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IRAK : LE
CHOIX
"J’en appelle à mes
collègues du Congrès pour prendre du recul et réfléchir attentivement à ce qui
doit être entrepris maintenant"
Par Joseph Lieberman,
Sénateur indépendant du Connecticut
Paru le 26
février 2007 dans www.OpinionJournal.com
émanation du Wall Street Journal
Article traduit
par Fred Rothenberg pour www.nuitdorient.com
Depuis deux mois
que le 110ème Congrès siège, Washington n’a jamais été plus divisé
sur notre mission en Irak. Le Sénat et la Chambre des Représentants se
préparent pour une guerre de tranchées parlementaire – piégés en une division
et une confrontation croissante qui ne résoudront pas les dures échéances
auxquelles nous faisons face en Irak, ni ne renforceront notre nation par
rapport à ses ennemis terroristes dans le monde.
Ce qui est
remarquable à propos de cet état de choses à Washington, c’est combien il est
éloigné de ce qui se passe réellement en Irak. Là-bas la bataille pour Bagdad
est en cours. Un nouveau commandant, le Général David Petraeus, a pris le
commandement, ayant été confirmé par le Sénat par 81 voix contre 0, il y a
seulement quelques semaines. Et une nouvelle stratégie est mise en œuvre avec
des milliers de nouveaux soldats américains, affluant vers la capitale
irakienne.
Le Congrès se
trouvera donc devant un choix, dans les semaines et les mois à venir.
Accepterons-nous que nos actions soient influencées par les conditions en voie
de changement sur le terrain en Irak- ou
par les politiques ou les idéologies forgées il y a longtemps à
Washington ? Qu’est-ce qui nous importe le plus : le vrai combat
là-bas ou le combat politique ici ?
Si nous
arrêtions les manœuvres parlementaires et que nous regardions vers Bagdad, nous
verrions ce que la nouvelle stratégie sécuritaire signifie et combien elle
diffère considérablement des efforts du passé. Pour la première fois dans la
capitale irakienne, l'objectif des militaires U.S. n’est pas seulement de
former des forces locales ou de poursuivre des insurgés, mais d’assurer aussi
la sécurité de base, autrement dit de mettre un terme aux massacres sectaires
sur une large échelle et au nettoyage ethnique qui a paralysé l’Irak au cours
de l’année qui vient de s’écouler.
Limiter cette
violence est plus qu’un impératif moral. La stratégie annoncée par Al Qaeda en
Irak a été de provoquer une guerre civile sunnite-shiite reconnaissant que
c’était la meilleure chance de radicaliser la politique du pays, de faire
capoter tout espoir de démocratie au Moyen-Orient et de conduire les Etats-Unis
au désespoir et à la retraite. Elle prenait aussi avantage de ce qui a été la
plus grande faiblesse américaine en Irak : l’absence d’un nombre suffisant
de soldats pour protéger les citoyens irakiens de la violence et du terrorisme.
La nouvelle
stratégie commence enfin à faire face à ces problèmes. Là où par le passé il
n’y avait pas assez de soldats pour tenir les quartiers nettoyés des
extrémistes ou des miliciens, maintenant plus de forces US ou irakiennes sont
soit sur place, soit en route. Là où par le passé les forces américaines
étaient basées dans les faubourgs de Bagdad, incapables d’assurer la sécurité
de la ville, maintenant elles vivent et travaillent côte-à-côte avec leurs
collègues irakiens dans des petites bases installées partout dans la capitale.
Au moins quatre
de ces nouvelles bases conjointes ont déjà été établies dans des quartiers
sunnites de l’ouest de Bagdad – les mêmes quartiers où il y a seulement
quelques semaines les jihadistes et les escadrons de la mort sévissaient. Dans
les quartiers shiites à l’est de Bagdad, les troupes américaines s’installent
et Moqtada al-Sadr et son armée du Mahdi s’en vont.
Naturellement
nous ne saurons pas avant quelque temps si cette nouvelle stratégie en Irak va
réussir. Même dans les scénarios les plus optimistes, on considère qu'il y aura
plus d’attaques et de victimes dans les mois à venir, en particulier si nos
ennemis fanatiques essayent de brouiller tout sentiment de progrès.
Mais le fait est
que nous sommes aujourd'hui dans une situation différente de celle dans
laquelle nous nous trouvions il y a seulement un mois, avec une nouvelle
stratégie, un nouveau commandant et plus de troupes sur le terrain.
