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La Haine Antijuive dans les Médias Arabes
Par Jean-Paul Fhima
Article paru sur Tribune Juive,
avec laimable autorisation de lauteur
oct 21, 20141
Le 14 janvier 2014, dans une vidéo
téléchargée par "lArabe nazi", un homme masqué, façon "Anonymous", avertit les Juifs que les supplices qui
les attendent seront pires que lHolocauste. Des images de cadavres décharnés
défilent sur lécran. "Le temps viendra où nous vous anéantirons tous".
La vidéo se termine par un salut nazi (source MEMRI TV).
Le 15 février 2013, sur la chaine
égyptienne Al-Mihwar TV, Hasaballah
El Kafrawy, ancien ministre du logement de Moubarak,
affirmait que les Juifs sont responsables de lattentat du 11 septembre, des
révoltes du printemps arabe, et même de lassassinat de Sadate. "Je le
jure sur Dieu, il y a une conspiration juive". Sur la chaine Sada Al-Balad TV, le même homme a
récemment confirmé ces propos : "les Juifs gouvernent le monde".
La propagande antijuive dans
la presse et la télévision des pays arabes et musulmans est quotidienne. La haine est pensée,
écrite, planifiée, organisée.
La Syrie, lEgypte, lIran, les
pays du Golfe, en sont les principaux fiefs. On y attaque le juif pour le
rejeter, on linsulte pour lhumilier, on le déshumanise pour le détruire.
Cette propagande sinspire autant des composantes propres au monde arabo-musulman
que des stéréotypes européens dextrême droite (néofascisme et littérature
antisémite) et dextrême gauche (la théorie du complot sioniste).
Les séries télévisées diffusées
aux heures de grande écoute exploitent ces thématiques. Elles propagent limage
du Juif ennemi des nations arabes et de lislam.
En novembre 2002, la télévision
dEtat égyptienne diffusait un feuilleton en 41 parties intitulé "Cavalier
sans monture", basé sur le Protocole des Sages de Sion. Dans le monde
arabe, ce faux rapport de la police tsariste (1901) relatant la volonté des
Juifs de conquérir le monde a été largement diffusé et associé à "un
complot sioniste".
En décembre 2004, la chaine
iranienne Sahar 1 TV diffusait la série hebdomadaire
"Les yeux bleus de Zahra". Un Israélien, meurtrier et sans
scrupule, prélève les yeux dune petite réfugiée palestinienne dont le frère,
Ismaël, promet de se venger en commettant un attentat-suicide.
Dans le feuilleton historique
"Le peuple de la caverne", les Juifs sont montrés en tueurs de
Chrétiens et assassins du Messie (Sahar TV).
Dans le feuilleton "Al-Shatat" (Diaspora), diffusé sur Sahar TV après lavoir été sur la chaine libanaise du
Hezbollah Al-Manar (interdite en France), on y parle dun gouvernement secret
dirigé par lhorrible famille
Rothschild. Des scènes insupportables montrent
un crime rituel perpétré par un Juif sur une non-juive.
Beaucoup de ces chaines de
télévision sont visibles en France sous forme de bouquets-satellite : Al Jazeera par exemple, la chaîne qatari
pro-islamiste est la chaine ethnique par excellence (Lahouri
Besma, lExpress, 10 avril 2003), loin devant la
saoudienne Al Arabiya (sondage Ipsos-Sigma, publié en
mai 2013). Ces médias sont les principaux
canaux de diffusion de lantisémitisme dans les familles arabo-françaises. Nos banlieues sont islamisées par ces médias
propagandistes.
Dans la presse écrite, les débats
restent occasionnels, les introspections critiques isolées, les condamnations
sans appel rares. La plupart des écrivains ont soutenu la diffusion de ces
feuilletons. Rien détonnant compte tenu de labondante littérature antisémite.
Dès 1925, le Protocole des Sages de Sion parait en langue arabe pour la
première fois. Depuis, il demeure une référence rarement remise en question. Certaines
personnalités comme le syrien Sadeq Jalal al-Azm (philosophe), les égyptiens Oussama El-Baz (conseiller politique) et Abdel Wahhab
Al-Massiri (historien), ont reconnu quil sagit dun
faux. Le livre nen resterait pas moins une vision prémonitoire de la volonté
des Juifs "de piller toutes les richesses de la planète" comme la
écrit lintellectuel libanais Ghassan Tueni dans le journal à grand tirage Al Nahar.
