www.nuitdorient.com
accueil -- nous écrire -- liens -- s'inscrire -- site
NE BRADEZ PAS LES ESPOIRS AU LIBAN
Par Amir Taheri, journaliste
New York Post – 19 Septembre, 2007 –
Article traduit par Fred Rothenberg pour www.nuitdorient.com
Depuis qu’il a été chassé du Sud-Liban lors de la mini-guerre de 2006, le Hezbollah applique une stratégie visant à remplacer le gouvernement du Premier Ministre Fouad Siniora par un gouvernement répondant aux ambitions régionales de la Syrie et de l’Iran.
Cette stratégie a débuté avec un
retrait des ministres Hezbollah du Cabinet
Lorsque ces efforts
échouèrent, le Hezbollah s’allia à une faction de
chrétiens maronites conduite par l’ex
Général Michel Aoun pour prendre en tenaille le gouvernement Siniora. Idéologiquement Aoun et le Hezbollah n’ont rien en
commun. Mais Aoun veut à tout prix devenir président et croit que seuls l’Iran
et la Syrie peuvent l’aider à atteindre cet objectif. Le Hezbollah pour sa part
a besoin d’un allié chrétien ne serait-ce que pour ne
pas paraître sectaire.
Mais l’adjonction de Aoun au complot anti-gouvernemental n'a pas suffi pas
pour obtenir le résultat désiré, et le Hezbollah entra alors directement en
action. Il déploya des dizaines de milliers de protestataires professionnels
dans les rues de Beyrouth pour assiéger les bureaux gouvernementaux et
paralyser l’administration. Depuis maintenant un an, cette tactique s’est
révélée également inefficace. Le gouvernement continue à fonctionner alors que
le support populaire à l’alliance Aoun-Hezbollah s’est régulièrement érodé.
D’autres tactiques
ont aussi échoué. L’assassinat ciblé de ministres
et de membres du parlement visant à priver Siniora de sa majorité, ne réussit pas
à abattre le gouvernement (1). Vint alors une tentative pour provoquer une
guerre civile en envoyant le Fatath-al-Islam,
un groupe radical armé lié à
Al Qaeda, près du haut-lieu sunnite de Tripoli. Plusieurs semaines de combats
conduisirent à la mort d’environ 1000 personnes dont la majorité des insurgés.
Mais l’armée libanaise ressuscitée se montra loyale et prouva qu’elle était
capable et résolue à défendre le gouvernement élu démocratiquement.
Tout cela affaiblit l’économie libanaise en écartant les touristes et les investisseurs étrangers. Mais l’effondrement de l’économie souhaitée par le Hezbollah et Aoun ne s’est pas concrétisé. La communauté internationale est venue au secours avec de généreux prêts et dons. Il était clair que les puissances intéressées par un Moyen-Orient stable ne permettraient pas à Téhéran et à Damas d’imposer leur plan et d’utiliser le pays dans leurs jeux régionaux.
Tout au long de cet effort de guerre d’un an, le Hezbollah et Aoun avaient une carte maîtresse : le Président Emile Lahoud. Avant que ses troupes n’aient été chassées du Liban en 2005, la Syrie avait imposé une extension du mandat de Lahoud; en retour, celui-ci fit tout ce qui était en son pouvoir pour aider Téhéran et Damas à gagner au Liban, refusant de signer des lois votées par le Parlement et réservant l’approbation présidentielle pour des nominations administratives et diplomatiques importantes. Mais même les efforts de Lahoud pour renverser le gouvernement ont échoué.
Le mandat de Lahoud après les trois années ajoutées suite aux pressions syriennes finit en novembre de cette année. Suivant la Constitution, le processus de sélection d’un nouveau président commence dimanche et devrait s’achever dans les deux mois. Suivant une convention non écrite, le président doit appartenir à la communauté maronite mais ne peut être élu sans majorité au parlement.
