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Par René
Marchand, éminent islamologue français issu de l’École nationale des langues
orientales vivantes. Il est licencié de langue et littérature arabe en
Sorbonne.
Essayiste et
journaliste, il collabore notamment à la Nouvelle Revue d’Histoire
pour laquelle il a écrit le texte que nous vous présentons ci-dessous ( La Nouvelle Revue d’Histoire N°44 - Septembre 2009). Il y
analyse avec brio le lien entre la violence et l’islam et
montre comment, de tous temps, les musulmans ont eu recours à cette violence à des fins
d’expansion et de domination. Il est l’auteur, entre autres, de :
- La France en danger d’Islam,
entre jihâd et reconquista (Lausanne, Editions de l’Âge d’Homme,
2002)
- Mahomet.
Contre-enquête : un despote contemporain, une biographie officielle truquée,
quatorze siècles de désinformation (Paris,
Editions de l’Echiquier, 2006)
La violence et l’islam, le 30 septembre
2009
Voir aussi les
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et les articles sur l'Islam
I. Etat des lieux
Murés dans leurs préjugés sur la mixité, les dirigeants
européens ont favorisé l’immigration et n’ont pas vu enfler en celle-ci l’islamisation
conquérante. État des lieux.
Mahomet est
arrivé à Médine le 24 septembre 622. Il y a été précédé par quelque cent Mecquois,
entrés par petits groupes : la communauté des premiers musulmans, qu’il a
rassemblée autour de lui en dix ans de prédication. C’est un marginal d’une
cinquantaine d’années, ruiné, exclu de son clan (une mort civile infamante).
Mais c’est aussi un prophète charismatique. A-t-il, comme le prétend la
tradition musulmane, été appelé à Médine, le plus grand centre agricole d’Arabie,
peuplé de deux tribus arabes (venues du Yémen au siècle précédent) et de trois
tribus juives et où les affrontements interethniques sont meurtriers, pour y
exercer un rôle d’arbitre suprême, de “premier magistrat” ?
La tradition se
contredit quand elle révèle que lui-même et ses compagnons étaient dans une
situation si précaire qu’ils n’avaient d’autre recours que d’organiser des
razzias pour subsister. L’attaque de caravanes est ancienne dans la culture
arabe. Elle est même souvent célébrée dans la poésie. Mais, sur les voies du
Hedjaz, tronçon incontournable de la grand-route Méditerranée-Orient “sécurisé”
depuis des décennies par les Mekkois, elle est alors strictement interdite.
Elle s’apparente à de la piraterie.
En août 623,
Mahomet prend en personne la tête d’une expédition, celle-ci échoue, comme les
six autres qu’il lance dans les mois suivants.
À Nakhla, petite oasis du Hedjaz, en janvier 624, une dizaine
de musulmans, commandés par un compagnon du Prophète, tendent une embuscade à
une petite caravane conduite par quatre Mekkois. L’un de ceux-ci est tué.
Combat dérisoire, mais immense scandale ! L’attaque eu lieu en plein territoire
mekkois, pendant un mois de trêve observé par les tribus arabes à l’époque du
pèlerinage à La Mekke (antérieur à l’islam). Les
Médinois, qui risquent une guerre avec leurs puissants voisins s’ils se
solidarisent avec le groupe des musulmans, ne vont-ils pas expulser les
immigrés ? Pendant un mois Mahomet se tait… jusqu’à ce que la Révélation
justifie toute l’opération (Coran: 2. 214.).
Le Coran devient alors ce
fourre-tout où se mêlent questions religieuses, imprécations contre les
infidèles et appels à la guerre sainte.
Le chef de la
petite communauté musulmane a pris acte que, dans l’oasis pluri ethnique
déchirée sur elle-même, aucun parti n’est en mesure de s’opposer à son groupe.
Un mois plus tard, après avoir levé une bande où les immigrés sont renforcés
par deux cent Médinois, il attaque une grosse caravane mekkoise, qui circule
sans escorte armée. Il ramasse un butin énorme. Désormais, jusqu’à sa
mort, en 632, il multipliera l’action violente et les batailles rangées.
La tradition
rapporte les faits comme autant de titres de gloire dans les campagnes (maghâzî) de
l’Envoyé d’Allâh.
