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Bienvenue
au « Bédouistan
», Impressions d’une Visite dans le Néguev
Par Shraga Blum, analyste
28/12/21
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les articles sur Israël
Nadia Matar (dr.) et Yehudit Katzover, dirigeantes du
mouvement pour la Souveraineté
A
l’initiative du Mouvement pour la Souveraineté (Ribonout)
animé par Nadia Matar et Yehudit
Katzover, un groupe d’une vingtaine de journalistes,
responsables d’organisations ainsi que l’ancien député Arié
Eldad s’est rendu mardi dans le Néguev pour se rendre
compte sur place de la problématique qui fait la une des informations depuis
quelques mois : l’apparition
rampante d’un Etat dans l’Etat dans le Néguev, des zones de non-droit de
plus en plus nombreuses et une violence qui ne fait qu’augmenter sous
différentes formes.
Les membres
du groupe ont pu assister à des interventions fort intéressantes de la part
d’intervenants directement concernés par la question : le journaliste
d’investigation Akiva Bigman,
habitant du Néguev, spécialiste de ce domaine et auteur de reportages sur la
question, Meïr Deutsch, directeur-général de
l’organisation Regavim qui combat depuis des années
le phénomène des constructions bédouines illégales, mais propose aussi des
plans de solutions détaillés aux gouvernements successifs, Ahmed El-Assad, maire du conseil local bédouin de Lakiya, adepte de la concertation et Pini Dabash, le charismatique maire du conseil local d’Omer.
L’impression
générale de cette journée est que la « question bédouine » est
devenue avec le temps une bombe à retardement pour l’avenir de l’Etat d’Israël
et que le temps qui passe rend une solution de plus en plus difficile en raison
d’une perte progressive de la gouvernance de l’Etat. De 11.000 personnes en 1948, originaires de
différentes contrées du Moyen-Orient, la population bédouine du Néguev atteint
aujourd’hui 270.000 personnes
environ. Près de 60% environ d’entre eux vivent dans sept villes et onze
conseils locaux reconnus, et 40% dans ce qui
est appelé « la dispersion bédouine » avec 35 villages non-reconnus et un nombre incalculable de constructions
éparpillées sur de larges espaces, dont des terres domaniales et privées.
Pour donner un ordre d’idée, les localités bédouines toute confondues du Néguev
occupent 130 km2 du
territoire alors que les localités juives, à population beaucoup plus
nombreuses s’étendent sur 55 km2. Cela à cause
de la tradition bédouine qui accapare et répartit les terres entre clans et familles sans se soucier
du découpage cadastral de l’Etat.
Elément très
important à prendre en compte et apporté en préambule par Akiva
Bigman et Meïr Deutsch dans
leur introduction historique, la question bédouine n’est pas, à l’origine, de
nature nationaliste. Il s’agit de la confrontation entre d’une part une population
d’origine nomade qui a sa propre culture, ses propres lois et ses
traditions basées sur la famille, le clan et la tribu et de l’autre, un Etat
souverain qui désire légitimement imposer une loi identique pour tous les
citoyens.
Malheureusement,
depuis 1948, les gouvernements israéliens successifs, qu’ils soient de gauche
ou de droite, n’ont pas su apporter de solution définitive pour concilier les
deux impératifs. De nombreux commissions et plans ont été élaborés mais sans
succès pour reloger la « dispersion » bédouine dans des villages et villes
reconnues et mettre fin à l’occupation rampante des espaces. De leur côté,
certains responsables bédouins n’ont pas toujours joué le jeu et adopté une
attitude victimaire, aidés en cela par des organisations d’extrême gauche
financées en partie par des fonds étrangers, en estimant que c’est à l’Etat de
faire tous les efforts et accepter leur différence culturelle. Beaucoup se
considèrent comme « natifs » et « autochtones » face à un Etat d’Israël
considéré comme « envahisseur ». Cette tendance est aujourd’hui renforcée par
la présence déterminante au gouvernement israélien du parti islamique Ra’am qui puise son électorat dans cette population et qui
défend becs et ongles les privilèges que se sont arrogés certains clans
bédouins.
