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L'Europe Peut Avoir son Opinion, mais sans 
    Travestir les Faits
    
    
Par Dr Emmanuel Navon, dirige le Département de science politique et de Communication au collège universitaire orthodoxe de Jérusalem et enseigne également les relations internationales à l'Université de Tel-Aviv et au Centre interdisciplinaire de Herzliya. Il est chercheur au Forum Kohelet de politique publique.
Arouts 7- 17 Juillet 2013
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    la rubrique des territoires  
  
La Commission européenne annoncera officiellement vendredi 
    que les institutions israéliennes opérant au-delà des lignes d'armistice de 
    1949 ne seront plus autorisées à demander des « subventions, des prix et des 
    outils financiers » à l'Union européenne (UE). La conséquence de cette décision 
    est que l'Université d’Ariel ainsi que les entreprises israéliennes qui opèrent 
    au-delà de ces lignes d'armistice de 1949 seront interdits de participer au 
    prochain programme de recherche et développement (R & D) européen, appelé 
    Horizon 2020, qui sera lancé en 2014.
    
    En 1996, Israël est devenu le premier pays non européen à être associé à ce 
    programme dans le cadre de la recherche et du développement technique de l'UE 
    (également connu sous le nom "FP"). Près de 1.500 sociétés israéliennes 
    et universités ont reçu un financement du 7e FP (entre 2007 et 2013), ce qui 
    fait de l’UE la plus importante source de financement de la recherche publique 
    israélienne. Ainsi, le financement de la R & D de l'Université Ariel et 
    des entreprises israéliennes qui opèrent au-delà des lignes d'armistice de 
    1949 sera sans aucun doute affecté par la récente décision de la Commission 
    européenne.
    
    Théoriquement, l'Université hébraïque de Jérusalem, elle-même, pourrait être 
    affectée. Cette université a deux campus: l'un dans la partie ouest de Jérusalem 
    (à Givat Ram) et un dans la partie orientale de 
    Jérusalem (sur le Mont Scopus). Techniquement, Israël 
    a obtenu l'accès au mont Scopus avec l'armistice 
    de 1949. Le Mont Scopus (où se trouve également 
    l'hôpital Hadassah) est devenu une enclave israélienne 
    contrôlée par les Jordaniens. Dans la pratique, la Jordanie a refusé l'accès 
    d'Israël à cette enclave. Est-ce que l'UE considère que le mont Scopus 
    est, ou non, conforme aux lignes d'armistice de 1949? La nouvelle décision 
    européenne va-t-elle discriminer les chercheurs de l'Université Hébraïque, 
    permettant à ceux qui travaillent sur le campus de Givat 
    Ram de demander des subventions de l'UE, mais refusant de financer ceux qui 
    travaillent depuis le Mont Scopus? Et que dire des dortoirs d'étudiants sur le Mont Scopus? Certains sont 
    construits à l'intérieur de l'enclave de 1949, d'autres non. Les doctorants 
    qui font une demande de subvention de l'UE doivent-ils préciser où ils logent? 
    On se demande si la Commission européenne est consciente de la complexité 
    de ces subtilités juridiques. Outre ces aspects techniques, la décision de 
    la Commission soulève deux questions juridiques fondamentales.
    
    La première question juridique concerne la légalité même de cette décision. 
    Les relations commerciales et scientifiques entre Israël et l'Union européenne 
    sont régies par l'accord d'association datant de 1995, entré en vigueur en 
    
    
    La deuxième question juridique se base sur  la position déclarée de la 
    Commission sur la présence israélienne au-delà des lignes d'armistice de 1949, 
    qui est « une occupation illégale ». La ligne de démarcation qui séparait 
    Israël de la Jordanie entre 1949 et 1967 n'a jamais été une frontière internationalement 
    reconnue. C'était une ligne d'armistice temporaire, définie comme tel par 
    l'accord de 1949. En droit international, un territoire est considéré comme 
    occupé lorsqu'il est conquis par un pays souverain. Tel n’était pas le statut 
    de la Cisjordanie en Juin 1967. Il n'y avait, dans la région, aucun pays souverain 
    quand la Grande-Bretagne a renoncé à son mandat en 1948. Concernant la conquête 
    et l'annexion de la Cisjordanie par le Royaume hachémite en 1949, elle n'a 
    jamais été reconnue par la communauté internationale (à l'exception de la 
    Grande-Bretagne et du Pakistan). La résolution 242 du Conseil de sécurité 
    de l'ONU, quant à elle, ne considère clairement pas la ligne de 1949 comme 
    une frontière permanente future, et elle n'exige pas non plus d’Israël de 
    se retirer de cette ligne. Alors pourquoi l'UE qualifie-t-elle d’illégale, 
    une situation qui n'est pas considérée comme telle par le droit international? 
    Enfin, la décision de la Commission européenne de discriminer les institutions 
    opérant à partir de territoires contestés peut potentiellement se retourner 
    contre l'UE elle-même. Car il y a, au sein de l'UE, les territoires qui sont 
    contestés et des populations dont l'indépendance complète est refusée. Chypre, 
    membre de l'UE, a été partiellement occupée par la Turquie depuis 
    
    Puis, il y a les territoires français d'outre-mer dont l'indépendance complète 
    est toujours refusée. Depuis 1986, le Comité des Nations Unies sur la décolonisation 
    a introduit  la Nouvelle-Calédonie sur la liste des territoires non autonomes. 
    Le mois dernier, le Comité a renouvelé le statut de la Polynésie française 
    comme un «territoire non autonome» et a demandé à la France de mettre la Polynésie 
    sur le chemin de la pleine indépendance. Est ce que la Commission européenne 
    devrait  exclure de l'application aux subventions de l'UE et du financement, 
    les possessions de la France dans le Pacifique?
    
    De toute évidence, la décision de la Commission européenne est, d’un point 
    de vue juridique, fragile et elle applique des normes différentes entre Israël 
    et l'UE elle-même. Comme dit le proverbe : "les gens ont droit à leurs 
    propres opinions, mais pas à leurs propres faits". L'UE semble se 
    sentir à l'abri de ce principe.