C’est pendant
ces années que le Coran, qui traitait jusque-là
de questions que nous définirions, nous, Occidentaux, de proprement
religieuses, devient ce “fourre-tout” où les imprécations contre les infidèles
ou les mauvais musulmans et les exhortations à la guerre se mêlent à des règles
civiques, à des prescriptions touchant la vie privée… C’est alors que l’islam
prend sa forme définitive : un ensemble insécable englobant religion, politique, droit public et
droit privé, morale - selon nos termes - sous le signe du divin.
Par la suite,
pour gérer leurs vastes conquêtes, les khalifes
(successeurs) vont devoir compléter le corpus initial. Ils
prendront comme règle un principe arabe, la sunna,
qui fonde le droit sur le précédent. Les faits et dits du “beau
modèle” (Coran : 23. 21 ; et passim) et de ses premiers
Compagnons (Coran : 48.18.) seront notés
dans des recueils (les hadith). Après des manipulations
diverses par des factions rivales et “épuration” par les pouvoirs en place, les hadith constitueront, avec le Coran, parole de Dieu,
éternelle comme Lui, les matériaux de base de la Loi (sharî’ah).
Un islam sans
volonté d’expansion est aussi inimaginable qu’un islam sans contenu juridique
ou sans contrainte sur la vie privée. L’islam ne cessera d’affiner sa
législation, toujours dans l’obsession d’un fondamentalisme, non d’inspiration,
mais de stricte imitation, qui interdit l’innovation (bid’a). La
charia finira par recouvrir tous les aspects de la vie humaine, enfermant le musulman dans une sorte de “totalitarisme”
sans équivalent dans l’histoire. Il est à noter que, jusqu’au choc avec l’Occident au 19éme siècle, toutes les insurrections, tous les
renversements de pouvoir, se donneront pour objectif le retour à l’islam des
origines.
L’expansion par
la violence est un devoir et,
comme tel, prescrit par le divin et, donc, non discutable.
Le butin, qu’il
s’agisse de biens matériels ou d’êtres humains, est une récompense d’Allah. Le
monde est divisé entre la maison de l’islam et la Maison de la guerre. Avec les
infidèles, la ruse est licite et même recommandée aucune paix n’est autorisée,
sinon des trêves d’opportunité et de durée limitée…
Un islam sans
volonté d’expansion par la guerre est tout aussi inimaginable qu’un islam sans
contenu politique ou juridique ou
encore sans contrainte sur la vie privée.
Au
cours des cinquante dernières années, comment les Européens ont-ils pu laisser
un système, qui se donne pour objectif sacré leur asservissement, puis
l’anéantissement de leur civilisation, prendre pied sur leur territoire ?
Actuellement,
l’Union européenne compterait vingt millions de musulmans installés à demeure.
Le prénom le plus déposé au bureau des naissances de l’état-civil, à Marseille
comme à Bruxelles, est Mohamed. Dans dix ans, la “capitale de l’Europe” aura une population
majoritairement musulmane. Et la diaspora ne cesse de croître, tant par sa
fécondité interne que par l’arrivée de nouveaux immigrés. Par ailleurs, les
conversions d’Européens de souche à l’islam ne sont plus un phénomène
quantitativement négligeable.
Il faut faire la
part belle, sans aucun doute, aux menées d’un certain patronat ravi de pouvoir
recruter une main-d’œuvre bon marché et mal protégée, ou de politiciens de
gauche visant à constituer à leur avantage un parti charnière, d’appoint. Il ne
faut pas non plus négliger l’air du temps, imprégné de l’idée que l’internationalisme,
le métissage, le pluriculturel… régleront une fois pour toutes les difficultés
de l’existence humaine.
Mais,
surtout, on doit tenir compte de l’ignorance des Européens, qui ont défini
l’islam par un de leurs concepts, une religion, parmi d’autres.
II. L’islam conquérant à l’assaut de l’Europe
Dans
l’interprétation actuelle, une religion, cela signifie quelque chose relevant
uniquement de la sphère privée de chaque individu. Donc, par là même, quelque
chose à propos de quoi il serait inconvenant et antidémocratique de légiférer.
Au demeurant aussi quelque chose appelé à s’effacer devant le Progrès si l’on
en croit Auguste Comte et Karl Marx. Pour qui veut analyser un fait de
civilisation, les Européens ont commis la faute, gravissime, d’ethnocentrisme.
