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Editorial du Jerusalem post – 25/12/05
Traduit par Stéphane Teicher
Nous autres occidentaux, attendons désespérément de voir les systèmes politiques du Moyen Orient évoluer de modèles théocratiques ou oligarchiques autoritaires vers des formes de gouvernement représentatifs. Ce souhait a connu un nouveau coup dur samedi dernier quand l’ancien candidat aux présidentielles Egyptiennes Ayman Nour, 41 ans, a été condamné à cinq ans de prison pour tricherie (et les observateurs étrangers insistent sur le fait qu’il s’agit de fausses accusations).
Dans toute la région - Syrie, Iran, Irak, Egypte et l’Autorité Palestinienne – le modèle occidental d’une démocratie représentative a échoué parce que des réformateurs à l’esprit ouvert, inspirés par l’Occident, ont été mis à l’écart, intimidés par des leaders autocratiques, laissant les Islamistes démagogues en empocher les bénéfices.
Peut être est ce trop demander que de voir les concepts occidentaux de partis politiques, élections et parlements prendre racine dans un milieu social tellement étranger. Mais le mouvement est irréversible. A notre époque moderne, le tribalisme n’est pas la solution. Le nationalisme Arabe (et Perse) a été testé et il a échoué. Maintenant la région flirte avec le fondamentalisme qui, même s'il fonctionne comme principe d’organisation sociale, représente une menace planétaire pour le monde extérieur.
C’est dans ce contexte que le Président Américain George
Bush, dans son message sur l’état de l’union de Février dernier, a mis Hosni
Moubarak au défi d’ouvrir le système politique égyptien: "La grande et fière nation d’Egypte, qui a montré la
voie de la paix au Moyen Orient, peut maintenant montrer la voie de la
démocratie au Moyen Orient."
Cet espoir de transition n’est pas seulement l’incantation des néo conservateurs ou de l’Administration Bush. Tout le monde comprend bien que des régimes politiques représentatifs ont tendance à être stables, moins belliqueux, et centristes.
Sous la pression des Etats Unis – l’Egypte reçoit 1.8 milliard $ d’aide annuelle – Moubarak a effectivement permis au parlement du pays d’adopter un amendement à la constitution qui introduisait une élection présidentielle multi partis en Septembre. Moubarak, 77 ans, qui est arrivé au pouvoir avec l’assassinat du président Anwar Sadate en 1981, a été réélu. Et Ayman Nour, qui est maintenant en prison, a obtenu 8 % des voix, ce qui en fait un bien distant second.
Une série de votes du parlement qui a suivi, s’étalant sur trois tours et cinq semaines, a été marquée par les escroqueries. Les supporters de l’organisation précédemment interdite des Frères Musulmans (le précurseur politique du Hamas et d’autres groupes islamistes) ont été autorisés à se présenter en candidats indépendants. Beaucoup de leurs adeptes ont été battus par des gangsters en costume et par la police anti émeutes; au moins 11 personnes ont été tuées lors des élections. Et pourtant la Confrérie a remporté quelques 90 mandats dans le Parlement de 454 sièges (et près de 40% des voix). La Confrérie aurait pu faire mieux, mais a eu peur de présenter plus de 150 élus contre le parti dirigeant de Mubarak. Près de 75% des votants éligibles ont évité le scrutin, par défiance envers toute l’opération. Des observateurs internationaux ont été interdits d’accès.
Alors, jusqu’où – après une élection présidentielle et une élection parlementaire- l’Egypte s'est elle avancée aujourd’hui sur le chemin de la « démocratie » ? Pas très loin.
L’opposition laïque a été balayée aux élections. Incapables de mener une campagne active à cause des divers obstacles légaux et politiques, les 15 partis non Islamistes et anti Moubarak ont grignoté moins d’une douzaine de sièges. Nour lui même a perdu le siège parlementaire qu’il détenait depuis 10 ans au profit de la machine politique bien huilée de Moubarak.
Avec la montée des Frères Musulmans, et des medias contrôlés par l’Etat qui rendent pratiquement impossible l’expression des voix réformatrices alternatives, il y a fort à parier que le prochain leader de l’Egypte sera le fils de Moubarak, Gamal.
Comme avec le Shah d’Iran dans les années 1970, l’ultimatum explicite de Moubarak est "mon autocratie ou l’Islamisme" – rien d’intermédiaire.
Plus près de chez nous, les élections parlementaires Palestiniennes du 25 Janvier sont aussi dans la tourmente, parce qu’un establishment marqué par l’échec redoute la montée du Hamas.
Comme en Egypte, les amis de la liberté sont obligés de choisir entre l’alliance naissante de la vieille garde en faillite politique de Mahmoud Abbas, associée aux violents "réformistes", menés par Marwan Barghouti, ou se retrouver, en selle avec les Islamistes du Hamas.
Mais pour que la vraie démocratie progresse, elle doit être nourrie. Tant que l’Occident n’exigera pas des politiques réformatrices dans toute la région – y compris une presse vraiment libre, un gouvernement qui rend des comptes et un style de relations politiques qui contribue au développement de la démocratie – nous continuerons à nous demander pourquoi cette région doit toujours choisir entre autocratie et Islamisme.