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LE GENERAL PETRAEUS A PRIS LE PERIPHERIQUE

Tout succès militaire doit être suivi d'un progrès sur le plan politique, aussi bien à Bagdad qu'à Washington

 

Editorial de l'Opinion Journal, émanation du Wall Street Journal du 12/09/07

Traduit par Albert Soued, écrivain, nouveau livre QUAND LE MOYEN-ORIENT VERRA-T-IL LA LUMIERE ?

 

Ainsi les 2 hommes les plus capables de donner le compte rendu le plus honnête et le plus complet sur l'Irak sont venus devant le Congrès américain pour lui dire que la contre-insurrection marche bien et que les objectifs américains sont en voie d'accomplissement.

Mais ces témoignages n'ont fait la manchette d'aucun journal ni média et ceci donne le ton du débat politique aux Etats-Unis. Les seules "nouvelles" rapportées sont que le général David Petraeus aurait recommandé que 5000 soldats soient remplacés à la fin de l'année et que les forces armées pourraient retrouver leur niveau d'avant la contre-insurrection en juillet 2008, si les progrès continuaient. Ce n'est pas une mince affaire, mais cela obscurcit le message important apporté par le témoignage du général et de l'ambassadeur Ryan Crocker, c'est que les Etats-Unis étaient en train de gagner en Irak, et souvent pas de la manière attendue.

Prenez en considération certains extraits de l'allocution de Mr Crocker. Le gouvernement d'Irak a vendu aux enchères son réseau de télécommunications par portable, et il a obtenu beaucoup plus qu'il n'espérait, soit 4 milliards $! A une récente conférence à Doubai, des centaines d'hommes d'affaires d'Irak ont rencontré autant d'homologues étrangers désireux d'investir dans des sociétés irakiennes. Le pétrole est aujourd'hui exporté à travers des pipelines turcs et le Fonds Monétaire International prévoit une croissance de l'économie de 6% cette année.

Près d'Abou Ghraib, 1700 hommes, la plupart des ex-insurgés sunnites, ont rejoint les forces de sécurité irakiennes, en majorité shiites.

En toute quiétude, le gouvernement irakien offre des emplois ou des programmes de retraite aux soldats de l'ancienne armée de Saddam Hussein, dont certains étaient membres du parti Baath. Et ceci sans prendre la moindre mesure politique, par exemple déclarer une amnistie générale ou légiférer sur une "dé-Baathification".

Comme le remarque Mr Crocker, ces avancées ne peuvent pas être mesurées, et elles ne sont pas visibles loin de Bagdad. Les sénateurs Démocrates des Comités des Relations étrangères et des Services armés, ainsi que des Républicains comme John Warner et Dick Lugar n'ont pas bien compris la situation en Irak. Pour eux tous, l'Irak est une cause perdue, du fait que le 1er ministre Nouri al Maliki n'a pas réussi la "réconciliation nationale" et que nombre d'objectifs prévus sur le papier n'ont pas été atteints. Cette vision des choses est propre au Congrès qui mesure la situation en nombre de lois votées. Or sur le terrain, on ne trouve aucun Irakien opposé à la "réconciliation nationale", mais celle-ci ne peut pas précéder la sécurité et l'amélioration de la qualité de vie. Elle les suit.

Dans son témoignage, le général Petraeus note que les pertes civiles ont diminué de 45% en Irak et de 70% à Bagdad. Les attentats-suicide et à la voiture piégée ont diminué de 50% depuis mars. Et là aussi, les bonnes nouvelles viennent d'endroits non prévus. Les tribus sunnites de la province d'Anbar et d'ailleurs ont réalisé que leur intérêt n'était pas avec al Qaeda, mais avec le gouvernement démocratique d'Irak, avec lequel elles peuvent négocier. Des esprits critiques prétendent que ces succès n'ont rien à voir avec la contre-insurrection; pourtant il est évident que les chefs tribaux n'auraient pas pris le risque de se battre contre al Qaeda, s'ils n'avaient pas été rassurés par la volonté de gagner du gouvernement irakien appuyé par les Etats-Unis.

Et les avancées dans la province d'Anbar auraient été plus difficiles si Mr Maliki avait refusé d'armer les chefs tribaux sunnites, étant donné le risque de les voir se retourner contre les forces shiites. Mr Maliki aurait montré un courage politique en laissant les forces américaines venir à bout des milices de Moqtada al-Sadr, leader shiite qui, il y a seulement un an, avait aidé le 1er ministre à prendre son poste. Moqtada Al Sadr vient de décréter un cessez-le-feu unilatéral de 6 mois, après que certaines de ses troupes eurent attaqué des shiites en prière à Kerbala. Tout autant qu'al Qaeda en Irak, al Sadr est allé trop loin dans les massacres et s'est mis à dos la population. Et la contre-insurrection permettra au général Petraeus de venir à bout des troupes Mahdistes (affiliées à l'Iran). Ce qui renforcera la Force de Sécurité Irakienne pour maintenir l'ordre après un retrait américain.

Mais un facteur reste manquant, la non-interférence des voisins de l'Irak dans ses affaires.

Alors qu'un Démocrate, candidat à la présidence, Dennis Kucinich, allait courtiser Damas, il était utile d'entendre le général Petraeus décrire le rôle "diabolique" de la Syrie en Irak et fournir des détails sur l'assassinat par l'Iran de soldats américains et de chefs politiques Irakiens. Nos propres sources nous indiquent que les Gardiens de la Révolution d'Iran sont responsables de 70% des pertes américaines. Mais cela mériterait un autre éditorial. Maintenant que la contre-insurrection suit son cours, il faudrait que le président Bush soit plus strict à l'égard de Téhéran, lui disant que tuer des Américains ne peut pas rester impuni. Mais pour le moment, on ne voit rien venir (1).

En ce qui concerne la politique américaine, la leçon qu'on peut tirer, c'est qu'il ne faut pas promettre au Congrès Américain le retrait des troupes américaines d'Irak. Comme on l'a vu au Vietnam, cette volonté de se retirer de partout est devenue une habitude au Congrès. Les Américains veulent moins de troupes en Irak et la plupart d'entre eux veulent un départ dans l'honneur et le succès. Le seul moyen de freiner les appels à un retrait trop rapide, c'est de gagner la partie militaire et la partie politique sur le terrain.

Les avancées de la contre-insurrection à ce jour ont donné du temps et un soutien à G W Bush dans sa politique en Irak et au Moyen Orient. Le général Petraeus et les troupes américaines y sont pour quelque chose dans cette percée qu'il lui appartient d'exploiter, notamment vis-à-vis de la Syrie et de l'Iran. (2)

 

Note de la traduction

(1) On attend incessamment que les "Gardiens de la Révolution" d'Iran soient déclarés "groupe terroriste" par le gouvernement américain. Cela serait le prélude à une frappe américaine des installations nucléaires Iraniennes au printemps 2008. Il faut rappeler ici que ces "Gardiens" détiennent le pouvoir économique dans le pays et, s'ils sont déclarés "terroristes", ils seront boycottés par l'Occident sur le plan économique et financier.

(2) La mort survenue récemment du Sheikh Risha, responsable des tribus, par attentat à la bombe, pourrait influencer les futurs événements. La famille de ce sheikh est déjà fort décimée par al Qaeda et son frère vient d'être désigné par les tribus sunnites comme leur représentant. Comme les Américains n'ont pas su protéger son frère Sattar dit Abou Risha, acceptera-t-il leurs desiderata?

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