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QUI A TUÉ M. AL-DURA?

CALOMNIE MEURTRIÈRE MÉDIÉVALE VERSION 2000

 

Par Amnon Lord, chroniqueur israélien chevronné.
 
paru dans JERUSALEM VIEWPOINTS No. 482  du 15 juillet 2002
Traduction française par Menahem Macina le 19-09-2002


Selon une enquête réalisée par la chaîne allemande de télévision ARD, qui s'appuie sur une étude du physicien israélien Nahum Shahaf, Muhammad Al-Dura, figure emblématique du soulèvement palestinien en cours, n'a pas été tué par un tir de Tsahal, au carrefour de Netzarim. Shahaf a analysé le film-vidéo réalisé sur les lieux de l'événement, il s’est entretenu avec des soldats de Tsahal et avec des photographes qui étaient présents sur les lieux. Il en conclut que les Palestiniens, en collaboration avec des journalistes étrangers et l'ONU, ont réalisé une production bien mise en scène.

L'histoire de la mort de l'enfant Muhammad Al-Dura - qui, selon les reportage des médias locaux et mondiaux, a été abattu par des soldats de Tsahal au carrefour de Netzarim - est devenue le symbole de l'Intifada: le martyr palestinien dont le sang doit être vengé par les musulmans et le monde civilisé. Sa mort s’est transformée en calomnie meurtrière qui accompagne la terreur et la violence, et elle est devenue l'autel sur lequel la bonne réputation du peuple et de l'Etat d'Israël a été sacrifiée, au cours des deux dernières années. Le monde a été inondé de photos de l'enfant mort. Du fait, entre autres, de l’agitation mondiale qui s’est ensuivie de la répétition du 'mantra': "Israël assassine les enfants palestiniens", la conférence de l'ONU, à Durban, s’est transformée en une effrayante croisade antisémite.

Rencontre avec Nahum Shahaf

"Nahum Shahaf a travaillé pour le ministère de la défense d'Israël comme physicien au département d'intelligence optique de Tsahal. Il a beaucoup contribué, et de diverses manières, au système de la défense, et il fut au nombre des principaux réalisateurs d’instruments de pilotage et de vidéo pour avions sans pilote. Shahaf a étudié les dommages causés par les missiles irakiens, en 1991, et a conclu qu'une partie des dommages a été provoquée par des missiles Patriot. Sa tâche dans l'affaire Muhammad Al-Dura fut beaucoup plus compliquée. Shahaf a accumulé et analysé tout le matériau disponible relatif à la mort d'Al-Dura."

Shahaf précise qu'il avait immédiatement perçu que quelque chose n'était pas correct dans le reportage sur la mort du garçon. De fait, beaucoup de ceux qui ont vu et entendu les reportages à la télévision se sont demandé comment les journalistes avaient osé décider avec assurance que l'enfant avait été abattu par un tir de Tsahal, et ce sur la foi de l'unique prise de vues du photographe de télévision qui avait filmé le garçon abattu.

Le travail de Shahaf a été au centre de la recherche de Tsahal sur cette affaire, et c’est sur lui que s'est fondée l’émission d’enquête réalisée par Esther Shapira, réalisatrice de la série documentaire "The Fourth Square", qui a été diffusée sur la chaîne allemande de télévision ARD, le 18 mars 2002.

Les dirigeants juifs français, qui ont dû faire face à une montée de l’antisémitisme dans leur pays, après la diffusion d'une émission télévisée spéciale intitulée "La mort du petit Muhammad", dans laquelle Israël était catégoriquement accusé de l’assassinat de Muhammad Al-Dura, ont été si impressionnés par l'analyse sérieuse et détaillée de Shahaf, qu'ils ont trouvé assez d’assurance pour déposer plainte contre "France 2", devant les tribunaux français.

L’enquête

Une pièce du bureau de Shahaf a été transformée en laboratoire-vidéo informatisé, où il a recueilli la majeure partie du matériau filmé ce jour-là – des heures de prises de vues brutes et inédites, enregistrées le 30 septembre 2000, le troisième jour après le déclenchement du combat. Shahaf a superposé les angles des photographies, isolé des images, et soigneusement analysé ce qui s'est passé, ce jour-là, entre les soldats de Tsahal et les Palestiniens, au carrefour de Netzarim. Il a interrogé les soldats et leurs officiers, qui étaient en poste dans la position fortifiée de Tsahal, qui veille sur la route située dans la ville juive de Netzarim. À divers moments de la journée, la position israélienne a été assiégée et soumise à des tirs de Palestiniens en armes, tirs qui provenaient de trois directions. Shahaf a également retrouvé plusieurs des photographes de la télévision présents ce jour-là.

