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Parmi les incertitudes qui règnent aux frontières
israélo-jordaniennes, une chose est sûre, si et quand le roi tombera,
le prochain dirigeant sera palestinien
Par Moudar Zahrane, palestino-jordanien résidant au Royaume Uni
Jerusalem
Post du 25/07/13
Traduit et adapté par Albert Soued, http://soued.chez.com/ pour www.nuitdorient.com
Israël a joui de frontières calmes avec la Jordanie pendant 4 décennies. Alors que cette quiétude est due principalement à la supériorité militaire d'Israël et à l'attention de ses gardes frontières, le régime hashémite à Amman a néanmoins réussi à éloigner toute force anti-israélienne hostile. En retour, Israël a donné de nombreux avantages au roi Abdallah et à son père. Ces arrangements vont-ils se perpétuer suite au "Printemps arabe" ? Les faits sur le terrain suggèrent que la Jordanie est loin d'être stable. Au retour du roi d'une visite aux Etats-Unis, des luttes tribales ont éclaté à Maa'n, le plus grand gouvernorat de la région sud. Quatre personnes ont été tuées de sang froid sur le campus de l'université et ce fut le début de l'enfer. Aujourd'hui les habitants de Maa'n demandent leur indépendance par rapport au royaume hashémite. Des vidéos circulent sur YouTube ainsi que dans les medias montrant les batailles rangées entre l'armée et les tribus méridionales. Le 24 juin, les émeutiers auraient "libéré" le dernier poste de police.
Malgré les appels publics osant demander au roi de venir résoudre
les problèmes à Maa'n, Abdallah a visité un autre lieu de troubles, Kerak à
Mais les ennuis du roi ne s'arrêtent pas là. Le 22 juin Mohamed Assaf, un Palestinien de Gaza a été élu "idole" d'une télé-réalité. La majorité palestinienne du pays (2) est descendue dans la rue, en masse, brandissant des drapeaux palestiniens, à la barbe de la police jordanienne.
Or, auparavant, le simple port d'une "keffieh" palestinienne entraînait une admonestation par la police et arborer un drapeau palestinien menait en prison. Là la célébration de l'idole a encouragé les jeunes palestiniens à tirer en l'air au M16. Tout le monde sait que les Palestiniens en Jordanie sont armés comme leurs frères de l'autre côté du Jourdain, mais ils n'en faisaient pas usage et ne montraient pas qu'ils cherchaient à se débarrasser du joug hashémite. Bref, les loyaux citoyens de "Transjordanie" veulent aujourd'hui se débarrasser du roi et du régime hashémite et ils n'ont plus peur de le montrer ouvertement. Ainsi les jours du roi sont comptés.
Il y a un an déjà le stratège israélien Mordekhay Kedar, disait à une foule à Londres: "Ceux qui ont une police d'assurance basée sur la survie du régime hashémite devraient revoir leur contrat…!", prédisant même la sécession du sud de la Jordanie.
Sa prophétie semble se concrétiser. Mais qu'est-ce que cela signifie pour la plus longue frontière d'Israël ? Si jamais le pays tombe entre les mains d'islamistes, cela signifierait-il une frontière de plus avec un autre Hamas ou au mieux avec un Sinaï ? Cette éventualité est peu probable, car le roi a de bons rapports avec les Frères Musulmans et ceux-ci ne participent pas aux émeutes et ne demandent pas son départ.
De plus, les medias The Independent, the Associated Press and Al Jazeera ont tous rapporté que les protestations venaient essentiellement de citoyens laïques, bien qu'ils ne soient pas autant soutenus financièrement que les islamistes, et ils ne sont pas couverts par les medias occidentaux.
Si le roi tombe, les islamistes qui s'opposent à la révolution aujourd'hui, pourraient s'en emparer et installer un des leurs à la tête du pays. A moins d'un changement et que les "laïques" reçoivent le soutien dont ils ont besoin. Ceux qui sont intéressés aujourd'hui par la paix au Moyen Orient, ne semblent pas mesurer l'ampleur de la menace d'une prise de pouvoir par les islamistes; et ils continuent à prétendre que "la Jordanie est calme et que le roi est stable". En fait, ils ignorent les faits essentiels.
Dans une interview en 2010 par Jeffrey Goldberg de l'Atlantic, le roi Abdallah a admis l'idée d'une abdication, mais c'était avant le "Printemps arabe". Que ferait-il aujourd'hui si les Jordaniens descendaient dans la rue comme les Tunisiens et les Egyptiens ?
ll y a beaucoup de gens qui disent qu'on ne peut rien faire pour sauver le roi et qu'il vaudrait mieux le remplacer par un dirigeant palestinien laïque, favorable à la paix. Intrigué par cette éventualité, j'ai posé la question à Samer Libdeh, un écrivain vivant à Amman et ancien membre du Washington Institute. Il m'a répondu: "La Jordanie est comme "une pâte molle", pas comme l'Egypte où les islamistes avaient de l'influence avant que Moubarak ne tombe. On peut mener la Jordanie où on veut. Si le prochain dirigeant est laïque, la Jordanie sera laïque, s'il est islamiste, elle sera islamiste, ou un autre Afghanistan, et son avenir dépendra de l'investisseur qui voudra s'y intéresser, de la focalisation des medias ou des forces armées qui interviennent…"
Devant cette incertitude sur la frontière orientale d'Israël, une chose semble certaine, c'est si et quand le roi tombera, le prochain dirigeant sera palestinien. Ceux qui s'intéressent à la paix et à la frontière orientale d'Israël devraient se préparer à la tempête annoncée et prendre le train conduit par un bon technicien qui évitera le déraillement, car les jours sont comptés.
Notes de la traduction
(1) Contrairement à son père, le roi Abdallah n'a pas le soutien de toutes les tribus, ce qui l'affaiblit vis-à-vis de la majorité palestinienne. Il est mal vu par de nombreux chefs de tribus de "la shoura", du fait de son mode de vie ostentatoire et de sa dépendance aux jeux de hasard. Le fait que son épouse soit palestinienne aimant le luxe n'a pas arrangé les choses.
(2) La majorité palestinienne est estimée entre 60/70%
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