Emmurés dans
leurs idées fausses, ils n’ont pas vu naître et enfler la réislamisation en
cours à la fois dans les pays musulmans et au sein de la diaspora. Ils n’ont
pas mesuré l’ampleur du phénomène, ni saisi sa nature.
Ils n’ont pas
compris que les peuples musulmans étaient en train de récupérer leur identité,
affaiblie et malmenée par la parenthèse colonisation-décolonisation. Ils n’ont
pas compris non plus qu’il s’agit là de l’expression contemporaine de la
dynamique fondamentaliste involutive, qui est un des traits génétiques de
l’islam.
Un
aveuglement de confort du même ordre amène les Européens à nier l’existence
d’une intention de conquête
de leur continent. Ils ne
redoutent le danger islamique que sous la forme des attentats désordonnés de la
nébuleuse terroriste.
Pour avoir eu
connaissance de ce plan de la bouche d’un "islamiste" en 1994 et en
avoir suivi la réalisation quasiment au jour le jour depuis quinze ans, je suis
en mesure d’affirmer son efficacité.
Mon
interlocuteur m’avait révélé une stratégie de conquête subversive, “en
peau de panthère”, portant sur les lois, les coutumes et modes de vie, puis sur
les territoires eux-mêmes : "Un jour, nous exigerons l’équivalent des “places de sûreté” qui furent accordées aux
protestants au XVIème siècle", m’avait-il dit.
Dans un premier
temps, deux objectifs étaient prioritaires :
- faire venir
sur le continent le maximum d’originaires des pays musulmans et les réislamiser
- banaliser
l’islam en Europe.
Dans cette
phase, la violence devait être évitée.
Cependant, elle pouvait être décidée ponctuellement: pour faire pression sur un
gouvernement, rappeler aux pouvoirs publics la puissance de la
"communauté"… À un certain moment, les peuples indigènes se
rebellant, elle deviendrait inéluctable. Mais, mon informateur concluait ainsi,
"Si les indigènes européens se révoltent, les Américains et leur alliés
sauront vous imposer une solution de compromis"
Dans ce conflit,
nous avons jusqu’à maintenant perdu tous les combats sans même savoir qu’ils
nous étaient livrés. Ainsi, nous avons subi une véritable déroute dans la
bataille des prénoms: tout enfant immigré reçoit désormais un prénom musulman,
ce qui le rattache, à jamais, ainsi que ses descendants, à la communauté
musulmane.
Nous sommes en
train de perdre la bataille du ramadan, qui permet de détecter les mauvais
croyants et de les punir en conséquence.
Cette action,
qui ne pouvait pas ne pas être dès lors que l’islam constatait notre
avilissement selon ses critères et notre faiblesse à son égard, est conduite
par des mouvements nés dans les villes pour contrer la colonisation et
l’occidentalisation. L’un des principaux mouvements est celui des Frères
musulmans, apparu en Égypte dans les années 1920, avec le concours des services
secrets britanniques, qui voulaient faire pièce aux nationalistes. Ces hommes
sont des stratèges sachant jouer avec le temps, des tacticiens rusés. Ils nous
connaissent bien, alors que nous ne savons rien d’eux. Ils reçoivent des
subsides des pétro-dynasties, obligées de se dédouaner de leurs alliances
commerciales et militaires avec l’Occident. Ils sont assurés par ailleurs du
soutien des dirigeants américains, républicains et démocrates pour qui l’islamisation de l’Europe est un moyen radical
d’empêcher la création d’une Europe puissante (le discours
prononcé au Caire le 4 juin 2009 par Barack Hussein Obama est révélateur). Enfin, ils bénéficient de ces outils
de propagande hors pair que sont les télévisions satellitaires. Confortés par
leurs succès incessants et l’absence de réaction de l’adversaire, ils sont
persuadés que l’Europe sera musulmane avant la
fin de ce siècle et ont convaincu de leurs certitudes la grande majorité des
musulmans dans le monde.
Face
à cette offensive, quelle peut être réaction des Européens ?
Tout d’abord,
apprendre l’islam et l’arabe (sa langue matricielle) qui, non indo-européenne,
véhicule des concepts qui ne sont pas les nôtres et dont la traduction peut
être source d’erreurs catastrophiques.
-
Sortir de nos "islams rêvés". L’islam auquel nous avons à faire face n’est pas
l’islam en repli et sous contrôle de l’Algérie française ou de la Turquie
kémaliste, ni l’islam mystique de René Guénon ou de Massignon. Le soufisme
c'était hier; aujourd'hui, il est rentré dans le rang. Toute identité forte offre un cadre pour la réalisation
de soi, un projet de développement personnel et de dépassement.