Parmi tous les photographes et journalistes qu'il a interrogés, Shahaf s’est particulièrement intéressé au caméraman palestinien de "France 2" : Talal Abu-Rahma, l'homme qui a dévoilé au monde les images célèbres montrant Muhammad Al-Dura au moment de sa mort.

Où était le conducteur de l'ambulance?

Dans son enquête, Shahaf a également examiné une autre diffamation meurtrière, qui s’est greffée sur la mort d'Al-Dura. Selon les rapports dramatiques de ce jour, juste après que l'enfant ait été abattu, une ambulance est arrivée sur les lieux. Le conducteur est sorti pour s'occuper de l'enfant, et on a prétendu qu’il avait été tué par un tir de Tsahal. Pourtant, il n'y a aucune prise de vue de cet événement dramatique. Quelque vingt cameramen de télévision étaient en cet endroit, et aucun d’eux n'a filmé l’événement, alors que la scène montrant la mort d'Al-Dura était filmée par Abu-Rahma et un autre caméraman. (Plus tard, Shahaf a découvert le film du second photographe.)

Comment se fait-il qu’aucun des photographes, présents par dizaines sur les lieux, n’ait filmé le chauffeur de l’ambulance qui a été abattu ? On a rapporté qu’il a été tué alors qu’il sortait de son ambulance pour porter secours à l'enfant. Il aurait dû être face à la caméra d'Abu-Rahma, ou au moins tout près. Abu-Rahma aurait dû être en mesure de le filmer. Quoi de plus dramatique, en effet ? Un conducteur d'ambulance surgit pour sauver un enfant blessé, on tire sur lui et il est abattu. C'est Abu-Rahma qui a déclaré à NBC que le conducteur avait été tué, et qui lui a montré une photo du conducteur.

Shahaf a demandé à Abu-Rahma:
"Pourquoi n’avez-vous pas filmé le conducteur de l'ambulance au moment [de la tentative de] sauvetage?"
Abu-Rahma: "Parce que le conducteur a été tué avant d’arriver."

Shahaf: "Comment le savez-vous ?"
Abu-Rahma: "Parce qu’il n’est pas arrivé."
Shahaf: "Où a-t-il été tué?"
Abu-Rahma: "Je ne sais pas. Je n'ai pas vu. Je ne sais pas."

Le caméraman nie avoir affirmé que Tsahal avait tué l’enfant

Shahaf l'a alors interrogé sur la mort de Muhammad Al-Dura. Voici la réponse d'Abu-Rahma, le caméraman qui se trouvait à environ 30 mètres du père et de son fils, quand on leur a tiré dessus.
Abu-Rahma: "Je ne pense pas que les Palestiniens ont dit qu'Israël avait tué l'enfant."
Shahaf: "Mais vous avez dit que vous étiez sûr que les soldats de Tsahal avaient tué l'enfant!"
Abu-Rahma: "Je n'ai pas dit que les soldats de Tsahal l'avaient tué. J'ai dit que les balles venaient de la direction... et ont atteint Muhammad Al-Dura et Jamal [son père]."
"Ce qui veut dire qu’il ne sait ni ne dit d'où provenait le tir", commente Nahum Shahaf. Charles Anderlin, de "France 2, le principal journaliste de la station, en Israël, a dit la même chose à Shahaf.

Une des raisons avancées pour expliquer le fait que seul Abu-Rahma filmait, au moment où près de vingt photographes étaient sur les lieux, est que les soldats de Tsahal tiraient "comme des fous" et que personne ne pouvait atteindre le carrefour [de Netzarim]. La vérité est que, au cours de la journée, il y a eu de longues périodes durant lesquelles les Palestiniens se sont mis à tirer sur la position de Tsahal à partir de leur propre position, de l’autre côté du carrefour. Le père et le fils s’étaient abrités à côté d'un mur proche de la position palestinienne.

Les soldats israéliens ont été interrogés de manière approfondie, et ils ont expliqué qu’ils avaient agi conformément aux instructions explicites qui leur avaient été données. Ils n'ont pas réagi par les armes aux jets de pierres ni de cocktails Molotov, ils ont seulement riposté en direction de l’endroit d’où provenaient les tirs dirigés contre leur position.

Que montrent les bandes vidéo?

