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POUR RÉUSSIR À LA
FAC, T'AS INTÉRÊT À ÊTRE BAASISTE !
Par Akram al-Bonni,
journaliste à AN NAHAR - Beyrouth
Traduit et publié en
français par le Courrier International du 02/10/2003 - Numéro 674
Ceux
qui ont cru à une libéralisation du régime syrien ont vite déchanté. De l'école
primaire jusqu'à la fin des études universitaires, l'étudiant doit toujours
montrer patte blanche.
Depuis la parution des pourcentages d'admission dans les universités syriennes,
c'est la déception et l'amertume chez tous ceux qui jugeaient plausibles les
rumeurs prédisant la fin des privilèges historiques dont jouissent les membres
de l'Union des jeunes pour la révolution (d'obédience baasiste), auxquels sont
attribuées des notes supplémentaires, sans lien avec leur niveau de
connaissance scientifique, qui leur permettent de rivaliser avec les plus forts
des bacheliers lors du choix des branches scientifiques de pointe ! Ces rumeurs
n'étaient pas sans fondement, rendues crédibles par les mesures officielles
prises ces derniers mois, par exemple l'arrêt du port de l'uniforme militaire
dans les écoles syriennes, la modification de certains programmes scolaires et
de la "tolérance" envers d'autres mouvements politiques, alors que la
loi interdit toujours à tout groupe autre que le parti du "Baas arabe
socialiste" d'exercer une activité au sein de l'armée et parmi les
étudiants. Ces rumeurs étaient renforcées également par le nouvel état de
choses créé par l'occupation américaine de l'Irak, avec l'espoir que les portes
s'ouvrent aux vents du changement : des bruits ont couru à propos de probables
décrets qui devraient réorganiser la vie publique sur de nouvelles bases, y
compris par une réduction du contrôle de l'Etat sur l'éducation.
Les autorités syriennes ont beaucoup fait durant les
dernières décennies pour instrumentaliser l'enseignement. Elles ont commencé
par truffer les programmes de leur idéologie, puis elles ont organisé des
campagnes d'épuration du corps professoral : tous ceux dont la fidélité au
parti Baas était mise en doute, même s'il s'agissait des meilleurs éléments
scientifiques ou pédagogiques, étaient écartés. Il y a eu enfin la constitution
d'organisations chargées d'encadrer chaque cycle de l'enseignement et qui ont
tout pouvoir de décision en ce qui concerne les élèves - ces êtres si maléables
- et leur avenir. Pour les plus jeunes, c'est l'organisation des
"avant-gardes du Baas" qui contrôle leur comportement et leur impose
les opinions qu'ils peuvent accepter et celles qu'ils doivent refuser.
L'organisation doit aussi leur assurer une "ambiance spéciale de
créativité" au sein de laquelle les élèves sont tenus de rivaliser de
louanges pour les dirigeants politiques et d'attachement au parti au pouvoir !
Pour la tranche d'âge suivante, l'Union des jeunes pour la révolution se charge
d'apprendre aux collégiens et aux lycéens comment faire passer l'acquisition
des connaissances après la fidélité politique et l'intérêt personnel, ouvrant
largement ainsi aux adolescents et aux jeunes la porte qui en fera avant tout des
opportunistes et des flatteurs, préoccupés de satisfaire les maîtres des lieux.
Cette organisation possède des compétences exceptionnelles pour gratifier ses
membres de "points d'activité" qui sont ajoutés au total des
notes du baccalauréat. Chacun peut ainsi tout simplement "s'emparer"
de plus de vingt points (ce qui est supérieur, par exemple, à la note maximale
en chimie) qui seront ajoutés au total général de ses notes, lui permettant
alors d'arracher une place dans les facultés recherchées.
Au niveau universitaire, l'Union nationale des étudiants de Syrie et le Bureau
de l'enseignement supérieur, qui dépend de la direction du Baas, coopèrent pour
compléter la soumission et la récupération des étudiants des universités. Ils
ont le pouvoir de transformer tout étudiant qui chercherait à sortir du rang en
exclu ou en étudiant de seconde classe devant qui toutes les portes seront
fermées : pas de logement en cité universitaire, pas de bourse d'études et très
peu d'espoir de poursuivre des études supérieures, d'aller étudier à l'étranger
ou d'être choisi comme maître-assistant dans sa faculté, même s'il obtient les
meilleurs résultats académiques. A la fin de ses études, une fois diplômé,
chacun devra passer un autre examen pour prouver sa fidélité et son obéissance
au Parti, avant d'espérer obtenir un emploi.