Cette propagande antisémite na
pas pour seule origine lopposition moderne à Israël. Il existe une tradition
antijuive bien plus ancienne.
Le Judaïsme na jamais eu de
légitimité en terre dIslam. Juifs et
Arabes ont beaucoup cohabité mais dans une société hiérarchisée et
discriminante. Les lois du calife Omar (1ère moitié du 8ème
siècle) ont fait du juif un citoyen de seconde zone, un être inférieur qui
échangeait sa liberté de culte et de protégé (dhimmi)
contre le paiement dimpôts (de capitation, Jizyah et
foncier kharâj). Le Juif devait être reconnaissable,
physiquement distinct, proscrit des affaires de lEtat. Lintolérance a
augmenté proportionnellement à lislamisation. Il ny a pas eu de persécutions,
mais lâge dor de légalité des droits
est un mythe (Bernard Lewis).
La référence injurieuse qui
associe les juifs aux singes et aux porcs est présente dans de nombreux versets
du Coran (2:65, 5:60, 7:166). Cest un châtiment contre ceux qui refusent
dembrasser la vraie foi. Un hadith (prophétie) affirme que, dans un ultime combat,
les Musulmans battront les Juifs "dénoncés par les arbres et les
pierres", et "nous leur
couperont la tête". Les fêtes juives (Pourim) seraient des crimes
rituels où les gâteaux sont faits de sang humain. Les Juifs sont des assassins
car ils ont tué le prophète Jésus, "en enfonçant des clous et des pieux
en fer dans son corps". Ces accusations sont très courantes dans les
journaux et les médias arabes aujourdhui : "la matza
juive est faite du sang arabe" (journal égyptien Al-Ahram, 28 octobre 2000). Les Juifs sont perçus comme des
bêtes, des êtres malfaisants et des criminels, quil faut soumettre ou châtier.
Dautre part, le projet politique
de Nasser dunification de tous les Arabes du Proche-Orient, a utilisé les Juifs,
"poignard dans lentité arabe", comme un ferment dadhésion.
Cette notion darabité antijuive a été reprise par tous les mouvements de
libération (OLP, Jihad islamique, Hamas, Hezbollah). "Expulser
létranger et le Juif" est le symbole même de létranger
inassimilable, demeure un intérêt commun indéniable. Lunité arabe na jamais
été possible sauf dans la haine des Juifs, sorte de sentiment dappartenance
ethnique (Hazem Saghiyah,
quotidien Al-Hayat).
Les pays arabes étaient proches de
l Allemagne nazie. Le cas du grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini
pactisant avec Hitler est un exemple fameux. Il y avait des Musulmans dans les Waffen SS. On sait quil y en avait aussi dans les rangs du
Parti Populaire Français (PPF) de Doriot. Après 1945, les leaders nationalistes
arabes ont fait bon accueil aux officiers nazis en fuite.
Johann Von Leers, un proche de
Goebbels, a été chef de la propagande égyptienne et conseiller personnel de
Naguib puis de Nasser. Converti à lislam, il sest appelé Omar Amin. Il est
aussi un rare théoricien nazi de lantisémitisme musulman. Dès 1942, il défend
la thèse dun Islam antijuif. Aloïs Brunner, criminel nazi, réfugié en Syrie
dès
La Shoah est dabord peu
contestée. Elle justifierait toutefois lexistence dIsraël pour effacer la
culpabilité de lextermination chez les Européens. Puis un rapprochement
nazisme-sionisme sert de parallèle avec la cause palestinienne. « Les sionistes
sont des nazis ». Cette absurdité sans nom est lobjet de la thèse de doctorat
de Mahmoud Abbas (1982, Institut des études orientales de Moscou). Puis
ladoption des thèses négationnistes importées de France par Garaudy, Faurisson, Pierre Guillaume et consorts, a transformé la
Shoah en pure invention faite par les Juifs eux-mêmes. Cet élément est devenu
de nos jours la force de frappe principale de lantisémitisme arabo-musulman,
aussi bien dans les médias que dans lidéologie dEtat des pays du Golfe et surtout
de lIran, leader mondial du négationnisme.
En janvier 2005, dans le Tehran Times, le journaliste Hossein Amiri,
écrivait sur "les mensonges de lindustrie de lholocauste".
