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À QUI PROFITE LE
CRIME ?
terrorisme, pays arabes, hégémonie,
psychisme, Islam, al Qaeda, idéologie, terreur, Iran, Arabie, Egypte
Par Albert Soued, www.chez.com/soued - le 5 octobre 2004
Cette question m'a été posée ingénument par ma voisine lors d'un colloque à Bruxelles sur "l'Europe face au terrorisme- défis et solutions", question à laquelle nous allons essayer de répondre.
Y a-t-il crime d'abord ?
Sous la pression du lobby des pays arabes et islamiques qui compte 53 membres à l'Onu, cette organisation n'a pas réussi à définir les actes de terrorisme comme des actes criminels. Elle a été incapable de qualifier comme crimes les tueries aveugles d'innocents, à la bombe suicide ou à la voiture piégée, malgré le fait que ce processus semble en plein développement mondial et qu'en dehors des morts, il laisse des séquelles traumatiques importantes dans la population visée.
Relayée par les médias arabes et occidentaux, la propagande
des responsables terroristes a pour but de "victimiser" les
assassins, les présentant auprès de l'opinion publique comme de pauvres opprimés
qui se révoltent. Le problème qui n'est pas mince est de rétablir la vérité, en
essayant de cerner "ceux qui les ont appauvris
et ceux qui les ont opprimés".
Un exemple précis illustrera notre propos. Récemment une amie a rédigé un poème poignant autour d'un adolescent palestinien bardé d'explosifs qui allait se faire sauter et qui s'est fait prendre par un soldat israélien. Celui-ci a réussi à lui faire enlever sa ceinture, sans dommage. Le poème était dédié au jeune héros d'une image photo qui a fait le tour du monde. Mais qui est en fait le véritable héros? Celui qui allait tuer un grand nombre d'innocents en se suicidant ou celui qui a réussi à obtenir un heureux dénouement, sauvant des dizaines de vies humaines ? Le photographe de presse montrant un jeune homme frêle et apeuré, en train de se dénuder devant un soldat baraqué et armé, ainsi que la poétesse en herbe sont tous les deux des victimes "bien pensantes" de la propagande terroriste et islamiste.
Au Moyen Orient deux pays au moins sont en concurrence pour la prééminence idéologique en Islam sunnite, l'Egypte et l'Arabie Saoudite. Considérée comme modérée, l'Egypte a su juguler ses extrémistes, les Frères Musulmans. Contenus dans ce pays, ils se sont répandus partout au Moyen Orient et dans le monde prêchant les doctrines subversives de Sayed al Qoutb et de H'assan el Banna (1).
Le cas de l'Arabie est différent. La doctrine wahabite (2) prônant le retour à l'Islam originel, pur et dur, est née au sein de la famille dirigeante, celle de la tribu al Saou'd (cette doctrine est appelée salafiste, ou celle de la famille fondatrice, au Maghreb), il y a déjà plus de deux siècles. La création d'un état saoudien par les anglais et l'argent du pétrole ont donné à cette doctrine extrémiste l'élan nécessaire et en l'espace d'un demi-siècle, elle a été diffusée par les dizaines de milliers d'institutions créées à travers le monde, mosquées, madrassas (écoles coraniques), centres de soins et dispensaires, centres culturels…De plus l'Arabie Saoudite finance le chômage, la retraite et les œuvres sociales des cadres égyptiens du journalisme, du barreau, des médecins, c'est dire qu'elle contrôle l'intelligentsia d'Egypte.
Voilà les deux principaux courants de pensée et d'activisme islamique qui se sont développés depuis la dislocation de l'empire ottoman en 1917. Leur but est de rétablir un califat, puis de répandre l'Islam dans le monde par la voie du Prophète, le Jihad, la lutte. Vaste ambition et vaste programme.
Le terreau arabo-islamique qui donne naissance à des terroristes est fait de sentiments d'humiliation et de frustration.
L'humiliation est le corollaire du double sentiment d'échec collectif et individuel. Sur le plan de la nation arabe, il est vrai que depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, seul le Moyen Orient est en régression économique dans le monde, provoquant un immense chômage chronique. Les raisons principales de cet échec ont été recensées par les experts de l'Onu (3), un régime politique autoritaire, souvent une dictature militaire bafouant les droits de l'homme et faisant fuir vers l'étranger les rares cadres qualifiés, la corruption des élites, l'investissement dans l'armement et des guerres inutiles, le statut inférieur de la femme…L'hostilité des masses qui en découle a été canalisée par leurs dirigeants contre les pays occidentaux, traités de colonialistes ou d'impérialistes, et contre Israël, traité d'usurpateur de terres arabes (4). Étant devenus la source des malheurs arabes, ces pays sont dès lors traités comme des ennemis.
