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LA STRATEGIE DE DAHIYA

Ou l'abandon de la riposte "proportionnelle"

 

Par Yaron London

www.YnetNews.com, émanation de Yédiot Ah'oronot - 06/10/08

Article traduit par Albert Soued pour www.nuitdorient.com

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La "stratégie de Dahiya" est une expression qui va s'installer dans le vocabulaire de notre défense sécuritaire. Dahiya est le quartier shiite de Beyrouth que nos pilotes ont transformé en amas de décombres, lors de la 2ème Guerre du Liban (1).

Lors d'une interview le 3/10/08 du Commandant en chef de la région Nord, Gadi Eizenkot, par "Yédiot Ah'oronot", il a énoncé clairement le changement de stratégie. Si jamais il y avait une nouvelle confrontation avec le Hizbollah, nous ne perdrons pas notre temps à rechercher les dizaines de milliers de lanceurs de missiles et nous ne gaspillerons pas le sang de nos soldats à démanteler les positions fortifiées de l'ennemi. Nous détruirons plutôt le Liban, sans tenir compte des protestations extérieures. Nous pulvériserons les 160 villages shiites qui sont devenues les bases armées de l'ennemi et nous n'épargnerons pas l'infrastructure d'un pays contrôlé en fait par le Hezbollah.

Cette stratégie n'est pas une menace proférée par un officier passionné, et elle correspond à un plan accepté par l'armée.

Jusqu'ici, la "stratégie de Dahiya" n'a pas été adoptée, tout simplement parce qu'Israël a essayé de se cramponner à l'idée de faire une distinction entre "bons et mauvais Libanais". On pensait que si on frappait seulement "les mauvais gars", les "bons gars" allaient se renforcer. Mais on s'était trompé, les "mauvais gars" se sont emparés du pays. Aujourd'hui tout le Liban est devenu un avant-poste Iranien. Sur les plans démographique et militaire, sur le plan de la confiance, de l'infrastructure sociale, de l'esprit de combat et du soutien étranger, tout est en faveur de Nasrallah.

Cette situation est à la fois bonne et mauvaise. Mauvaise, parce qu'au Nord, nous avons un état totalement pervers. Bonne, parce qu'on n'a plus besoin de faire de distinctions.

Le nouveau point de vue des stratèges d'Israël est que le Liban est un ennemi, plutôt qu'un rassemblement de factions, dont certains sont des ennemis, alors que d'autres sont les victimes d'une situation qu'ils ne contrôlent pas (2).

 

Tout Libanais est Nasrallah

 

En dépit des changements importants intervenus sur la scène politique libanaise, je ne pense pas que la stratégie de Dahiya aurait reçu l'approbation officielle, si nos dirigeants n'avaient pas changé de point de vue sur la question "qui est responsable ?". Et ce changement ne résulte pas d'un processus ordonné, mais de la constatation suivante: nos voisins sont totalement responsables de ce que font leurs dirigeants. Nous avons échoué quand nous avons essayé de faire une distinction entre "personnes innocentes" et "dirigeants coupables". Nous avons échoué dans nos efforts de distinguer entre des "personnes simples qui ont des parents et des enfants" et ceux qui les incitent. Sans le dire explicitement, nous sommes parvenus à la conclusion que les nations sont responsables des actes de leurs dirigeants.

 

En termes pratiques, les Palestiniens de Gaza sont tous des Khaled Mashaal, les Libanais sont tous des Nasrallah et les Iraniens sont tous des Ahmedinejad.

Il est regrettable que cette doctrine n'ait pas prévalu dans les jours qui ont suivi notre retrait du Liban, et immédiatement après notre désengagement de Gaza, lorsque des salves de roquettes se sont abattues sur le nord du Négev. Dans les 2 cas, nous nous sommes fait des illusions en pensant que le peuple était différent de ses dirigeants ou qu'il était surtout préoccupé de sa survie, étant l'otage d'"éléments radicaux et irresponsables". Si on avait adopté immédiatement la stratégie de Dahiya, on aurait évité beaucoup d'ennuis. Et appliquer cette stratégie à Gaza aurait fait comprendre au Hamas que nos frappes ne seraient plus "proportionnelles".

 

En fait, la stratégie de Dahiya est une doctrine adoptée par la plupart des Arabes (3). De leur point de vue, les sionistes sont des criminels, tous les citoyens d'Israël sont des sionistes, y compris les Juifs qui ne le sont pas. Ce sont seulement les agents de la propagande arabe, élevés en Occident, qui arrivent à faire la distinction entre un "gouvernement sioniste" et le peuple juif, "avec lequel nous n'avons pas de conflit historique et avec qui nous avons vécu en harmonie pendant de siècles".

 

Je ne propose pas d'adopter la manière de penser arabe, mais plutôt de tirer les conclusions d'une situation qui perdure où des états et des groupes politiques qui prétendent être représentatifs se défilent de leur responsabilité vis-à-vis de ceux qu'ils représentent. Je me réfère à la situation où les civils arabes se plaignent d'être punis du fait de leurs dirigeants, alors qu'ils les craignent plus qu'ils ne nous craignent. Aujourd'hui il faut inverser la situation et semer une peur plus grande parmi eux.

 

Notes de www.nuitdorient.com

 

(1) En arabe, Dahiya est le lieu où on jette le bouc émissaire à Satan, pour l'occuper.

A le sens de calamité.

(2) Les accords de Doha ont donné pratiquement le pouvoir politique et militaire au Hezbollah, au Liban. Le quasi coup d'état de ce groupe shiite a débloqué la situation politique libanaise à son avantage.

(3) Il suffit de voir comment les guerres sont menées au Soudan contre le Darfour, comment a été menée la guerre Irak-Iran, les guerres de Saddam Hussein contre le Koweit, les kurdes et les shiites…

 

 

 

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