Les discours du président Ahmadinedjad (22 septembre
2012 à lONU) ont contesté la légitimité historique du génocide. En janvier
2013, le second festival iranien de la caricature (source Iran Daily Brief) tournait en ridicule lHolocauste.
Enfin, la campagne assidue de
diabolisation des Juifs est le meilleur relais de la théorie du complot
diffusée par lultra gauche internationale.
Selon elle, les attentats du 11
septembre auraient été causés par les agents du Mossad pour faire accuser les
Arabes. Les tenants de cette thèse sont des représentants de la presse dite
non-alignée, cest-à-dire dissidente et révolutionnaire. Le Français Thierry Meyssan, fondateur du réseau Voltaire (porte-voix de la complosphère anti-impérialiste), ami de Kadhafi, Bachar Al-Assad, Hassan Nasrallah (Hezbollah), est lauteur de leffroyable
imposture (deux tomes, 2002, 2007). Il est régulièrement linvité des chaines Addonia TV et SSC (Syrie), News TV et AL-Manar (Liban), Al
Alan (Iran), Dubaï TV (Emirats). Noam Chomsky,
linguiste et philosophe, pacifiste américain et chef de file de lantisionisme
outre-Atlantique, est un anarcho-syndicaliste qui se dit « anti-pensée
dominante ». Il a dénoncé la dictature médiatique et politique contre Oussama
Ben Laden (Power and Terror, 2003). Le chef
dAl-Qaïda la remercié en personne (sic).
Cette influence de lextrême
gauche antisystème a donné un crédit mondial à la diabolisation du Juif issu
des médias arabo-musulmans. Par ricochet idéologique, ce discrédit alimente à
son tour lantisémitisme de la Dieudosphère
européenne.
A la Channel 1 TV iranienne, le 11 novembre 2004, le professeur Heshmatollah Qanbari disait que
les juifs "sataniques (
) ont toujours été subversifs dans lhistoire
de lhumanité". Peu de représentants de lélite arabe se risquent à
contester ce point de vue. Abd Al-Hamid Al-Ansari, de
lUniversité du Qatar, a critiqué dans le quotidien Al-Raya (20 septembre 2004)
cette théorie enracinée dans la tradition musulmane.
Le Juif, en effet, est couramment
perçu dans les mythes et légendes arabes comme un corrupteur (Jean-Yves
Camus, politologue). Déjà au XIVème siècle, Ibn Khaldun
faisait un portrait peu flatteur : "les Juifs sont connus pour leur
bassesse et leur fourberie". Le processus de dénigrement a fonctionné
depuis sans relâche. Pour les intellectuels, fonctionnaires, journalistes,
chefs dEtat et chefs religieux : "Le Juif répand le mal".
Cest lui, par exemple, qui aurait
inventé le sida pour décimer la population arabe. Cest lui qui diffuserait les
maladies sexuellement transmissibles pour enrayer la fécondité. Cest lui qui
corromprait la jeunesse et murmurerait aux oreilles des femmes des idées
égalitaires. Cest encore à cause de lui si les masses arabes sont confinées
dans le sous-développement et les échecs politiques. Il faut donc déjouer tous
les pièges tendus par les Juifs. La démocratie réclamée par une partie de
lopinion publique nest rien dautre que lémanation de cette décadence.
Le 26 janvier dernier, les
manifestants de "la haine pour tous" voulaient se rendre rue des
Rosiers pourcasser du juif. On a entendu "Les
Juifs dehors (
) Faurisson a raison". Ce
nouvel antisémitisme nest pas seulement la résurgence des slogans des années
trente. On y trouve une violence réactivée qui nous vient de terre dislam où
la propagande médiatique envahit les esprits faibles et incultes, touche aussi
bien la bourgeoisie blanche des beaux quartiers, que la caillera marron des
zones sensibles. Ce melting pot de frustrations et
dintolérances facho-catho-gaucho provoque, dans lindifférence générale, les
bonnes consciences qui se taisent, ou qui (et cest pire !) trouvent quon en
fait trop.
La loi est ouvertement bafouée. Légalité est un vain mot. La laïcité, un
piètre idéal. La République est déjà vaincue.
Chassée dEurope après la guerre,
la nouvelle détestation des Juifs nous revient en pleine figure avec une
arrogance effrayante. Cest le miroir déformant de ce que nous avons produit de
pire.