www.nuitdorient.com
accueil -- nous écrire -- liens -- s'inscrire -- site
Le sentiment anti-Israël de
l’Europe
Par Gol Kalev
JPost 2/7/16
Voir aussi les 50 derniers articles
& tous les articles sur l'antisémitisme
Deux observateurs
offrent des indications prospectives récentes sur les possibilités de changement
d’attitude de l’Europe vis-à-vis du Moyen Orient et leurs raisons.
Alors que l’Europe
poursuit l’escalade de son intervention dans les affaires israélo-palestiniennes,
certains se posent la question de ses motivations, assurant que « toute
politique est locale »
Laure Ferrari,
française d’ascendance corse, s’est toujours considérée comme appartenant au
camp anti-israélien : « j’ai
toujours perçu Israël comme un état colonialiste, régionaliste, un
occupant ! »
Elevée en Alsace et
ayant vécu à Londres, Bruxelles et Strasbourg, Ferrari décrit comment son point
de vue anti-israélien est né : « Quand
dans la conversation la question d’Israël est soulevée, on vous juge instantanément.
Si vous manifestez des sentiments en faveur d’Israël, vous êtes le mauvais
gars. A l’inverse, vous êtes du bon côté si vous dénigrez ce pays. En fin de
compte, être pour ou contre Israël est devenu un
cliché purement social ».
Mais l’an dernier,
Ferrari a fait un voyage de 2 jours pour participer à une conférence à
Jérusalem, et ce simple séjour lui a ouvert les yeux : « j’ai découvert que ma vision des choses
était vraiment étroite et l’expérience vécue m’a fait changer d’opinion à 180° ».
Ferrari dirige l’Institut européen de Démocratie Directe. Elle avoue avoir été
endoctrinée par l’environnement social et fort gênée de l’admettre. De retour
en Europe, elle a été amenée à revoir ses conceptions, après avoir compris
comment fonctionnait le pays d’Israël. « Je voulais comprendre les raisons de ce parti pris anti-israélien, et
surtout, comment se fait-il qu’on désigne du doigt ce seul pays et pas un
autre ? Après réflexion je suis arrivée à la conclusion que l’attitude européenne est simplement irrationnelle »
Ceux qui observent
cette escalade de l’hostilité européenne donnent diverses raisons. Après les
accords d’Oslo de 1993, la Communauté européenne a beaucoup investi dans la
nouvelle Autorité palestinienne. Et la violence qui a suivi ces accords a amené
l’Europe à accroître ses donations aux Ong qui surveillaient les actions
anti-terroristes d’Israël. -- Et ces Ong rapportaient des infos tronquées –
D’autres ont observé
qu’à cette époque l’Europe avait commencé à porter un grand intérêt à la
question des Droits de l’Homme, -- et est venue à considérer les Palestiniens
comme des victimes.
D’autres enfin
étaient frustrés de ne pas trouver de solution à un conflit qui dure depuis
déjà un siècle, -- avec une tendance à rendre responsable Israël de l’impasse.
Mais il faut prendre
aussi en considération des facteurs internes à l’Europe et Ferrari est
persuadée que la politique de l’Europe au Moyen Orient résulte d’une dynamique
intérieure au continent.
« L’attitude européenne vis-à-vis
d’Israël a changé du fait de la forte augmentation de la population musulmane
sur le continent. Tant que les communautés musulmanes étaient peu nombreuses
dans les années 60/70, l’Europe était pro-israélienne » - Selon Ferrari, c’est la culture du politiquement correct qui a
aussi entraîné l’inversion des sentiments à l’égard d’Israël, dès que la
population musulmane est devenue importante. L’antisémitisme des communautés
musulmanes s’est aisément transmis à l’ensemble de la population, par le biais
du politiquement correct. « Leur
voix est devenue la nôtre. Et comme on leur permet de dire certaines choses qui
nous sont interdites, ces propos antisémites se
transmettent et redeviennent la norme »
L’ambassadeur Ouri
Bar Ner qui a servi dans de nombreux pays voit les choses sous un autre
angle : « L’Europe veut
paraître sympa aux Musulmans, car ce sont de futurs électeurs. Alors tout
politicien qui se respecte se doit de montrer des sentiments anti-Israël ».
Devenu conseiller en politique étrangère, Bar Ner voit l’attitude européenne
comme une conséquence de la Guerre froide : « L’Europe pense qu’en faisant pression sur Israël, elle consolide ses
intérêts dans le monde arabe. Mais cette politique est aujourd’hui surannée.
Les pays arabes ne veulent plus voir Israël affaibli, car ce pays les protège
en quelque sorte de l’Iran et de l’Etat islamique »-
Bar Ner est inquiet
de la montée de l’islamophobie en Europe, qui est liée à son attitude
anti-Israël : « Les Européens
ne veulent plus de Musulmans chez eux et ils cherchent à camoufler cette phobie
dans l’habit politiquement correct de l’anti-israélisme »- Quand il
était ambassadeur en Turquie, et que ce pays cherchait à faire partie de
l’Europe, il a entendu le directeur du ministère des Affaires Etrangères allemand
dire « L’Europe
est un club chrétien ! »
- Pour Bar Ner, qui suit de près l’évolution de l’Europe, l’attitude européenne
vis-à-vis d’Israël est un mélange de sentiments « rationalisés ».
« L’Europe a été longtemps habituée à voir les
Juifs comme des gens faibles dépendant du bon vouloir des autres. Et à ses
débuts, l’état d’Israël était fragile et précaire, très acceptable pour l’Europe,
voire même très sympathique. Mais la sympathie a été remplacée par la jalousie
et l’envie, dès qu’Israël est devenu puissant dans de nombreux domaines,
scientifiques, technologiques et militaires » - Et cela a commencé
dans les années 90.
Herzl, le fondateur
du sionisme avait déjà dit à son époque au 19ème siècle que
l’aversion de l’Européen envers le Juif venait de sa compétitivité, après son
émancipation. L’Européen ne pouvait tolérer l’intelligence et la richesse du
Juif – Et l’histoire se répète au 21ème siècle avec l’état des
Juifs, Israël. Pour Bar Ner, la solution finale d’Hitler n’a pu se réaliser en
Europe que parce le terrain y était globalement favorable.
La question qui se
pose aujourd’hui est de savoir si cette dynamique d’intervention européenne au
Moyen Orient accompagnée de pressions diverses sur Israël, va-t-elle se
poursuivre ou s’inverser ? Selon Ferrari, de plus en plus de gens pensent
comme elle, que l’attitude européenne est irrationnelle et qu’elle est allée
trop loin. « Les gens commencent à dire
maintenant que même s’ils ne sont pas d’accord avec certaines actions
israéliennes, ce pays sert leurs intérêts et il a un rôle stratégique important
à jouer dans le monde »
Selon elle,
l’attitude européenne se partage maintenant entre les gens de droite, les
Chrétiens, les opposants au mariage gay, les sceptiques du changement
climatique, les pro-Israël, et l’inverse.
Bar Ner quant à lui
ne pense pas que l’Europe changera : « Les Européens ont toujours haï les Juifs, et continuent à le faire
aujourd’hui. Ce n’est pas conscient, mais malheureusement cette haine vient
s’inscrire dans toutes les décisions politiques de la Communauté européenne impliquant
d’Israël »
© www.nuitdorient.com par le groupe boaz,copyright autorisé sous réserve de mention du site