Le maire
bédouin de Lakiya a par exemple attribué toute la
responsabilité du problème sur l’Etat d’Israël tout en affirmant souhaiter des
solutions négociées avec les pouvoirs publics pour résoudre la question du
relogement des bédouins. Il a repris l’argument selon lequel les constructions
illégales seraient la conséquences d’un refus permanent de l’Etat d’Israël
d’accorder des autorisations de construction, argument contestable lorsque l’on
étudie de près les us et coutumes au sein de cette population quant à la
répartition et l’utilisation des terres qui opposent souvent entre elles les
familles ou les tribus – parfois de manière meurtrière – laissant
volontairement de très nombreux terrains constructibles inoccupés.
Une villa bédouine à Rahat
Autre
allégation qui semble étrange, celle du niveau socio-économique catastrophique
dans lequel se trouverait la population bédouine. Par nature, il est
extrêmement difficile d’établir des statistiques fiables et exactes sur le
niveau socio-économique des Bédouins. Il est vrai qu’une bonne partie de la
population vit dans des conditions modestes mais cette visite dans plusieurs
villages a permis d’apercevoir, comme c’est également le cas en Judée-Samarie,
de nombreuses voitures et maisons de très haut-standing qui n’ont rien à envier
à celles que l’on voit à Savion, Ramat
Hasharon ou Herzliya Pitoua’h, signes d’une
économie parallèle.
Les mosquées poussent comme des
champignons dans les villages bédouins
C’est dans
cette incurie de l’Etat que sont venus progressivement s’engouffrer des
phénomènes qui rendent aujourd’hui la situation de plus en plus dangereuse :
apparition de bandes du crime organisé, surgissement d’un nationalisme «
palestinien » par le biais de la polygamie avec l’arrivée de nombreuses épouses
venues de Judée-Samarie et islamisation rampante d’une partie de cette
population jadis « laïque » sous l’influence de la branche sud du Mouvement
islamique arabe israélien (Ra’am) mais aussi de sa
branche nord, encore plus militante, un grand nombre d’enseignants des écoles
du Néguev provenant de ce courant. Pour cela, il suffit de voir le nombre de
mosquées qui poussent dans les villages bédouins que le groupe a longés.
Le maire
d’Omer, Pini Dabash, qui vit la situation
quotidiennement sur le terrain a dressé un sombre tableau et il ne cesse
d’alerter les autorités : le Néguev est de
plus en plus gangréné par le racket, le
trafic de drogue et d’armes, les constructions illégales, la corruption dans
certains conseils locaux, le vandalisme des symboles de l’Etat, les vendettas
entre clans rivaux, les violations systématiques des règlements élémentaires du
code de la route, les viols, les crimes d’honneur, les vols d’armes et de
matériel dans les bases de Tsahal, les jets de pierres sur les voitures
et les autobus etc. etc.
Face à cela,
regrette Pini Dabash, l’Etat n’arrive plus à gérer.
Les policiers ne sont pas assez nombreux, ils ne sont plus respectés quand ils
ne sont pas carrément physiquement menacés lors d’interventions, et les juges,
qui souvent habitent dans la région, hésitent à appliquer des sanctions sévères
et dissuasives de peur de voir leur famille menacée de vengeance.
Le groupe a
achevé sa visite avec un goût quelque peu amer et une inquiétude palpable : la constatation d’une situation qui semble insoluble
parce que trop longtemps négligée et la
confirmation que la lutte pour l’indépendance d’Israël n’est de loin pas finie
et elle ne se résume pas aux territoires libérés en 1967. Le Néguev, la
Galilée et les villes mixtes du pays sont en proie à des mouvements de fond
irrédentistes, encore minoritaires, mais en augmentation constante et
exponentielle par le biais des réseaux sociaux. Ces « territoires perdus » ont
urgemment besoin d’une réponse ferme de l’Etat et d’un rétablissement de la
souveraineté sous peine de voir le projet sioniste remis en question.