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BERNARD LEWIS S'EXPRIME
SUR ISRAËL, ETAT JUIF, TOUJOURS REFUSE PAR LES PAYS ARABES
Par Bernard Lewis, professeur emeritus à l'Université de Princeton, auteur de très nombreux ouvrages sur l'Islam, son dernier livre est "From Babel to Dragomans: Interpreting the Middle East" (Oxford University Press, 2004).
Paru dans
le Washington Post du 26/11/07
Traduit par
Albert Soued, www.chez.com/soued ,
pour www.nuitdorient.com dernier livre paru Quand
le Moyen-Orient verra-t-il la lumière ?
Voici quelques
idées à propos de la Conférence d'Annapolis et du problème plus large du conflit
Israël-Palestine et comment l'appréhender.
La 1ère
question devrait être celle-ci "de quoi s'agit-il dans ce conflit ?" Est-ce qu'il s'agit des dimensions
physiques de l'état d'Israël ou bien s'agit-il de son existence même ?
S'il s'agit
de dimensions, nous sommes face à un problème de frontières, comme il y en eut
en Alsace-Lorraine ou au Texas. Ce n'est peut-être pas facile à résoudre, mais
c'est soluble à longue échéance et, en attendant, on peut vivre avec. Si d'un
autre côté le sujet est l'existence d'Israël, aucune négociation ne résoudra ce
problème. Il n'y a pas de compromis possible entre exister ou ne pas exister,
c'est l'un ou l'autre, et aucun gouvernement israélien n'entamera de telles
discussions.
L'OLP et
d'autres porte-parole Palestiniens ont de temps à autre donné des signes qu'ils
reconnaissaient l'état d'Israël, dans leur discours en langue étrangère. Mais
jamais dans aucun message en arabe, que ce soit dans les livres scolaires, dans
les discours politiques ou dans les sermons religieux. Et là, les expressions
en usage en arabe dénotent, non la fin des hostilités, mais un armistice, ou au
mieux une trêve, en attendant de meilleures auspices, pour gagner la guerre
contre Israël.
Sans une acceptation
sincère et authentique du droit à l'existence d'un état Juif, comme il existe
22 états arabes dans la Ligue Arabe et 53 états musulmans dans l'Organisation
de la Conférence Islamique, aucune paix ne peut être négociée.
Un bon
exemple illustrant ce problème concerne la question des réfugiés dont on parle
tant. Lors des combats de 1947/48, environ ¾ million d'Arabes se sont enfuis ou
ont été amenés à fuir d'Israël pour trouver refuge dans les états Arabes
voisins. Au même moment et après, un plus grand nombre de Juifs fuirent ou ont
été plutôt chassés d'états Arabes, d'abord de la Palestine du mandat
britannique contrôlée par des Arabes, et là aucun Juif n'était autorisé à y rester, et puis d'autres pays arabes où
leurs ancêtres ont vécu pendant des siècles, souvent bien avant l'arrivée des
Arabes. La plupart de ces réfugiés ont trouvé un havre en Israël.
Ce qui
s'est passé en réalité, c'est un échange de populations, comme il y en eut en
Asie, quand l'Inde britannique se partagea en Inde et Pakistan. Des millions de
réfugiés
ont dû fuir
dans les deux sens, les Hindous du Pakistan vers l'Inde et les Musulmans d'Inde
vers le Pakistan. On a d'autres exemples en Europe de l'Est, après la 2ème
guerre mondiale, quand les Soviétiques eurent annexé une large portion de la
Pologne orientale et compensé la Pologne d'une mince parcelle de l'Allemagne de
l'est. Là aussi nous avons assisté à un immense échange de populations, des
réfugiés Polonais quittant leur terre devenue soviétique, vers la Pologne, et
des Allemands quittant leur ex-patrie pour se réfugier en Allemagne. Les
Polonais et les Allemands, les Hindous et les Musulmans d'Inde, les Juifs
réfugiés des pays arabes ont tous été réinstallés dans leur nouvelle patrie,
avec une nouvelle citoyenneté, et surtout, sans une aide internationale.
La
seule exception de l'histoire concerne les Arabes Palestiniens restés réfugiés
dans les états arabes voisins.
Le gouvernement de Jordanie accorda aux arabes Palestiniens une espèce de citoyenneté, tout en les maintenant dans des camps de réfugiés. Dans les autres pays arabes, ils sont restés apatrides, sans aucun droit, ni aucune possibilité de s'intégrer au pays, entretenus par des fonds de l'Onu. En contraste, tout Palestinien ayant réussi à entrer en Grande Bretagne ou aux Etats-Unis devenait citoyen du pays au bout de cinq ans et ses enfants, nés dans ces pays, étaient citoyens du pays où ils étaient nés.
Si ce Palestinien avait fui en Syrie, au Liban ou en Irak, lui et ses descendants restaient apatrides, et aujourd'hui nous sommes déjà à la 4ème ou à la 5ème génération de réfugiés.
La raison de cette anomalie a été donnée par divers porte-parole arabes. Il fallait absolument garder les Palestiniens comme une entité séparée jusqu'au jour du retour dans leurs foyers, afin de réclamer la totalité de la Palestine, Israël, la Cisjordanie et Gaza. La demande continue du "retour des réfugiés" signifie clairement la destruction d'Israël, et cela aucun gouvernement Israélien ne peut l'accepter.
Il y aurait des signes de changement dans certains cercles arabes, une volonté d'accepter Israël et de voir même sa contribution à la vie publique dans la région. Mais ces opinions restent discrètes, car ceux qui les expriment publiquement sont jetés en prison ou pire. En tout cas, ces opinions n'ont aucune influence sur les dirigeants arabes.
Et ceci nous ramène à Annapolis. Si le problème n'est pas les dimensions physiques de l'état d'Israël, mais son existence, les négociations sont vouées à l'échec. Et à la lumière du passé, cette question restera en suspens, jusqu'au jour où les dirigeants arabes atteindront leur but ou qu'ils y renonceront --- je veux dire la destruction d'Israël.
Et les 2 issues semblent peu probables aujourd'hui.
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