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TIRERA-T-ON LES LEÇONS DE L'HISTOIRE ?

 

Par Emanuele Ottolenghi, professeur d'histoire à Oxford et à l'American Enterprise Institute

Article paru dans "The International Jerusalem Post" du 15/21 avril 2005

Traduit et adapté par Albert Soued, www.chez.com/soued/conf  et www.nuitdorient.com

 

La question qu'on peut se poser raisonnablement est la suivante: "Est-ce qu'introduire le H'ezbollah dans le processus politique amènera ce groupe terroriste islamique à se transformer réellement en partenaire démocratique sur la scène Libanaise"?

La France pense que oui. La résolution 1559 du Conseil de sécurité appelle au désarmement de toutes les milices. Au delà des mots, la France ne lèvera pas le petit doigt pour faire appliquer cette résolution. Malgré qu'elle ait participé à la rédaction du texte avec les Américains, l'automne dernier, la position de la France est de ne pas affronter le H'ezbollah. Au lieu de désarmer cette organisation, la France préfère lui offrir des avantages politiques. Que le H'ezbollah garde ses armes et qu'il participe aux élections! La France est persuadée qu'en participant au pouvoir et en profitant des avantages du processus démocratique, cette organisation terroriste désarmera d'elle-même…, pour la raison que le H'ezbollah n'est pas seulement une milice et une organisation terroriste, mais aussi une force politique et sociale avec laquelle il faut compter. Si on la rendait illégale ou si on l'affrontait, on pourrait s'aliéner nombre de citoyens. Les Français préconisent la patience quant au déploiement des milliers de missiles dirigés contre Israël et estiment qu'on pourra venir à bout de l'agressivité de cette organisation en facilitant son intégration dans un Liban pacifique et démocratique…

Il est très douteux qu'une organisation comme le H'ezbollah devienne un jour une force démocratique. Même si on la persuade d'entrer dans le processus, son fondement et ses objectifs resteront les mêmes. Et j'ajouterai qu'en lui laissant son immense arsenal intact, au lieu de renforcer la démocratie au Liban, cette organisation la sabotera.

Pour exaucer les vœux de la France d'élections libres et transparentes au Liban, il faudrait que toutes les parties politiques acceptent un principe de base: il ne peut y avoir d'autre force militaire que celle qui est loyale au gouvernement. Un pays ne peut se permettre qu'une seule autorité et une seule loi. Dès l'instant qu'un parti politique a sa propre milice autonome et contrôle une partie du territoire, la voie est ouverte à l'anarchie. Les milices peuvent alors saboter le processus politique, intimider les électeurs, assassiner les opposants et utiliser leur pouvoir pour faire chanter l'autorité centrale.

 

L'expérience et l'histoire de l'Europe montrent que la position de la France est erronée. Dans les années 20 du siècle dernier, les fascistes européens et les nazis avaient chacun son groupe militaire indépendant qui s'engageait dans des actions violentes, se substituant à l'autorité de l'Etat et même parfois la défiant. Comme le H'ezbollah (1), les fascistes et les nazis avaient de vastes réseaux d'aide sociale, d'assistance, des mouvements de jeunesse et des centres de charité pour vétérans de guerre. Comme le H'ezbollah, ces forces politiques avaient des dizaines de milliers d'adhérents. Les fragiles démocraties d'Italie et de l'Allemagne de Weimar ont toléré ces soit-disant forces politiques et leurs voyous armés, sous le motif qu'en les intégrant dans le processus politique, on pourrait transformer ces extrémistes en citoyens pragmatiques et, compte tenu des forces populaires qu'elles entraînaient, on ne pouvait pas les ignorer.

Les Feikorps, précurseurs des SA et des SS, ont aidé à juguler la révolte Spartaciste, en liaison avec les "armées blanches" de Russie, tout en donnant aux vétérans allemands défaits de la 1ère guerre mondiale l'occasion de retrouver leur dignité. Ils ont été responsables de centaines d'assassinats politiques et de coups tordus, sans que le pouvoir central ne puisse réagir. En Italie pré-fasciste, l'attrait des "chemises noires" de Mussolini était identique, de même que leur rôle dans la chute de la démocratie. La composante militaire de ces mouvements était inhérente aux principes fondamentaux du groupe, et elle ne pouvait être contrôlée ou séparée de la composante politique, fasciste ou nazie.

Dans l'Europe d'avant la 2ème guerre mondiale, cet espoir de rédemption des loups a mené aux catastrophes qu'on connaît. Faire entrer des extrémistes dans le processus politique leur a permis de le saboter et de s'emparer des rênes de l'Etat. La possession d'armes a facilité cette prise autoritaire du pouvoir au détriment de la démocratie.

 

L'Europe a bien appris la leçon. Depuis 1945 tous les partis extrémistes ont été bannis et les théories à base de haine raciale sont devenus des crimes. Toutes les tentatives de reconstituer ces partis ont été jugulées. Lorsque dans les années 70, des groupes armés naquirent au sein des sociétés européennes pour réaliser des visions radicales et révolutionnaires, ils ont été combattus et ont été éliminés. Les groupes terroristes nés de griefs ethniques, comme l'ETA et l'IRA ont été combattus et les gouvernements n'ont jamais cédé devant la violence, demandant le dépôt des armes avant toute discussion politique. Pour devenir un partenaire crédible, l'IRA a dû baisser le niveau de ses revendications (indépendance) et accepter de désarmer pour appliquer l'accord dit de "Good Friday". Son incapacité à désarmer a été à l'origine de la suspension de l'accord politique.

 

Pourquoi se passerait-il autrement au Liban?

La France s'attend-elle à ce que les Libanais se conduisent différemment des Européens?

Il faudrait comprendre que le loup ne peut se transformer en agneau et que les objectifs politiques du H'ezbollah correspondent aux fondements de leur doctrine violente et intégriste. (2)

 

Notes de la traduction:

(1)   Il ne faut pas perdre de vue que l'endoctrinement des jeunes dans le fief du Hezbollah (le Sud du Liban) est du type fasciste, avec les mêmes arguments et le même salut que celui des nazis.

(2)   Ce raisonnement peut s'appliquer intégralement aux organisations terroristes sévissant au Moyen Orient, notamment en Palestine où elles sont nombreuses.

 

 

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