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Une
ex-Captive de l'EI estime qu'Israël est un Symbole d'Espoir pour les Yézidis
27/07/2017
Par Emily Gatt
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Nadia Murad Basee
Taha called for justice for
the victims of the Islamic
State group and argued that
the 2014 attack on the Yazidis
should be recognized as a genocide
Mark Wilson (Getty/AFP/File)
Nadia Murad a exhorté les députés israéliens à reconnaître officiellement le génocide des Yézidis
Il
y a moins de cinq ans, Nadia Murad Basee Taha était une adolescente normale vivant dans le village
de Kocho, dans la région de Sinjar
en Irak. Mais sa vie a changé pour toujours quand, en août 2014, elle fut
capturée par le groupe terroriste Etat islamique et vendue comme esclave
sexuelle, au côté de milliers d'autres femmes et filles yézidies.
Après
être parvenue à s'échapper des griffes du groupe djihadiste, Nadia est devenue
la voix des souffrances du peuple yézidi, en
témoignant en 2015 devant le Conseil de sécurité des Nations Unies sur les
atrocités commises par l'EI.
Mardi,
Nadia a terminé une visite de cinq jours en Israël co-organisée
par l'organisation humanitaire IsraAID, l'association
pour le combat du génocide, et le bureau israélien de la Société pour le
développement international (SID). Cette visite fait partie d'une tournée
mondiale de deux ans au cours de laquelle Nadia milite auprès de différentes
gouvernements pour que les crimes perpétrés par l'EI contre les Yézidis soient formellement reconnus comme un génocide.
Lors
de son dernier jour en Israël, et devant le public enthousiaste de la salle de
conférences au Musée du peuple juif, qui se trouve sur le campus de
l'Université de Tel Aviv, Nadia a établi de solides parallèles entre les
souffrances du peuple yézidi et celles des Juifs
pendant la Shoah
"[L'histoire
du peuple juif] est une histoire unique, et pourtant, une partie d'elle fait
écho aux expériences de ma propre communauté. Comme les Juifs, les Yézidis ont une histoire millénaire. Malgré les récentes
persécutions, nos deux peuples ont survécu", a affirmé Nadia.
"Depuis
trois ans, l'EI a volé la paternité de l'histoire des Yézidis.
Mais nous ne les laisserons pas écrire notre avenir. Mon voyage en Israël m'a
montré qu'après l'oppression et le génocide, une communauté peut émerger plus
fort ", a-t-elle déclaré.
Iraqi Yazidis
light candles and paraffin
torches outside Lalish
temple, the holiest shrine
of their faith, during a ceremony on April 18,
2017 to mark the eve of Yazidi
New Year
Nadia et le génocide yézidi
Les
Yézidis sont une vieille ethnie issue de la minorité
kurde dont les croyances religieuses intègrent des éléments du christianisme et
de l'islam. En 2014, on comptait environ un million de Yézidis
vivant dans le monde, dont 700.000
concentrés dans la région des monts Sinjar au
nord-ouest de l'Irak, près de la frontière syrienne.
Lors
de la conquête par l'Etat islamique de régions entières en Syrie et en Irak,
les djihadistes ont lancé le 4 août 2014 une offensive sur Sinjar
avec l'objectif manifeste d'éliminer les Yézidis,
considérés comme des "kfirs ou
"non-croyants", et qu'ils ont fini par tuer, asservir ou encore
convertir.
"Je
me souviens avoir entendu les rumeurs concernant ces terroristes qui
détestaient mon peuple et nous considéraient comme des adorateurs du
diable", s'est rappelée Nadia.
"Ce
jour-là [4 août 2014], et ceux qui ont suivi, l'EI a tué des hommes et des
femmes âgés, y compris six de mes neuf frères, ainsi que ma mère (...) Ils ont
piégé des milliers de personnes qui ont fui sur le mont Sinjar
sans eau, ni nourriture. L'EI avait planifié à l'avance d'asservir les femmes
et les enfants yézidis dans le cadre de leur
stratégie visant à détruire notre communauté. Et donc, des milliers d'entre
nous ont été enlevés et transportés vers des entrepôts et des prisons",
a-t-elle raconté. "Mais je me suis échappée".
Nadia
s'est ensuite installée en Allemagne dans le cadre d'un projet gouvernemental
spécial pour les femmes et les enfants vulnérables. Elle a témoigné des crimes
des djihadistes devant le Conseil de sécurité de l'ONU en décembre 2015, puis
représentée par l'avocat spécialiste des droits de l'homme, Amal Clooney, elle a commencé à plaider pour que les combattants
de l'EI soient traduits en justice pour les crimes contre sa communauté.
