaîtra l’Assemblée Générale manquera de la capacité de tenir des élections
présidentielle ou législative, comme requis par l’article 47 de sa Loi
Fondamentale – pas parce qu’Israël l’en empêchera, mais, une fois encore, parce
que les dirigeants palestiniens rivaux ne permettront pas qu’elles aient lieu.
Le mandat défini d’Abbas a constitutionnellement expiré en janvier 2009, et les
mandats des représentants du CLP ont expiré le 25 janvier 2010, aussi de
nouvelles élections pour tous deux, sont plus qu’en retard. La Loi No. 9 concernant les élections
palestiniennes, de 2005, Article 2, que le Hamas reconnaît comme légalement
contraignante, et la Loi électorale de remplacement
décrétée unilatéralement par Abbas, le 2 septembre 2007, Articles 2 à 4, que le
Hamas considère comme une usurpation illégale de pouvoir, selon la
constitution, requièrent des élections dès maintenant, mais de telles élections
ne pointent pas à l’horizon. Aucun des rivaux ne désire qu’une élection se
tienne selon les règles électorales reconnues comme légalement contraignantes
par l’autre, et aucun ne permettra à l’autre de concourir librement sur les
territoires que lui-même contrôle, comme il est de droit, selon les deux
ensembles de règlements.
Ainsi obtient-on le tableau
complet de ce qui va se produire. L’Assemblée Générale prendra une décision
remarquable sur tout ceci dans les toutes prochaines semaines. Au lieu de
reconnaître chacune des deux entités qui sont des quasi-états déjà
préexistants, chacun disposant de beaucoup des attributs requis pour
l’instauration d’un Etat, selon la loi internationale, l’Assemblée Générale
créera un Etat imaginaire, qui affiche deux Présidents incompatibles, deux
Premiers Ministres rivaux, une constitution dont la plupart des principes
fondamentaux sont violés par les deux camps, pas le moindre corps législatif,
pas la moindre capacité à tenir des
élections, une population dont la majorité n’est pas sous son contrôle, des
frontières qui devraient annexer des territoires sous la juridiction d’autres
pouvoirs, et aucune procédure claire pour résoudre aucun de ces conflits.
C’est une résolution qui sème
les germes pour de nouvelles guerres civiles et internationales, et pas du tout
une avancée vers la paix.