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Qu’Est-il Arrivé à Beyrouth ?

Par Albert Soued, écrivain http://symbole.chez.com pour www.nuitdorient.com

12/8/20

Notre explication se base essentiellement sur le texte suivant « Lebanon – What happened? »  par David Wurmser -

Originally published by the Foundation for American Security and Freedom
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Le bateau et sa cargaison

La version officielle est qu'un navire, le Rhosus, immatriculé en Moldavie, naviguait en 2013 entre la Crimée et le Mozambique pour livrer des engrais ou des explosifs pour une exploitation minière. Le navire a rencontré des difficultés mécaniques et a dû être amené au port de Beyrouth. Le gouvernement libanais constatant que les papiers n'étaient pas en règle a confisqué le navire. Le propriétaire du navire, l'oligarque russe Igor Grechushkin, basé à Chypre, a abandonné le navire et la cargaison et a laissé l'équipage en rade. Le nitrate d'ammonium présent sur le navire a été déchargé et placé dans le hangar 12. Après sept ans de querelles juridiques et de va-et-vient bureaucratique, la cargaison est restée stockée dans le hangar 12 jusqu'à ce qu'elle explose.

Il faut savoir que le bateau était défectueux et ne pouvait passer le Bosphore avec une marchandise dangereuse. Il n’a pu le faire qu’avec l’autorisation expresse du président turc Erdogan. De même, il ne pouvait accoster au port de Beyrouth, ni décharger la cargaison pour les mêmes raisons, bateau défectueux et marchandise dangereuse. Il a été autorisé à le faire sous la pression du Hezbollah qui aurait racheté la cargaison, malgré les réticences des autorités portuaires.

Le bureau de l'inspecteur du port de Beyrouth a demandé à son équipe de lancer une enquête discrète sur la provenance de l'argent de l'achat. Ils ont conclu qu'il menait à l'Iran. De plus, il a fait venir un chimiste pour connaître la dangerosité du nitrate d'ammonium. Les tests ont montré qu'il s'agissait de la plus haute qualité possible, pas du type utilisé dans les engrais, ni même d'un niveau de qualité commun pour les explosifs miniers. L’inspecteur du port aurait interdit l’entrée du hangar où était stocké ce nitrate.

En fait cette cargaison est devenue la réserve du Hezbollah à partir de laquelle il pouvait envoyer du nitrate d'ammonium à ses agents dans le monde entier, comme ceux qui ont été pris en 2015 à Londres avec 3 tonnes de nitrate d'ammonium en essayant de mettre en place un certain nombre d'usines de fabrication de bombes, ceux pris à Chypre avec 9 tonnes de nitrate d'ammonium et ceux pris en Allemagne avec une quantité non déclarée de nitrate d'ammonium.

Hangars 9 & 12

"Porte de Fatima" est le surnom donné à la structure portuaire indépendante et clandestine, totalement hors du contrôle et de la visibilité du gouvernement libanais. Le Hezbollah s'est vanté que "la Porte de Fatima" dans le port de Beyrouth est l'endroit où il peut aller et venir à volonté, importer et exporter librement et passer en contrebande sans être inquiété, non seulement sans interférence des autorités douanières, mais souvent à leur insu.

Etant les plus proches de la ligne de flottaison, ces 2 hangars sont les structures les plus recherchées pour un transfert rapide, et non pour le stockage à long terme. En effet, l'autorité portuaire a demandé que le nitrate d'ammonium soit transporté vers des hangars de stockage plus éloignés, mais ces demandes ont été accueillies avec silence.

Les Explosions

La 3ème et principale explosion a provoqué une « nuage de Wilson » qui a impressionné.

Un nuage de condensation transitoire, également appelé nuage de Wilson, est observable lors de grandes explosions dans l'air humide.

Lorsqu'une arme nucléaire ou une grande quantité d'explosif conventionnel explose dans un air très humide, la "phase négative" de l'onde de choc provoque une raréfaction de l'air entourant l'explosion, et non contenu dans celle-ci. Cette raréfaction entraîne un refroidissement temporaire de cet air, qui provoque une condensation d'une partie de la vapeur d'eau qu'il contient. Lorsque la pression et la température reviennent à la normale, le nuage de Wilson se dissipe.

Toute explosion suffisamment importante, telle que celle provoquée par une grande quantité d'explosifs conventionnels ou une éruption volcanique, peut créer un nuage de condensation, comme on l'a vu dans l'explosion du port de Beyrouth, où un très gros nuage de Wilson s'est étendu vers l'extérieur à partir des explosions. (source Wikipedia)

Il s'agissait en fait d'une onde de pression, et non d'une onde de choc, comme celle que produirait une bombe à combustible-air, car le nombre de morts aurait été astronomiquement plus élevé, s'il s'était agi d'une onde de choc.