Deux points sont déjà clairs:
-Aoun, qui a abandonné l’opposition qu’il a eue toute sa vie à la domination syrienne pour tenter d’obtenir la présidence, ne semble pas en mesure de réaliser son objectif. Ses alliés iraniens et syriens ont décidé de le trahir en offrant un compromis sur ce qu’ils appellent « un candidat consensuel ».
Et les amis maronites d’Aoun le considèrent comme un trublion plus soucieux de ses propres intérêts que de ceux des Libanais chrétiens en danger.
- La coalition nationale qui soutient le gouvernement Siniora possède la majorité requise pour choisir le nouveau président, sans l’axe Hezbollah-Aoun (1).
Mais avant que cette
règle de la majorité simple soit opérationnelle, le Parlement doit d’abord se
mettre d’accord sur un candidat de consensus. C’est pourquoi Téhéran et Damas
ont entamé des manœuvres visant à imposer un candidat de consensus – c’est-à-dire quelqu’un non engagé par l’agenda politique de la
coalition démocratique. Lahoud a proposé que le chef
d’état-major de l’armée, le Général Michel Suleiman soit choisi comme président intérimaire pour
trois ans. Ce qui maintiendrait le Liban dans un état d’incertitude jusque bien
avant en 2010, année que le Président iranien Mahmoud Ahmadinejad
a fixée comme devant marquer une « défaite totale » de la stratégie
US de démocratisation du Moyen-Orient. Il n’y a en fait aucune chance que
l’idée de Lahoud soit acceptée, ne serait-ce que
parce qu’elle viole la Constitution. Donc Lahoud a
proposé une seconde option que lui reste en place jusqu’à ce qu’une nouvelle élection choisisse un nouveau parlement.
Les forces anti-démocratiques libanaises ont d’autres tours dans leur sac. Le
parlement pourrait nommer
son doyen comme président. Ou choisir un technocrate comme par exemple le Gouverneur de la Banque
Centrale Riad Salamah.
Hélas! certains au Département d’Etat semblent tentés par ces idées
et auraient même essayé de persuader les Européens, spécialement les français
qui sont de retour, d’étudier un compromis. Il n’y a toutefois aucune raison
logique, constitutionnelle ou politique de permettre à l’axe Hezbollah-Aoun et
à ses alliés de Téhéran et Damas d’échapper aux conséquences de leur défaite.
Ayant cyniquement essayé de casser la volonté de la majorité démocratique
libanaise et de mettre l’avenir du pays en danger, dans l’intérêt des ambitions
régionales de la république islamique, ils ne doivent même pas bénéficier d’une
demi-victoire.
Il est clair que
l’axe a menacé de paralyser la législature en retirant sa faction et même
d’empêcher l’accès physique aux bâtiments du Parlement. Mais aucune de ces menaces
ne devrait réussir : trois précédents présidents ont été élus hors les
murs du Parlement – et l’un d’entre eux l’a été à la majorité simple des
présents.
Suivant la
Constitution, le présent Parlement doit choisir un nouveau président, assurant
ainsi la continuité de l’état, avant la convocation de nouvelles élections
générales. La majorité démocratique devrait se mettre d’accord sur une liste de
deux ou trois candidats à la présidence et la soumettre au Parlement en déclarant
président celui qui obtiendra la majorité simple.
Les démocraties occidentales et les états arabes intéressés à un Liban indépendant devraient soutenir le gagnant. Toute tentative pour aider la minorité putschiste à échapper à ses mauvais calculs serait une trahison des aspirations démocratiques du Liban.
Note de
www.nuitdorient.com
(1)
Selon le scénario habituel propre aux services secrets Syriens, dans le
quartier maronite du Metn, à Sin el Fil, le 19
septembre 2007, une bombe puissante a tué le député chrétien Kataëb de Aley, Antoine Ghanem, et 6 autres personnes et en blessé 75! Antoine Ghanem est
la dixième personnalité s’opposant à la Syrie à être la cible d’un attentat,
depuis l’explosion qui avait touché le 1er octobre 2004 le ministre Marwan Hamadé. L’attentat
perpétré à une semaine du scrutin présidentiel porte à 68 les députés de la
majorité sur un total ramené à 127.