En examinant les bandes-vidéo brutes, qui ont couvert la quasi totalité de la journée, Shahaf a pu reconstituer clairement ce qui s'est produit autour de la position de Tsahal, au carrefour [de Netzarim]. Ces vidéos corroborent pleinement les témoignages des soldats de Tsahal, qui ont été enregistrés sur le film, déclarant qu’à ce moment-là, ils ne savaient rien de la mort d'un enfant palestinien près de la position palestinienne. Ils en ont seulement entendu parler 24 heures plus tard.

Que voit-on sur les bandes-vidéo, avant qu'elles aient été élaborées en séquences d'images des combats entre la jeunesse palestinienne et les soldats de Tsahal, dans le sang, le feu, et la fumée?

Le matériel peut être classé en trois épisodes, ou scènes distincts:

- Des jeunes, y compris des petits enfants, qui se groupent à une distance de quelques mètres des embrasures des meurtrières de la position de Tsahal, au carrefour de Netzarim.
- Des incidents de grande envergure qui semblent violents, mais n’ont pas lieu dans le voisinage immédiat de la position de Tsahal et n'ont aucune relation avec le poste du carrefour.
- Des incidents qui se sont produits en face de la position palestinienne, de l'autre côté du carrefour, à une distance d’environ 120 mètres de la fortification de Tsahal.

Scènes de la position israélienne

Les cameramen ont enregistré un certain nombre d’actions qui se sont déroulées exactement en face des embrasures des meurtrières du poste de Tsahal. Tout d’abord, on voit des jeunes gens et des enfants derrière un tas de sable, près du mur de la position de Tsahal. Ils jettent de grandes quantités de pierres et de bouteilles contre la position – au point qu’à un certain moment le toit commence à s’effondrer sous le poids des pierres. Des cocktails Molotov sont également jetés, et causent continuellement de petits incendies sur le toit de la position. Pourtant les soldats de Tsahal ne ripostent pas, malgré le fait que quelques-uns d'entre eux ont été brûlés par les cocktails Molotov. Ce n’est que de temps en temps qu’un soldat apparaît dans le poste de surveillance, qui est protégé du haut. On voit clairement qu'il n'y a aucun tir de Tsahal.

De plus, on voit un adolescent qui semble blessé, à quelques mètres de la position de Tsahal. Mais, derrière lui, la vie semble se dérouler normalement.. Des gens sont arrêtés ou marchent alentour, ils se parlent et sourient. A quelque distance, se tiennent des gens qui semblent contents de ce qu'ils voient. L'adolescent blessé lève la main et se met à courir vers l'arrière. Personne ne s’accroupit dans une attitude d'autodéfense instinctive pour se mettre à couvert. On voit au moins cinq cameramen de télévision qui se meuvent sans crainte sur les lieux, pointant leur objectif sur la personne blessée. Une ambulance de l'ONU arrive avec une synchronisation étonnamment parfaite, et la personne blessée est mise à l'intérieur.

Dans un autre incident enregistré, un adolescent court avec ce qui ressemble à du sang coulant de son front, et tenant une bouteille de soda dans la main. S'il avait été blessé par balle, il eût été à terre et il eût fallu aller le chercher. Cependant, au lieu de courir se mettre à l’abri dans le verger qui borde le carrefour, on voit l'adolescent courir au centre du carrefour, où l'attendent ses amis munis de caméras et avec la même ambulance de l'ONU. Après que l'ambulance ait fait le tour obligatoire du triangle qui est au centre du carrefour, le jeune blessé est transféré de l'ambulance de l'ONU à une ambulance du Croissant Rouge, les deux véhicules étant arrière contre arrière - tout cela à un moment où est censé avoir lieu le tir de Tsahal, qui aurait prétendument blessé l'adolescent.

Derrière cette scène - c'est-à-dire, face à la position palestinienne - dans le secteur censé être sous le feu de Tsahal, on peut voir le public. Il y a là de près de 200 hommes, adolescents, et enfants, sur deux ou trois rangs, et certains de ceux du premier rang sont assis sur le bord du trottoir. Non loin d’eux, passent des adolescents roulant à bicyclette.

On pose pour la caméra

Sur les bandes vidéo enregistrées dans un secteur éloigné de la position de Tsahal, derrière une usine, tout est mis en scène et représenté. Ici, on voit les mêmes phénomènes que ceux qui ont eu lieu devant le poste de Tsahal, mais sans la présence de Tsahal. Les gens affectent de se mettre à couvert au beau milieu d’un combat, tandis qu’au même moment, derrière eux, des hommes et des enfants marchent çà et là librement et sourient, comme le font beaucoup de cameramen de télévision (tous Palestiniens), exactement comme à Hollywood.