En
2016, elle a été nommée ambassadrice de bonne volonté de l'UNDOC pour la
dignité des survivants de la traite des êtres humains, puis pressentie pour le
prix Nobel de la paix. La même année, une commission indépendante a
officiellement déclaré que les crimes de l'EI contre les Yézidis
constituaient un génocide.
"Lorsque
l'EI a pris le pouvoir, les femmes ont été les premières à souffrir. Les filles
de moins de neuf ans ont été vendues sur des marchés d'esclaves et brutalement
violé", a ajouté Nadia.
"Il
y a aujourd'hui beaucoup de filles dans les camps de réfugiés, qui ont survécu
au génocide et qui sont prêtes à témoigner et raconter ce qui leur est
arrivé", a-t-il souligné.
Mais
jusqu'à maintenant, trop peu a été fait pour traduire les auteurs de ces crimes
devant la justice. "Pendant deux ans, j'ai parlé à des politiciens, à des
chefs religieux et à des commissions, les appelant à la reconnaissance et à la
justice. Mais la communauté internationale n'a toujours pas agi pour protéger
les Yézidis, ou pour traduire les auteurs devant la
justice", a-t-elle regretté.
Près de 3.000 Yézidis sont encore
prisonniers de l'EI tandis que des milliers d'autres vivent dans des camps de
réfugiés de fortune sur les côtés grecques, où des organisations comme IsraAID
pourvoient à leurs besoins fondamentaux et leur apporte un soutien
psychologique.
Kurd Yazidis
hold a banner reading 'Stop
Killing Yezidis #Shingal' during a demonstration in
Oldenburg, northern Germany, in October
2014
L'exemple israélien
C'est
aussi grâce au travail d'IsraAID avec les réfugiés yézidis dans le camp en cours d'évacuation de Petra, en
Grèce, que le co-directeur de l'organisation, Yotam Polizer, s'est rendu compte qu’Israël pouvait jouer un rôle
important dans la cause yézidie.
"Contrairement
aux réfugiés syriens qui ont vu notre logo avec l'étoile de David et étaient
peut-être confus, les Yézidis nous ont accueillis
avec d'énormes sourires. Ils ont dit que pour eux que c'était un lien
naturel", a déclaré Polizer. Dans les camps,
ajoute-t-il, il est devenu clair que les Yézidis ne
voulaient pas notre soutien financier, mais nos conseils".
En
Israël, Nadia a visité Yad Vashem
et le Musée de l'histoire du peuple juif, a rencontré des députés israéliens,
ainsi que le président de l'Université de Tel Aviv pour réfléchir à la
possibilité de voir des étudiants yézidis venir
étudier en Israël.
"Comme
les Juifs, les Yézidis ont montré une résilience face
à l'oppression. S'accrocher à son identité peut être une force de résistance.
Chaque fois que nous pratiquons une coutume traditionnelle ou que nous en
défendons une autre, nous refusons de laisser nos tortionnaires être plus forts
que nous", a-t-elle affirmé.
Lors
d'un rassemblement à la Knesset lundi soir, Nadia a exhorté les députés
israéliens à reconnaître officiellement le génocide des Yézidis
et à adopter un projet de loi présenté par la députée de l'Union sioniste Ksenia Svetlova, également à la
tête du lobby pour le renforcement des relations entre l'État hébreu et le
peuple kurde.
"Si le projet de loi
est adopté, Israël rejoindrait d'autres pays qui ont reconnu officiellement que
ce que nous avons enduré est un crime. En effet, le crime le plus odieux",
a affirmé Nadia mardi devant les étudiants de l'Université de Tel Aviv. Après
elle, Svetlova a affirmé croire qu'Israël peut faire
beaucoup pour favoriser la cause des Yézidis.
"La
première chose que nous devons faites est commémorer et reconnaître", at-elle déclaré.
"Plus
jamais ça. C'est la devise de notre pays qui a été construit sur les cendres de
la Shoah. Pour moi (...) Il est évident que 'Plus jamais ça' n'est pas valable
seulement pour les Juifs. Ça l'est aussi pour les autres nations et pour les
autres peuples", a ajouté Svetlova.
Avec
l'armée irakienne qui reprend petit à petit sur les derniers bastions de l'EI
dans le pays, Nadia espère bientôt pouvoir revenir dans son village de Sinjar et poursuivre son rêve d'étudier le maquillage
artistique et d'ouvrir son propre salon.
"Il
n'y a pas un jour qui se passe, sans que je pense à ma famille, à notre maison
et à ce qui m'est arrivé. Toute ma vie est devenue un souvenir. Ca me suit tout
le temps", a-t-elle soupiré.
Avant
de quitter Israël, Nadia a livré un dernier message aux étudiants: "Merci d'avoir donné
aux Yézidis un exemple pour savoir comment rester
liés à notre histoire et à notre patrimoine tout en façonnant notre avenir".