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LE PROBLÈME DE L’EGYPTE,
C’EST MOUBARAK
Par Abdel Halim Qandil, journaliste d'opposition, directeur du journal nassérien "Al Arabi" – article paru le 7 septembre 2003 dans ce journal (1).
Traduit et présenté partiellement par Memri "the middle east media research
institute"
Dépêche Spéciale n° 571 - Egypte
Le plus long mandat de
l’histoire de l’Egypte moderne
« Peut-être n’est-ce pas la bonne démarche à suivre que de demander au président Moubarak d’opérer des changements [dans son gouvernement], vu que l’on n’a pas affaire à l’échec du [Premier ministre égyptien] Atef Ubeid, de celui du gouvernement précédent ou du futur gouvernement. Le changement nécessaire doit commencer par le président Moubarak en personne. Le changement débute au sommet.
Je ne suis pas ici en proie à l’une de mes humeurs dont je serai tenu pour seul responsable. Je ne cherche pas [non plus] une grande bataille que je ne pourrais pas assumer. Il s’agit là, à mon avis, d’axiomes constitutionnels (…) La constitution accorde au président des pouvoirs quasi-divins : ce dernier préside sur tout en Egypte. Il est responsable du ministre comme du gardien. Il est l’unique responsable, avant qui que ce soit d’autre, des décisions prises sur la scène politique, économique et culturelle. Les ministres et le Premier ministre représentent une poignée d’employés du bureau présidentiel. [Le président] est responsable des succès, si succès il y a, comme des échecs.
La faille principale ne se trouve pas dans ce gouvernement kleptocratique ; il est le fruit amer des choix d’un régime qui a vieilli dans son fauteuil, le fruit amer d’une longue stagnation qui a atteint la vie en Egypte.
Pendant ce temps, le président Moubarak continue de jouir du plus long mandat de l’histoire de l’Egypte moderne, hormis celui de Mohammed Ali. Le président Moubarak a débuté son ère avec de beaux mots sur la moralité et les ‘linceuls qui n’ont pas de poches’, (2) mais l’histoire se termine par le vol de ces linceuls mêmes, sans qu’aucune enquête criminelle ne s’interroge sur qui a pris quoi et qui a fourni les clés. Cette enquête n’est pas de notre ressort. Le résultat est malheureusement choquant. »
On compare l’Egypte au Burkina
Faso.
« Il suffit de donner un seul exemple : au début des années 1990, les [différents] gouvernements Moubarak évaluaient la valeur du secteur public destiné à la vente [à la privatisation] à 500 milliards de livres égyptiennes. Ensuite, la valeur de ce qui a été vendu et de ce qui ne l’a pas été est tombée à 28 milliards de livres. Différence de temps : 10 ans. Différence de prix : 472 milliards de livres égyptiennes.
Ne me demandez pas où est passée cette énorme somme d’argent. C’est là une histoire longue, complexe et compliquée qui peut à juste titre être appelée ‘Le labyrinthe d’un pays’, où la kleptomanie est incontestablement le fait de personnes et – plus important – d’une politique kleptomane. Je m’arrête ici, pour ne pas avoir à être encore plus clair.
Ces jours-ci en Egypte, le soleil ne se lève le matin que sur un Etat pillé, comme jamais il ne le fut dans l’histoire. Le vol public n’est qu’un aspect des choses. L’oppression générale est si évidente qu’il est inutile de la désigner. La constitution est en congé depuis longtemps, et c’est la loi d’urgence qui est en fait appliquée (…)
Le rôle de l’Egypte [sur la scène internationale] a diminué au point de quasiment disparaître (…) On compare aujourd’hui l’Egypte au Burkina Faso, et non à la Corée du Sud, que nous dépassions dans les années 60. Voilà le portrait fidèle, non retouchée, et sans artifices [de l’Egypte]. Sans illusion d’optique. Voilà la catastrophe épouvantable qui a éveillé la colère et la fureur de la Grande Egypte, et l’a transformée en petite exploitation agricole, en domaine qu’il serait tentant de léguer, en buffet permis aux voleurs (…) »
La seule solution consiste à
transférer le pouvoir, dans sa globalité, aux mains du peuple
« Je suppose que le président est insatisfait de la situation où l’Egypte est tombée. Il comprend que la solution ne consiste pas à remplacer le Premier ministre ou à dissoudre l’Assemblée du peuple. La seule solution consiste à transférer le pouvoir, dans sa globalité, aux mains du public. Si le président agissait dans ce sens, il réaliserait sa plus grande œuvre. »
(1) Al-Arabi (Egypte), le 7 septembre 2003. Extraits et titres ajoutés par MEMRI
(2) C’est-à-dire ‘non corrompus’