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VOULOIR LA
PAIX, C'EST SAVOIR DÉNONCER LE TERRORISME
par Alain Finkielkraut, Philippe Gumplowicz, Marc Lefèvre et Pierre-André Taguieff, respectivement philosophe, universitaire, physicien et historien des idées.
Le
texte est soutenu par Nicole Spodek-Lefèvre, responsable de communication et
Jacques Tarnero, chercheur au CNRS
Paru
dans le Figaro, du 27 mars 2002
En compagnie d'un collectif de
quarante organisations (PC, Verts, LCR, groupes pro-palestiniens, etc.), une
Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (CAPJPO) a
manifesté le samedi 23 mars à Paris "pour une paix juste et immédiate au
Proche-Orient". Mot d'ordre astucieusement tricoté. Qui s'opposerait à
l'instauration "immédiate"
d'une "paix juste" dans cette région du monde ?
Comparons-le un instant à cet autre
appel piloté par l'Association France Palestine Solidarité (Le Monde, 21 mars).
Même incrimination ritualisée du démon Ariel Sharon ou du "gouvernement et
de l'armée d'Israël", considérés comme les seuls responsables de la
situation actuelle. A aucun moment n'est envisagée la plus infime
responsabilité de l'Autorité palestinienne dans la crise actuelle. Aucune
référence à la prise de position des leaders palestiniens, qui n'ont pas su
utiliser et exploiter à leur avantage les opportunités politiques qui s'étaient
présentées à Camp David et à Taba.
Aucune allusion non plus, dans le
texte d'appel de l'Association France Palestine Solidarité, aux attentats qui
frappent presque quotidiennement des gens de passage en Israël. Plus insidieux,
le teste signé par le CAPJPO ne mentionne pas la "mort de civils innocents
lors d'attentats aveugles" que pour la rapporter à "la politique
criminelle du gouvernement israélien". Sans qu'un cil bouge, voici ces attentats
palestiniens malignement transférés sur le diable Sharon, à moins qu'ils
n'entrent dans le moulin à eau de l'histoire, dilués dans le droit exorbitant
des opprimés ou des dominés à faire n'importe quoi. Pour nous, la lucidité
exige d'interpréter ces attentats pour ce qu'ils veulent dire.
Depuis le déclenchement de la deuxième intifada – symboliquement islamisée sous la dénomination d'el-Aqsa –, les attentats aveugles, quasiment journaliers, s'attaquent indifféremment à chaque Israélien. Le martyr national-islamiste ne pratique pas d'attentat "ciblé". Il ne sélectionne pas ses victimes en fonction de leur âge ou de leur lieu d'habitation géographique. Il ne connaît ni de Juif israélien innocent, ni même, si l'on en croit l'attentat du mercredi 20 mars dans Nahal Iron, d'Arabe israélien innocent, et encore moins d'habitant intra- ou extra-"ligne verte" (les frontières d'avant la guerre des Six-Jours).
A quel programme autre que génocidaire,
un Israélien peut-il attribuer ces attentats ? Est-ce autre chose qu'une
guerre de purification ethnique ? S'il n'est effacé du monde des vivants,
chaque Juif foulant la terre d'Israël doit en déguerpir. Des dirigeants palestiniens irresponsables sont en train de fabriquer un
peuple de tueurs suicidaires dans lequel des parents font l'éloge de leurs
enfants "martyrs" passés, présents et à venir. Tout cela ne mène qu'à
une lutte inexpiable et à une violence infinie. L'islamisation du peuple
palestinien rend à terme impossible l'existence même d'un Etat palestinien.
Les nationaux-islamistes peuvent continuer à agir jusqu'à ce que mort
s'ensuive : leurs victimes – ou le gouvernement – sont responsables du mal qui
leur est fait. Exonérés de toute réflexion sur leurs actes (puisque la
"politique criminelle de Sharon" est cause de tout), l'Europe
progressiste leur a délivré un permis de tuer. La gauche progressiste
est-elle encore en mesure de voir cela ?
Reste la question des relations des
Français juifs et arabes au sein de la République française. Afin de
"montrer l'exemple du dialogue aux jeunes" et de les mobiliser
"contre toute forme de racisme", le CAPJPO demande aux Juifs de
France de se faire "critiques de la politique israélienne". Il ne
demande évidemment pas en échange à ces jeunes de confession musulmane de se
désolidariser des attentats. Qui a permis au CAPJPO de communautariser ainsi
les répercussions de ce conflit en France, de singulariser des individus en
leur affichant une étiquette d'appartenance, et d'exclure les Français ni juifs
ni musulmans du débat ?
Voilà pourquoi nous ne sommes pas
allés manifester le 23 mars, quand bien même cette "coordination" a
su rallier à elle des personnalités sincèrement concernées par l'ampleur de la
crise actuelle. Est-il nécessaire de préciser que la fin de l'occupation en
Cisjordanie est pour nous une étape nécessaire de la paix ? Nous soutenons la
création d'un État palestinien aux côtés de l'État d'Israël, et soutenons, de
toutes nos forces, la "coalition israélo-palestinienne pour la paix",
composée de personnalités israéliennes et palestiniennes qui se battent sur le
terrain pour créer les conditions d'une paix réaliste et équitable.
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