Une analyse ultérieure des effets de l'explosion principale a indiqué qu'elle était équivalente à une explosion de 1,1 kilotonne - comparable à une petite explosion nucléaire tactique d'environ 1/11ème de la taille de l'explosion nucléaire d'Hiroshima.

Une onde de pression massive s'est propagée dans toute la ville, et derrière le nuage de Wilson s'est élevée une large et imposante colonne de fumée épaisse de couleur brun rougeâtre, indiquant une explosion de nitrate d'ammonium concentré et de qualité supérieure, de type bombe. Le nitrate d'ammonium de qualité engrais a tendance à exploser avec une fumée plus noire et huileuse.

On a vu la marque « Nitropril » sur des sacs dont des images sont apparues. Il s’agit de nitrate d'ammonium perlé (granulé), densément poreux, utilisé dans la 3ème explosion massive. Ce n’est pas la qualité « engrais ».

Sur tous les emballages de nitrate d’ammonium, concentré ou non, on note l’avertissement de sécurité suivant : "Peut exploser sous confinement et à haute température, mais pas facilement. Peut exploser en raison de détonations à proximité".

Les 2 premières explosions avaient pour but de créer une détonation. La 1ère, supposée provenir de feux d’artifices, a échoué. Vingt minutes après, la 2ème explosion a réussi à faire sauter le nitrate. Il s’agissait sans doute de munitions et/ou de missiles.

Conséquences

La 3ème explosion a détruit le centre de Beyrouth, endommagé des bâtiments à 15 km de là et envoyé des ondes de pression à 30 km sur les montagnes voisines. Elle a été entendue dans le nord d'Israël, et même clairement à Chypre, à 200 km de là. L'explosion a fait plus de 200 morts, plusieurs milliers de blessés et 300 000 sans-abri.

Certains effets de l'explosion ne font que commencer. 80% des réserves stratégiques de céréales ont été incinérées, et le port par lequel la plupart des denrées alimentaires importées arrivent a été rendu dysfonctionnel. Le Liban dépend de l'importation de nourriture pour 90% de ses besoins, c'est donc un désastre qui s’annonce. Le port de Beyrouth est le point d'entrée de 70% des importations de toutes les marchandises. Le Liban a donc un grave problème logistique - peu de quais en activité à Tripoli – celui de trouver une structure permettant d'acheminer des chargements par voie maritime.

Motivations

Comme il a été déjà suggéré, il se confirme de plus en plus que l’explosion qui a ravagé Beyrouth et notamment son quartier « chic » ne peut pas être un accident et qu’elle est le fait du H’ezbollah, manipulé par l’Iran. Depuis de nombreuses années, le H’ezbollah fait la loi dans le pays et notamment sur le port de Beyrouth.

 

Faire exploser du nitrate d’ammonium n’est pas une chose aisée. Cela nécessite différentes opérations, la mise en fosse, l’imprégnation d’un liquide inflammable, des détonateurs spéciaux, une première explosion contrôlée… et cela ne peut être qu’une opération organisée et préméditée. Le H’ezbollah, manipulé et aidé par l’Iran, est l’opérateur le plus plausible pour 5 raisons :

- l’énorme explosion a permis de différer le verdict du procès d’affiliés du Hezbollah à la Haye, accusé du meurtre de Rafiq Hariri, ex-1er ministre (Orient-le-Jour : « Ce vendredi 7 août, le Tribunal spécial pour le Liban doit rendre son jugement sur le meurtre de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, mort dans un attentat en 2005. Les accusés, affiliés au Hezbollah, seront jugés par contumace »- Rafik Hariri pourrait être rendu responsable de l’accostage d’un navire défectueux et du déchargement d’une marchandise dangereuse.

- l’énorme explosion était supposée éloigner, voire annuler des émeutes de la faim prévisibles contre le H’ezbollah, du fait du désastre socio-économique dans le pays,

- en traumatisant la population, l’énorme explosion renforce indirectement la position du H’ezbollah dans le pays, ainsi que celle de son parrain, l’Iran,

- les énormes destructions ouvrent la voie à une reconstruction par les alliés de l’Iran, Chine et Russie,

- de plus, ce processus apocalyptique destruction/construction est tout à fait conforme avec la foi shiite, préconisant le chaos et une apocalypse avant la venue du Mahdi, partagée aussi bien par le h’ezbollah que par les ayatollahs.

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