Sur la bande vidéo, on peut voir des groupes de terroristes armés, dont beaucoup en uniforme, ainsi que des foules d'adolescents jeteurs de pierres. Ceux qui ont des armes tirent des rafales et des tirs au coup par coup. Les tirs ne visent rien de précis, mais ils pourraient réellement mettre en danger les jeunes alentour. Certains de ceux qui ont des armes sont élégamment vêtus et portent chemise et cravate. Dans une scène enregistrée, un adolescent pose comme s’il se mettait à couvert, allongé sur le dos, derrière un distributeur d’argent, tout en parlant avec excitation sur son téléphone cellulaire. Mais que fait l'homme debout à côté de lui? Ne craint-il pas d’être blessé?

Un angle supplémentaire

Par son travail diligent de compilation, Shahaf a repéré des matériaux-vidéo, jusque là inconnus, qui saisissent Muhammad Al-Dura et son père sous d’autres angles. Il y a une scène dans laquelle on peut voir un caméraman de télévision, un genou au sol, à côté de l'enfant et de son père. Ainsi, là également, il a dû y avoir un caméraman supplémentaire, celui qui a filmé le premier caméraman.

Il y a également une image de jeunes qui courent et passent devant le baril de ciment pour évacuer l'endroit. Al-Dura et son fils restent derrière le baril et ne se joignent pas aux gens qui, semble-t-il, s’éloignent d'un secteur dangereux. Soit ils se sont sentis assez en sûreté derrière ce refuge, parce que le tir de la position de Tsahal ne pouvait pas les blesser, soit ils sont restés là dans un autre but.

En conclusion, il y a des images isolées du film qui montrent Al-Dura, après ce qui ressemble à une blessure de la main. Les images montrent que l'enfant a changé de position, et a également déplacé sa main et sa jambe. À la fin d'un jour de tournage, ces scènes sont présentées au monde comme "La mort de Muhammad Al-Dura".

Détermination de la responsabilité

La bande vidéo brute montre que les cameramen palestiniens de télévision ont eux-mêmes pris part aux événements, et qu'au moment où les diffuseurs de nouvelles, et les chaînes de télévision européens, américains, et israéliens recevaient leur matériau élaboré, ce dernier était déjà si bien mis en forme qu’il ne restait plus qu’à y ajouter quelques commentaires anti-israéliens.

Le porte-parole de Tsahal, le général de brigade Ron Kitri affirme que Tsahal n’a pas endossé la responsabilité de la mort du garçon, mais celle du lourd échange de tirs. Kitri a également reconnu qu'un enfant avait été tué en cet endroit, et le général Yom-Tov Samia, chef du Commandement de la zone sud, a ordonné une enquête. Jusqu’ici, il n'y a eu aucune coopération des Palestiniens à l’enquête, et ils ne se sont pas montrés disposés à autoriser que l’on procède à une autopsie.

L’enquête de Tsahal, à laquelle a participé Nahum Shahaf, s’est achevée en janvier 2001 et a conclu que la cause de la mort de l'enfant n’était pas connue. Le rapport de Tsahal a également indiqué qu'il n’existait aucun film inédit montrant qui a abattu l'enfant. En outre, le témoignage du père, selon lequel Muhammad a été atteint dans le dos, ne concorde pas avec l’affirmation qu'il a été tué par des soldats de Tsahal.

En tout état de cause, l'enquête de la télévision allemande, basée sur la conclusion décisive de Shahaf, a déterminé que Muhammad Al-Dura n'a pas été tué par un tir de Tsahal, à la jonction de Netzarim, mais plutôt que les Palestiniens, en collaboration avec des journalistes étrangers et l'ONU, ont organisé une représentation bien mise en scène de sa mort.

Deux diffamations meurtrières ont déclenché la guerre actuelle : la première est la visite effectuée sur le Mont du Temple par un Juif - actuel Premier ministre d’Israël ; la deuxième est [l’imputation] au peuple israélien d’une culpabilité collective pour le meurtre d'un enfant palestinien.


Les revues The Jerusalem Letter et Jerusalem Viewpoints sont éditées par le Jerusalem Center for Public Affairs, 13 Tel-Hai St., Jerusalem, Israel-

 

Lire aussi le livre de Gérard Huber "Contre expertise d'une mise en scène" aux éditions Raphaël - 2003

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