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Par Limor Livnat ministre israélienne de
l'éducation nationale
Traduit
de l'hébreu par Emmanuel Navon, professeur de science politique aux Universités
de Bar Ilan et de Tel Aviv, consultant en relations politiques
Paru
dans le journal Le Monde du 20/12/01
Sous
prétexte de "dire quelques vérités élémentaires" et sous
couvert de leur respectabilité universitaire, Elias Sanbar et Pierre
Vidal-Naquet se sont livrés dans les pages de ce prestigieux journal (Le
Monde daté 16-17 décembre) à une attaque très politique du
gouvernement dont j'ai l'honneur d'être membre. Voici, messieurs, quelques "vérités
élémentaires" que vous avez oubliées.
La
conquête de la terre d'Israël par les Hébreux, qui s'étendit sur deux siècles
(entre 1200 et 1000 av. J.-C.), aboutit à l'établissement du
Royaume d'Israël en 1005 av. J.-C.
La
destruction du Premier Temple par les Babyloniens en 586 av. J.-C. et celle du
Second Temple par les Romains en l'an 70 de l'ère chrétienne ne mirent pas
fin à la présence juive en terre d'Israël. En l'an 164, les juifs
constituèrent une force armée pour lutter aux côtés des Perses et libérer
Jérusalem du joug byzantin.
Ce
n'est qu'après l'invasion arabe (636) que les juifs devinrent pour la première
fois une minorité dans leur propre pays. Les Espagnols connurent un sort
similaire en 711, et ce n'est qu'à l'issue de nombreux siècles de lutte que les
deux peuples libérèrent leur pays : huit siècles dans le cas des
Espagnols, douze dans le cas des Juifs.
Au
cours de ces douze siècles, la présence juive en terre d'Israël ne s'effaça
jamais, et la reconquête du pays devint l'aspiration suprême du peuple
dispersé. Le "retour
à Sion" fut
et continue d'être le refrain qui scande la prière triquotidienne, les fêtes et
les mariages juifs.
Au Moyen Age, la présence juive commença à se renforcer sous l'égide des grandes figures du peuple juif. Au XVIIe siècle, la population juive se renforça à la suite de l'immigration provoquée par le faux messie Shabbtai Zvi et, dès 1868, les juifs constituaient la majorité de la population de Jérusalem.
Ce n'est qu'avec l'affaiblissement puis l'effondrement de l'Empire ottoman que la reconquête de la terre d'Israël devint possible. Les promesses non tenues des Lumières, dissoutes dans le nationalisme et l'antisémitisme européens, convainquirent de nombreux juifs de la nécessité du retour à Sion - une nécessité tragiquement confirmée par la Shoah.
L'immigration
juive en terre d'Israël, qui s'intensifia dès 1881, contribua à un essor
économique sans précédent. Cet essor attira une immigration arabe massive en provenance des
autres provinces de l'Empire ottoman. La terre d'Israël (baptisée
"Palestina" par l'Empire romain et rebaptisée "Palestine"
par ses descendants anglo-saxons) était quasiment vide et désolée avant les grands mouvements
migratoires de la fin du XIXe siècle, comme en témoignèrent tous les
archéologues et écrivains qui la visitèrent à l'époque. Thomas Shaw, Constantin
Volney, Alexander Keith, J.S. Buckingham, Alphonse de Lamartine, Mark
Twain et Arthur Stanley s'accordent tous sur le fait que la
"Palestine" était un désert parsemé de rares bourgades.
La
restauration de l'Etat d'Israël est l'expression du droit du peuple juif à
disposer de lui-même. Pour les Juifs, elle constitue l'aboutissement d'une
lutte nationale. Nombre d'Occidentaux, en revanche, ignorent ou nient cette
continuité et transforment le retour en invasion, la libération en
colonialisme. Ils suivent la ligne de pensée de Toynbee qui, ayant décrété que
le peuple juif était un "fossile", voyait dans la renaissance
d'Israël une anomalie. L'incohérence de cette perception est pourtant
évidente : si les juifs sont étrangers aussi bien dans leurs "pays
d'accueil" que dans "la terre de leurs ancêtres", où sont-ils chez eux ? Et si leur mouvement de
libération nationale est un colonialisme, où est leur métropole ? A
Auschwitz ? Après tout, le peuple juif est le seul peuple du Moyen-Orient
qui parle une langue et pratique une religion vieilles de plus de 3 000 ans.