L'humiliation personnelle vient d'un milieu familial où la figure du père est dominante, voire écrasante. La tyrannie du père qui accumule tous les pouvoirs de la famille enlève toute identité à la progéniture, souvent nombreuse et sans écoute. Cette perte d'identité individuelle, associée à des perspectives nationales sombres est propice à la dépendance idéologique. D'autant plus que la religion n'invite pas au libre-arbitre, ni à la responsabilité individuelle.
Aujourd'hui on ne peut pas parler d'un arabe de la rue ou d'un palestiniens sans dire qu'il est "humilié". Même le président Bush, lors d'une allocution le 21/9 à l'Onu, a demandé à Israël de cesser d'humilier les Palestiniens, sous prétexte qu'ils attendent trop longtemps aux postes de contrôle ou qu'on commence à fouiller les femmes. Le lendemain de cette adjuration une Palestinienne se fait sauter à Jérusalem et le surlendemain deux terroristes dont une femme se sont fait sauter dans des bus à BeerShevaa' provoquant une vingtaine de morts, des dizaines de blessés et des centaines de traumatisés. Qui humilie qui ?
Quant à elle la frustration est matérielle et sexuelle.
Devant les écrans de télévision, les masses arabes sentent qu'elles n'ont aucun espoir d'accéder au mieux être atteint par les Occidentaux ou les dragons asiatiques. Le succès du minuscule Israël dans de nombreux domaines, au milieu de la masse arabe, est comme un couteau dans une plaie béante, au lieu d'être un stimulant de progrès. L'incapacité de faire est frustrante.
Sur le plan sexuel, l'homme est élevé dans le mépris de la femme (5). La polygamie des plus riches, la sélection prénatale des garçons qui se développe, l'incapacité de payer la dot laissent les jeunes gens sans chance de trouver une partenaire, vivant sans amour, sans espoir. Les uns sombrent dans l'homosexualité, les autres dans la pureté ici bas et l'illusion d'avoir 72 vierges rien que pour eux dans l'au delà. D'une façon générale, la femme réprimée et violentée, sinon violée, et l'homme n'ayant pas la chance d'assouvir ses désirs sont les victimes de choix des recruteurs de terroristes. Ces candidats au suicide sont tous des bourgeois et leurs recruteurs n'envoient jamais leurs propres enfants au charbon.
Pour illustrer notre propos, nous reprenons ici un entrefilet du journal le Monde de ce jour à propos de l'Afghanistan: "Vedette d'un court-métrage primé au festival du cinéma, organisé par un journal féminin, Soraya 21 ans, n'aura pas vécu assez longtemps pour recevoir et savourer son prix. Elle a été tuée par son mari, il y a 3 jours. Il lui avait pourtant donné l'autorisation de se produire, mais il n'a pas supporté de la voir jouer le rôle d'une femme menacée d'expulsion par sa belle famille, si elle mettait au monde une 4ème fille…et qui se suicide, après avoir accouché d'une fille…"
L'humiliation et la frustration mènent aux solutions
extrêmes offertes sur un plateau par les recruteurs du terrorisme islamique.
Récemment on nous a montré à la télévision un Palestinien à la morgue devant la
dépouille de son frère tué au Jihad. On pouvait s'attendre à ce qu'il pleure ou
qu'il soit triste, mais il dit en riant "il nous a fait un cadeau… en
partant au paradis".
L'idéologie terroriste est révolutionnaire et quasi messianique (6).
D'après l'Islam originel les chrétiens et les juifs sont des infidèles qu'il faut convertir à la vraie foi ou traiter comme des citoyens de seconde zone, payant capitation et soumis à des règles humiliantes. En dehors de cette alternative se trouve la mort par décapitation. Voilà l'explication du sort des otages capturés un peu partout, à la manière des tribus arabes du 7ème siècle: ils doivent choisir entre la conversion, la rançon (vu l'impossibilité provisoire de les transformer en dhimmi) ou la mort.
Les mœurs occidentales libérales sont considérées comme
décadentes. Ainsi par exemple, le parlement turc était prêt à punir de prison
l'adultère, première étape avant le retour à la lapidation d'antan. Un jour
j'ai offert un café à un artisan-peintre maghrébin dans un bistrot du coin où
sévissait quelques poivrots. Cet homme est sérieux et consciencieux. Se sentant
en confiance, il me dit en me montrant les gens éméchés "dès que j'ai
amassé un peu d'argent, je reviendrai au bled, je ne laisserai pas vivre mon
fils dans cette société décadente et je suis sûr que vous pensez comme
moi…"
À moins de détruire l'Occident et de le remplacer par la "oumma", la nation musulmane. Comme l'Occident est décadent, pour le détruire, il suffit de le fragiliser davantage sur le plan psychique et sur le plan économique, et il s'effondrera comme un château de cartes.
