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Par
Clément Weill-Raynal, Journaliste
L'Agence France Presse, troisième agence de presse mondiale, respecte-t-elle
ses obligations "d'exactitude, d'équilibre et d'objectivité" que la
loi lui impose, ou au contraire viole-t-elle ce principe en fournissant à ses
abonnés une information
partisane? C'est la question à laquelle nous sommes efforcés d'apporter des
éléments de
réponse concrets en examinant la couverture par l’AFP du conflit
israélo-palestinien
notamment depuis le début, le 28 novembre 2000, de ce qu'il est convenu
d'appeler "la seconde intifada".
Dans l'impossibilité d'examiner de manière exhaustive la totalité des dépêches
consacrées, depuis maintenant plus d’un an, à ces événements, nous nous en
sommes tenu à une lecture attentive des dépêches diffusées sur le fil de l’AFP
lors des épisodes essentiels de l’intifada. Nous nous sommes attachés à relever
un certain nombre d'approximations, d'omissions qui - à notre sens - témoignent
de la volonté de favoriser le plus souvent le camp palestinien en faisant
retomber sur le seul camp israélien la responsabilité de la vague de violence.
La première semaine - le déclenchement des
violences
Bien que
l’intifada n’a réellement éclaté que le vendredi 29 septembre, l’Histoire a
d’ores et déjà retenu une autre date : celle du jeudi 28 septembre,
c'est-à-dire le jour de la venue d’Ariel Sharon, alors leader de l’opposition
sur ce qu’il est convenu d’appeler l’esplanade des Mosquées et que la presse israélienne
(toutes tendances confondues) désigne sous le nom juif de " Mont du Temple
".
Progressivement, une thèse a été mise en avant, puis érigée au rang de vérité
officielle et indiscutable: la cause de l’intifada serait la venue d’Ariel
Sharon sur l’esplanade des mosquées, présentée comme une " provocation
" délibérée. Les israéliens seraient ainsi responsables du déclenchement
des violences.
En France, c’est cette version des faits qui a été présentée par l’Agence
France Presse auprès de ses abonnés. Une lecture attentive des dépêches
diffusées laisse apparaître que dès les tous premiers jours des violences, les
informations données par l’AFP ont semblé vouloir occulter les responsabilités
palestiniennes et aggraver celles du camp israélien. Mettre en avant les
déclarations et les arguments de la partie palestinienne. Estomper, voire
oublier, ceux du gouvernement israélien.
Mais tout d’abord les faits.
Tout commence le jeudi 28 septembre 2000, au petit matin. Ariel Sharon, alors
leader de l’opposition, se rend à pied sur l’esplanade des mosquées-mont du
temple. Cette démarche symbolique vise à affirmer la souveraineté israélienne
sur les lieux saints et à protester contre la proposition faite par le Premier
Cette
thèse, de la responsabilité d’Ariel Sharon, mise constamment en avant par
l’AFP, est aussi la thèse officielle de la diplomatie française. Dès le 2
octobre, le ministère français des affaires étrangères publie une déclaration
du ministre Hubert Védrine, qui " condamne sans réserve la provocation
délibérée accomplie par Ariel Sharon " et qui " déplore les
violences qui en sont résultées ".
Le
même jour l’Elysée, par une déclaration du Président de la république, confirme
cette analyse. Recevant le secrétaire d’Etat américain Madeleine Albright,
Jacques Chirac déclare :
"Nous
sommes consternés et très préoccupés par cette flambée de violence. A
l'origine, jeudi dernier, une provocation irresponsable sur le Lieu saint de l'esplanade
des mosquées. Et, à partir de là, un embrasement prévisible ".
Un an et demi après le début des événements, la France a-t-elle révisé son
opinion sur les responsabilités du conflit ? Il est permis d’en douter. Malgré
les conclusions du rapport Mitchell, malgré les déclarations des dirigeants
palestiniens eux-mêmes, le quai d’Orsay maintient sa position. On en veut pour
preuve cette étonnante déclaration, le 18 janvier 2002, du porte parole du
ministère lors du traditionnel point de presse quotidien. En réponse à la
question d’un journaliste, lui demandant de désigner les responsables d’un
nouvel incident sur le terrain, le porte-parole répond :
" Dans le cadre d'une situation aussi complexe, nous ne souhaitons pas
revenir de manière notariale sur les responsabilités de chaque incident et de
chaque violation. A défaut, nous entrerions dans une discussion stérile. La
France, en son temps, a su dire, de manière très claire, quel était l'événement
à l'origine de la reprise de l'Intifada "
Le choix des mots: Qui sont les extrémistes?
Selon les
propres règles qu'elle s'est fixée, l'Agence France Presse s'interdit toute
prise de position ou "jugement de valeur". Pourtant, l'examen du
vocabulaire et des qualificatifs choisis pour désigner chaque camp peut laisser
songeur.