Comme
le stipule la Charte de l'OLP, les Arabes palestiniens font partie intégrante
de la nation arabe, laquelle nation dispose de vingt-deux Etats. Avec la
division de la Palestine mandataire en 1922, les Arabes palestiniens se virent
octroyer un Etat sur 80 % du territoire qui fut promis aux juifs en 1920
par la Société des nations. Le roi Hussein le répéta plus d'une fois : "La
Jordanie est la Palestine" . Décimés par la Shoah, les Juifs durent se
résigner à une deuxième amputation de leur pays en 1947 : bien que le plan
de partage de l'ONU ne leur attribuât que 10 % de la Palestine mandataire,
ils acceptèrent le compromis onusien. Les Arabes le rejetèrent et firent tout
pour détruire le minuscule Etat juif. Sûres de leur victoire, les armées arabes
sommèrent leurs frères palestiniens de quitter leurs maisons en attendant le
retour imminent.
Après
la victoire d'Israël, l'Egypte s'empara de Gaza et la Jordanie de la vallée
occidentale du Jourdain (rebaptisée "Cis-Jordanie"). Cet état de fait
dura jusqu'en 1967, mais pas un pays arabe ne parla de "territoires
occupés" ou de reconnaissance d'Israël. C'est en 1964, trois ans avant
la guerre de six jours, que Nasser créa l'OLP, non pas pour "libérer"
la CisJordanie (alors sous occupation jordanienne), mais pour raser l'Etat juif
et le remplacer par une Palestine arabe sous égide égyptienne. La Syrie vit
toujours dans l'OLP un cheval de Troie égyptien, et c'est Assad qui déclara à
Arafat : "Il
n'y a pas de peuple palestinien, et la Palestine fait partie de la Syrie".
De fait, Arafat, né au Caire, est Egyptien.
La
cause principale de la tragédie palestinienne fut le refus du monde
arabo-musulman d'accepter que les juifs fussent souverains en Dar el-Islam.
Israël ne pouvait négocier le statut final de la Judée-Samarie avec une
organisation vouée à sa destruction. En 1974, l'OLP approuva le "plan
par étapes" : accepter dans un premier temps l'établissement d'un
deuxième Etat palestinien en Cis-Jordanie et à Gaza pour faciliter la
destruction d'Israël. Comment pouvait-on demander à Israël de s'associer à la
mise en œuvre de ce programme ?
En
1988, Arafat déclara dans les médias occidentaux qu'il reconnaissait Israël,
mais il assura immédiatement aux médias arabes que cette "reconnaissance"
n'était qu'une manœuvre tactique. En 1993, il signa les accords d'Oslo puis
expliqua peu après, dans une mosquée de Johannesburg, que, pour lui, Oslo
n'était que la répétition du pacte signé entre le prophète Mohammed et la tribu
qurayshite en 629 : une trêve signée en position de faiblesse pour mieux
vaincre l'ennemi, le temps venu (houdna).
La
politique d'Arafat (dont l'Autorité palestinienne devint souveraine en 1995 sur
la totalité de la population arabe de Judée-Samarie) confirma, dès le premier
jour, ses véritables intentions : constitution d'une force armée,
incitation à la haine antijuive et délégitimation d'Israël dans les médias et
dans les écoles, coopération avec le Hamas et le Jihad islamique, et refus
d'abroger la Charte de l'OLP (appelant à la destruction d'Israël). Le tout en
violation grossière des accords d'Oslo.
Les
accords d'Oslo ne comportaient aucune clause exigeant le "gel des
implantations" et avaient explicitement repoussé ce sujet aux
négociations sur le statut final. Par ailleurs, lesdites
"implantations" n'occupent que 1,36 % du territoire de la
Judée-Samarie. Et c'est précisément après qu'Ehoud Barak se fut engagé à les
démanteler qu'Arafat déclara la guerre, déclenchée après que Barak eut accepté
l'établissement d'un Etat palestinien sur 97 % de la Judée-Samarie et 100 %
de la bande de Gaza.
En
huit ans de règne, Arafat a "réussi" à établir une dictature
corrompue, à faire diminuer le niveau de vie des Palestiniens et à attiser la
haine entre Juifs et Arabes. Il est personnellement derrière le meurtre quasi
quotidien de juifs et continue de tenir son double discours : celui de la
paix aux médias occidentaux, celui de la guerre à son peuple.
Le
gouvernement d'union nationale d'Ariel Sharon est soutenu par une écrasante
majorité d'Israéliens dont la volonté d'arriver à la paix a été bafouée par
Arafat. Ce gouvernement ne fait qu'appliquer le droit à l'autodéfense en
éliminant les bombes humaines avant qu'elles n'explosent dans nos autobus et
nos rues piétonnes. Il est prêt à un compromis, mais pas au suicide
démographique que veut lui imposer l'OLP. L'espoir ne reviendra que lorsque les Arabes
palestiniens remplaceront le terroriste impénitent qui les mène à leur perte
par des dirigeants plus raisonnables et moins lâches.