-
Renoncer à l’espoir d’une réforme de l’islam, qui n’est demandée par aucun musulman sinon, en Europe, par de petits malins -
et qui est sans doute impossible.
- Nous interroger aussi sur ce qui attire, exalte, meut les
musulmans en guerre, particulièrement les
new Born et les convertis agissant en Europe.
La réponse est
difficile à comprendre pour nos dirigeants et nos intellectuels formatés sur
l’idée de la primauté de l’économie.
L’islam apporte avant tout une identité
à des individus ou à des peuples bousculés ou humiliés dans leurs valeurs
et manières d’être, étrangers à notre culture ou la récusant.
Cette identité a prévalence sur toute autre : ethnique ou nationale… On en
hérite ou on s’y rallie, mais on ne peut en sortir sous peine de mort (le
péché-crime d’« apostasie »). Elle est exigeante, avec une hiérarchie claire
des valeurs. Elle comporte de multiples devoirs, qui, immédiatement,
structurent et mettent fin à la névrose des interrogations et des changements
née de notre relativisme. C’est bien autre chose qu’un papier de naturalisation
ou une carte de séjour.
Le retour à
cette identité ancestrale, originelle, suscite la fierté d’appartenance, par
la distinction nette avec les autres, tous les autres, mais aussi par la
référence à des siècles de gloire, à des victoires sur l’ancien colonisateur
(le croisé), cela dans un système linguistique sémitique où l’histoire de
l’islam prend place dans un inaccompli, un en-cours, qui place les faits d’hier
sur le même plan que l’actualité d’ici et maintenant.
Autrement dit,
l’islam offre un cadre pour la réalisation de soi (”un besoin vital de
l’individu”, selon le psychologue américain Abraham Maslow),
un projet d’ontogenèse, et sous le signe valorisant du sacré, qui appelle au
dépassement, jusqu’au sacrifice de la vie.
«L’islam représente, pour des centaines de
millions d’hommes, et pour longtemps, ce qui précisément nous quitte, un ordre
spirituel et moral»
(Claude Imbert, Ce
que je crois).
Ajoutons que
l’islam apporte aussi dans nos banlieues la justification
d’une “virilité” affirmée, de l’esprit de bande, de la transgression et de la violence en territoire de conquête… plus les flots
d’argent venus du Proche-Orient.
Face à ces
facteurs de réislamisation, que
peuvent les luttes contre la discrimination, les ”plans-banlieue”, les
tentatives de constitution d’un islam à la française, compatible (comment?)
avec les lois de la République ? Rien. Strictement rien.
Seule la prise
de conscience nette de la stratégie de conquête et la mise en œuvre
d’une stratégie de contre-offensive peuvent arrêter la déferlante. Les
Européens ont à sortir du piège “islam-religion”, véritable cheval de Troie des
conquérants. Il leur appartient de définir un statut juridique de l’islam en Europe qui prenne en compte
toutes les composantes de cette entité complexe.
À l’intérieur de
leur territoire, qu’ils appliquent leur
justice - la justice, une notion
forte en islam - et ne cèdent rien, non seulement sur leurs valeurs, mais aussi
sur leurs manières d’être (deux volets indissociables au regard de l’islam),
sous peine de passer pour des hommes sans honneur, donc vaincus d’avance.
Pour
l’extérieur, “justice” se dit “réciprocité”, encore une notion qui sera
facilement comprise par les musulmans.
À ces
conditions, nous pourrions arriver très vite à une coexistence entre islam et Europe sur la base de la considération,
du respect mutuel (respect est un mot à connotation sacrée en islam).
Comme le
prévoyait mon interlocuteur “islamiste”, il est probable que l’Europe se réveillera. Un jour,
les peuples refuseront de se laisser asservir, de laisser tuer leur civilisation.
Ils relèveront le défi (au sens fort que donnait à ce mot Arnold Toynbee).
Alors, la confrontation sera plus ou moins ample et longue.
Tirons sans
attendre les leçons de l’histoire de nos défaites. Pensons au sort des
Byzantins et des Perses, qui sous-estimèrent la capacité de conquête de ces Arabes
qu’ils croyaient connaître et qu’ils méprisaient.