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L'IRAN, EXEMPLE DE CONTINUITÉ DANS LE TOTALITARISME
Par Barry Rubin, directeur de "Global Research in
International Affairs Center" et rédacteur en chef de la revue Middle East Review of International Affairs
and Turkish Studies.
Article paru dans le Jerusalem Post du 5 juillet 2005
Traduit par Albert Soued, www.chez.com/soued pour www.nuitdorient.com
Il y a 3 avenirs potentiels pour les pays du Moyen
Orient, le statu quo nationaliste arabe, une démocratie modérée et pragmatique
ou l'Islam radical. La récente élection du président Iranien donne un éclairage
quant à ces 3 options.
Monarchie avec une forte imprégnation islamiste,
l'Arabie Saoudite est très différente de la Syrie qui a un régime radical et
nationaliste mené par une minorité "alaouite". Le Liban et l'Irak se
rapprochent d'une démocratie, le Maroc a un régime monarchique traditionnel
etc…On peut trouver aussi au Moyen Orient des régimes hybrides tels qu'un état
démocratique avec des partis islamiques, néanmoins le choix se ramène à quelque
chose de plus simple. Cela fait plus de 30 ans qu'on parle de la menace
islamiste sur les pouvoirs en place, et plus de 5 ans qu'on débat de
démocraties possibles, pourtant tout état arabe demeure à la base un régime
"nationaliste". L'idéologie dominante est celle du
nationalisme, charriant avec elle une opposition à l'Occident et à
Israël – tenus pour responsables de tous leurs échecs – opposition qui unit et
transcende les différences d'opinion quant aux réformes, au modernisme, aux
objectifs économiques des groupes, à une meilleure éducation et à d'autres
sujets.
Le nationalisme engendre des émotions qui sont
exploitées de manière à inciter une haine contre l'autre. Peu importent les
échecs répétés et ridicules du système en place, vilipendé en privé, le
discours public reste dominé par les mêmes thèmes haineux depuis la création
des nations arabes. Aujourd'hui, après 5 ans dans le 3ème
millénaire, aucune force libérale ni islamiste n'est près de prendre le pouvoir
dans les pays arabes. On émet des hypothèses
qu'un jour les choses changeront, toujours est-il que les régimes en place
tiennent et on ne devrait pas sous-estimer cette réalité.
L'Iran n'a pas de nationalisme arabe, ni une doctrine
nationaliste perse non plus. En Iran l'Islamisme est en place depuis bientôt 30
ans. Est-ce que ce système a montré son efficacité ? Bien sûr, certains groupes
en ont tiré un bénéfice matériel, d'autres semblent heureux de vivre sous cette
férule. Comme tous les régimes arabes, le régime islamiste d'Iran a créé une
série d'institutions, de mécanismes de propagande et de forces militaires pour
se maintenir. Et un régime qui perdure, malgré des difficultés telles que
celles qu'a rencontrées Téhéran, est à coup sûr un exemple d'une survie
réussie, ce qui est l'objectif politique principal.
Pourtant les dirigeants Iraniens, comme leurs
homologues arabes, ont failli à leur mission. Leur idéologie et leurs aventures
à l'étranger ne les ont pas menés très loin sur le plan de l'amélioration du
niveau de vie et de la solution des problèmes sociaux. Le mécontentement
populaire est général au Moyen Orient. Dans une certaine mesure, les échecs en
Iran ont discrédité l'islamisme comme la solution idéale et a fait germer des
mouvements de réforme démocratique que pourraient leur envier leurs homologues
dans les pays arabes. Ces réformateurs ont même réussi à gagner des élections
et à gouverner le pays. Mais les forces islamistes ont contre-attaqué en sévissant
contre ces réformateurs et en contrôlant les nouvelles élections de manière à
s'assurer la victoire et à revenir au statu quo ante. En fait les divisions des
réformateurs et le boycott des élections leur ont fait plus de mal que les
réactions islamistes…. En fin de compte le truquage des élections et des
promesses populistes fallacieuses ont amené la masse des pauvres à voter pour
le maire radical de Téhéran, Mahmoud Ahmadinejad qui a remporté la victoire.
Les forces islamistes ont réussi à utiliser des élections apparemment
démocratiques pour créer une fausse opposition dans ses rangs et mobiliser le
vote populaire pour un candidat qui dénonçait la corruption et l'incompétence
de ce même régime islamiste qui l'a soutenu et hissé au pouvoir. Les réformateurs
se sont fait avoir et le régime islamiste a non seulement survécu, mais il
s'est renforcé. Ayant mis son "protégé" à la présidence, le Guide
Suprême a maintenant tous les pouvoirs.
Quelle leçon pourront tirer les politiques Arabes de
cette élection en Iran? D'abord elle démontre la capacité du pouvoir établi à
se réinventer et à garder ses prérogatives, malgré tous les défauts et échecs
et malgré le mécontentement populaire.
Les régimes arabes ont toujours joué de l'argument
islamiste pour se maintenir au pouvoir. D'un côté ils se drapent du manteau de
l'Islam pour assurer leur légitimité et couper l'herbe sous les pieds
d'éventuels libéraux ou réformateurs. D'un autre côté ils agitent l'épouvantail
islamiste pour justifier leurs méthodes dictatoriales.