Nous sommes
maintenant dans une situation plus favorable pour assurer une sécurité
élémentaire;
- et avec cela,
nous sommes en situation plus favorable pour marginaliser les extrémistes et
renforcer les modérés;
- dans une
situation plus favorable pour développer l’économie, ce qui amoindrira le
support populaire aux insurgés et aux milices ;
- et dans une
situation plus favorable pour encourager le gouvernement irakien à prendre les
dures mesures que tout le monde considère nécessaires pour aller de l'avant..
Malheureusement,
pour beaucoup de membres du Congrès opposés à la guerre, rien de ceci ne semble
compter. Alors que la bataille de Bagdad commence à peine, ils ont déjà pris
leurs décisions en ce qui concerne la cause américaine en Irak et déclaré leurs
intentions de mettre fin à la mission avant même que nous ayons eu le temps de
voir si notre nouveau plan fonctionne.
Il y a bien sûr
une manière directe par laquelle le Congrès pourrait terminer la guerre, en
application de ses pouvoirs constitutionnels: c’est de couper les fonds.
Toutefois cette option n’est pas proposée. Les critiques de la guerre
envisagent au contraire de réduire et de contraindre la stratégie actuelle et
les soldats qui l’appliquent par des milliers de conditions et de coupes.
Parmi les idées
évoquées, on parle d’interférer avec les renforts demandés en réclamant des
normes de "préparation", et de réviser l’accord du Congrès à la
guerre, de sorte que celui-ci puisse assumer lui-même le rôle de commandant en
chef et dicte quand, où et contre qui les troupes US pourront se battre.
Je comprends la
frustration, la colère et l’épuisement de nombreux Américains vis-à-vis de cette
guerre, leur désir de jeter le gant et de dire simplement "Assez". Et
je suis douloureusement conscient de l’énorme prix payé en vies humaines, et
des erreurs impardonnables qui ont été faites dans la conduite de la guerre.
Mais nous ne
devons pas faire une deuxième erreur terrible maintenant. Beaucoup parmi les
pires erreurs en Irak, l'ont été lorsque l’administration Bush a sous-évalué ce
qui allait se passer après le renversement de Saddam. Maintenant de nombreux
opposants à la guerre font la même erreur en imaginant que nous puissions nous
retirer impunément au milieu d’une bataille, plaidant même que notre retraite
réduirait le terrorisme et la violence sectaire dans le pays.
En fait, arrêter
les opérations de sécurité à mi-chemin, comme pratiquement toutes les
propositions du Congrès envisagent de le faire, pourrait avoir des conséquences
désastreuses.
Cela mettrait
des milliers de soldats américains déjà déployés au cœur de Bagdad dans une
situation encore plus dangereuse – forcés qu’ils seraient de choisir entre
essayer de tenir leurs positions sans les renforts attendus ou plus
probablement de les abandonner sur le champ. Un retrait précipité créerait un
vide sécuritaire que les terroristes, les insurgés, les milices et l’Iran se
précipiteraient pour remplir- au prix probable d’une spirale de nettoyage
ethnique et de massacres à un niveau encore jamais vu en Irak.
J’en appelle à
mes collègues du Congrès de prendre du recul et de réfléchir attentivement à ce
qui doit être entrepris maintenant. Au lieu de saper l’action du Général
Petraeus moins d’un mois après qu’il ait été envoyé en Irak, donnons lui et
donnons à ses hommes le temps et le soutien dont ils ont besoin pour réussir.
Le Général
Petraeus annonce qu’il sera capable d’évaluer les progrès à la fin de l’été,
établissons une trêve dans la guerre politique à Washington jusqu’alors.
Etablissons ensemble un plan constructif pour notre sécurité : autorisons
une augmentation du nombre de soldats et de marins, couvrons les besoins
d’équipement et de protection de nos troupes, surveillons les progrès en Irak
par des auditions, des procédures contractuelles de contrôle, et garantissons
aux vétérans de la guerre d’Irak le traitement éminent et la reconnaissance
auxquels ils ont droit à leur retour au pays.
Nous
sommes à un moment critique en Irak- à l’aube d’une bataille décisive, au
milieu d’une guerre irrémédiablement liée à un combat encore plus important
contre l’idéologie totalitaire de l’islamisme radical. Quelle que soit notre
fatigue, quelle que soit notre frustration, quelle que soit notre colère, nous
devons penser et nous souvenir que nos forces en Irak portent la cause de
l’Amérique- la cause de la liberté- que nous abandonnerons à nos risques et
péril.