Où sont les "extrémistes"au Moyen-Orient? Une recherche systématique
par
"mots-clés" sur l'ensemble des dépêches laisse apparaître très
clairement le point de vue que l'AFP défend auprès de ses abonnés.
Depuis le début de l'année, les seuls "extrémistes" de la région sont
les juifs, les israéliens, le plus souvent les colons. Plus d'une centaine de
dépêches ont ainsi été répertoriés.
"A Hébron, quelques 400 colons extrémistes juifs vivent retranchés au
milieu
de 120.000 palestinien"
Cette formule est celle employée de manière automatique pour décrire la
situation qui règne à Hébron. Les 400 colons sont tous qualifiés d'extrémistes
sans nuances ni distinction d'âge ou d'opinion. Chaque fois que le vocable
"extrémiste" est employé, c'est pour désigner des juifs.
- " Attentat anti-palestinien : la police soupçonne des extrémistes
juifs " (AFP 20/07/2001 9h30)
- " Le meurtre de trois palestiniens dont un nourrisson dans une
embuscade jeudi près de Hebron pose des questions sur l’impunité des
extrémistes juifs " (AFP 20/07/2001 14h20)
"
des extrémistes juifs manifestent devant l’esplanade des mosquées "
(AFP 10/04/2001 19h33 "
"
Des centaines de jeunes juifs extrémistes crient " mort aux arabes !
" devant la mosquée Hassan Bek de Tel-Aviv, en face de la discothèque où
un attentat suicide a fait dix neuf morts dans la nuit, dont le kamikaze
porteur de la bombe " (AFP 02/06/2001 20h46) (on notera que le
terroriste est, lui, paré du titre de kamikaze sans qu’il soit besoin de le
qualifier d’ " extrémiste ")
"
La police israélienne a arrêté trois extrémistes juifs qui tentaient de
s’infiltrer sur l’esplanade des Mosquées (…). Ces extrémistes y revendiquaient
le droit d’y prier " (AFP 21/05/2001 14h 50)
En revanche, ce qualificatif terme n’est jamais appliqué aux palestiniens. Pour
désigner les membres du Hamas et du Jihad Islamique, l'AFP utilise le plus
souvent les formules suivantes:
- " Les activistes palestiniens déterminés à poursuivre la lutte
" (23/05/01 17h40)
- " Les membres du mouvement radical islamiste Hamas ont promis
de continuer la lutte " (27/07/01 23h03)
- "Un militant du groupe radical Jihad islamique a été tué par les
israéliens " (23/07/01 20h 56)
- " Un cadre du Jihad islamique tué par des soldats en Cisjordanie"
(05/05/2001 08h21)
- " Un militant du mouvement palestinien Jihad Islamique …"
(05/04/01 18h06)
- "Le chef spirituel du mouvement de la Résistance islamique (Hamas)
appelle les arabes à fournir des armes"
- "Un responsable local du Hamas visé par un raid" (17/07/01
15h52)
La diabolisation d'Ariel Sharon: L'affaire de
Sabra et Chatila
Depuis l'élection d'Ariel Sharon, la propagande arabe se déchaîne contre le
Premier ministre israélien présenté comme un criminel de guerre pour son rôle
notamment dans les massacres de Sabra et Chatila.
Cette propagande vise à présenter Ariel Sharon comme le responsable direct et
unique de la tuerie, alors qu'il n'en fut que le témoin passif, le
massacre ayant été perpétré par la milice chrétienne des Forces Libanaise
dirigées à l'époque par Elie Hobeika,.
Elie Hobeika a ensuite entamé, une honorable carrière politique au Liban. Il
fut de nombreuses années ministre dans le gouvernement de l'actuel Premier
ministre Rafic Hariri et n'a jamais fait l'objet de poursuites judiciaires ni
de la moindre campagne d'opinion.
S'il est concevable que la propagande arabe et palestinienne, pour des
raisons qui lui sont propres, cherche à taire le nom du véritable "boucher
de Sabra et Chatila" pour lui substituer celui d'Ariel Sharon, est-il
acceptable que l'Agence France Presse s'en fasse complaisamment l'écho.
Au cours de l’année 2001 l'AFP a consacré plus de 150 dépêches à
l'affaire de Sabra et Chatila. L'ensemble de ces dépêches sont consacrées à
Ariel Sharon dont le rôle est
constamment mis en avant dans les titres:
"Plainte contre Sharon: une rescapée de Sabra et Chatila raconte son
calvaire" (18/06/01 13h22)
"Sabra et Chatila: la BBC s'interroge sur la responsabilité d'Ariel
Sharon" (18/06/01 01h53)
"Une avocate Libanaise veut traduire Sharon et Peres en justice"
(11/O6/01 15h05)
"La télévision (iranienne) annonce la victoire du "boucher de Sabra
et
Chatila" (07/02/01 13h31)
"Ogre", "Terroriste", "Boucher", la presse arabe
se déchaîne contre Sharon" (07/02/01 13h13)