La terreur c'est fait pour "terroriser". Quelqu'un qui est terrorisé ou traumatisé est fragilisé et peut adopter le point de vue de l'adversaire. Il n'y a même plus besoin de mettre des bombes dans les avions. Il suffit de téléphoner pour dire qu'il y a une bombe dans l'avion. Répétez cela plusieurs fois par jour dans plusieurs pays et pendant plusieurs mois et vous créez la panique dans les transports. Les terroristes utilisent la démocratie occidentale et la technicité dans les transports et les communications (portables, internet …) en les tournant à leur profit. Petit à petit, un peu partout, en créant des cellules autonomes d'adeptes endoctrinés et entraînés et en les multipliant, ils devraient être capables de détruire les communications occidentales et de là le tourisme et l'économie. Le sabotage des pipe-lines, les guerres civiles du Soudan, du Nigéria et du Caucase ont pour but de créer une pénurie de pétrole et de saper les économies libérales par des crises.
Cette révolution-jihad des terroristes sunnites a comme objectif simultané de déstabiliser progressivement les états arabes et islamiques existants (Jordanie, Arabie, Pakistan, Egypte…) et de s'emparer ainsi du pouvoir. Le Pakistan a déjà un arsenal nucléaire.
La révolution shiite d'Iran (et peut-être demain celle d'Irak) est messianique, l'Islam shiite attendant l'apparition d'un messie qui est caché. En 1979, Khomeini était supposé être un messie. Appelé Mahdi, cet homme providentiel doit transformer le monde, en le détruisant d'abord. Les imams d'Iran s'y préparent en développant des armes de destruction massive et des fusées de très longue portée. Ils sont relayés en Syrie par d'autres Shiites, les Assad alaouites et au Liban par le H'ezbollah, armé jusqu'aux dents de fusées et de missiles de toutes sortes, orientés vers Israël.
La révolution islamique sous forme de jihad est en marche. Réussira-t-on à l'arrêter?
Pour venir à bout d'un terrorisme classique à l'européenne (ETA, armée rouge…), il faut des moyens d'information et de noyautage, et du temps. Le succès est pratiquement assuré.
Pour venir à bout d'une révolution de "gens humiliés et frustrés", disséminés dans le monde entier et qui sont manipulés par des dirigeants sans scrupule ou des doctrinaires fanatiques, c'est beaucoup plus délicat. La réponse à la question initiale "à qui profite le crime ?" ne peut pas être claire. Il y a des mouvements en marche sous forme de nébuleuses et n'importe qui peut en prendre la direction à un moment ou à un autre. Nous avons cité des pays candidats.
La solution de l'apaisement ne peut servir qu'à faire gagner du temps à l'adversaire et à leurrer ceux qu'on veut défendre. La recherche des circuits financiers de la terreur et le gel des avoirs sont illusoires car on peut aisément les contourner. Le noyautage et l'infiltration des réseaux est un travail de très longue haleine.
La doctrine du président Bush n'est pas l'endiguement pratiqué vis à vis du communisme par ses prédécesseurs. Sa doctrine est à la fois préventive et offensive. Prévenir en attaquant les foyers dangereux (l'axe du Mal) et en encourageant l'installation de régimes "à velléités démocratiques" ou du moins favorables à l'Occident. Pour cela il faut encourager et financer des mouvements musulmans modérés, formellement opposés à la terreur et au totalitarisme. Encore faut-il trouver des candidats sérieux …
Nous ajouterons à cela qu'il faut informer et sensibiliser les populations en Europe des dangers mortels qui les menacent, au lieu de leur démontrer à l'inverse, à travers les médias, que les terroristes sont de "pauvres victimes de l'oppression capitaliste" et que les attentats-suicide sont des actes héroïques de gens désespérés. Ou simplement des "accidents".
Mais il est difficile de faire volte-face ou machine arrière quand on s'est engouffré dans la voie de l'apaisement et de la capitulation. L'affaire des journalistes otages en est l'illustration frappante.
(1) voir www.nuitdorient.com/n11.htm , www.nuitdorient.com/n1112.htm , www.nuitdorient.com/n226.htm
(2) voir www.nuitdorient.com/n231.htm , www.nuitdorient.com/n226.htm , www.nuitdorient.com/n2317.htm
(3) voir www.nuitdorient.com/n2210.htm
(4) le territoire israélien couvre une superficie de 21 000km2, soit un peu plus d'un millième des 22 nations arabes réunies.
(5) voir www.nuitdorient.com/n23i3.htm , www.nuitdorient.com/n1111.htm
(6) lire "La révolution des messies" – Albert Soued - (Harmattan 2000)