De crainte qu'ils ne basculent dans un régime du type
iranien, les peuples arabes acceptent le statu quo. Ainsi en Arabie ou en
Algérie où une terreur islamiste sévit, les peuples considèrent que leurs
dirigeants actuels sont "le moindre mal". En Syrie Bashar al Assad a
fait un pacte avec les Islamistes, leur permettant d'aller déstabiliser l'Irak
voisin et attaquer les forces américaines, moyennant quoi, il a une paix
relative chez lui. De la même manière, l'Autorité
Palestinienne joue du Hamas contre Israël.
Dans l'avenir de telles politiques peuvent faire
"boomerang", et, devenant si puissants, les islamistes pourront prendre le pouvoir,
même si à ce jour ils n'ont pas pu le faire. Même au Liban où un certain
progrès a été accompli dans la voie de la réforme, l'ancien ordre établi est de
retour sous prétexte de s'opposer à la Syrie.
Imaginez un instant que le régime soviétique ait pu
prolonger sa vie de 20 ans ou plus, en sortant de sa manche un jeune et
brillant populiste pour revitaliser le système!
The Iranian example
By BARRY RUBIN – jp - Jul. 5, 2005
There are three potential futures
for Arab countries: the Arab nationalist status quo, a pragmatic and moderate
democracy, or radical Islamism. The recent election in Iran – a place which
differs in many ways – tells a great deal about these alternatives.
Saudi Arabia, a monarchy with a
strong Islamist flavor, is quite different from Syria, a radical Arab
nationalist regime ruled largely by the Alawite minority. Lebanon and Iraq are
closer to democracy; Morocco is more of a traditionalist regime, and so on.
Clearly, too, there can be various apparent hybrids, like a democratic state
with Islamic parties. Nevertheless, the basic choice remains stark.
Despite 30 years of talk about
Islamist takeovers and five or so years of debate about liberal democracy,
every Arab state remains basically an Arab nationalist regime. The dominant
ideology is that nationalism and the battle against the West and Israel – held
to be the true culprits in all Arab problems – transcend differences over
political reform, economic modernization, interest-group goals, better
education and many other issues.
The emotional issues promoted by
nationalism are manipulated in an inciteful manner. No matter how much some
people may ridicule this system and privately point to its failure, public
discourse remains dominated by the same themes that have prevailed for decades.
Five years after the turn of the
century, however, no Islamist or liberal force is even close to overthrowing
any existing Arab regime. While we assume that some day things will change, the
existing system should not be underestimated.
IRAN HAS no Arab nationalism and not
even any separate doctrine of Iranian nationalism. Moreover, in Iran, Islamism
has been in power for a quarter-century. Has the system worked? As in Arab
states, it depends on what you mean by "worked." Some people have
benefited materially, others are happier living under this form of government.
Like Arab regimes, the Islamist state has built a whole range of institutions,
propaganda mechanisms and military forces to keep it in power. And a government
that has remained in power despite the difficulties Teheran's regime has faced
is certainly a success story of survival, the main goal in politics.
But, like Arab regimes, Iran's
rulers have misgoverned. Their foreign adventures and ideology have not raised
living standards or solved social problems. There is massive discontent. To
some extent these failures have discredited Islamism as the solution and grown
a democratic reform movement many times the size of its Arab counterparts. The
reformers have won elections and one of their leaders became president.
Facing such a serious challenge, the
Iranian regime counterattacked. It cracked down on reformers and tightened
control over elections to ensure a victory for the status quo. Still, divisions
among the democrats and their election boycott probably did more damage than
the regime's own actions. In the end, five candidates for president – a
tactically more moderate member of the Islamist establishment, two hard-liners,
and two reformers – split the vote almost exactly evenly. Electoral cheating by
the regime might have helped determine the outcome; but after a run-off, a
hard-line regime supporter won.
The victor, Teheran mayor Mahmoud
Ahmadinejad, emphasized populist issues and courted the poorest voters. The
government thus succeeded in a remarkable political ploy: It created an
Islamist "opposition" from its own ranks, mobilized popular support
for a candidate who condemned the regime's own corruption and incompetence, and
then put him in power. The reformers were outmaneuvered, and the regime
reinforced. The most extreme elements in Iranian society now have their own man
in office, though Supreme Guide Ayatollah Ali Khamenei will continue to
dominate the regime and pull the strings.
WHAT LESSONS do events in Iran have
for Arab politics? For one thing, they show the establishment's ability to reinvent
itself and retain power despite all its shortcomings and public discontent with
its policies. Arab regimes have long been doing this with the Islamist factor
in their own societies.
On the one hand, they wrap
themselves in the mantle of Islam to prove their own legitimacy and subvert
support for liberal reform. On the other hand, they point to the radical
Islamists as a threat justifying the existing dictatorship. Many people who
might otherwise back comprehensive reforms support the status quo, fearing the
alternative would be living in their own version of Iran. In countries facing
radical Islamist terrorism, like Algeria and Saudi Arabia, deciding that the
current rulers are the lesser of two evils is an enormous factor in keeping up
support for the regimes.
In Syria, President Bashar Assad has
made a pact with Islamists, helping them subvert neighboring Iraq and attack
American forces there in exchange for his own regime being left alone. In
Palestinian politics Yasser Arafat gave Hamas freedom to conduct his terror war
against Israel.
Such strategies can backfire in
future, with the Islamists becoming so strong they can seize power – though
this has not happened yet. Even in Lebanon, while it is an improvement, the old
establishment has now largely ridden back into power using the anti-Syria
issue.
Imagine how the Soviet regime might
have prolonged its life for 20 years or more by producing some bright young
communist populist who revitalized the system.
The writer is
director of the Global Research in International Affairs Center as well as
editor of the Middle East Review of International Affairs and Turkish Studies.