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JOUER PETIT CONTRE L’IRAN NE MARCHERA PAS

 

Par Mark Steyn - Jewish World Review  23 janvier  2006

http://www.jewishworldreview.com/0106/steyn012306.php3

Adaptation française de Simon Pilczer, volontaire de l’IHC, revue par www.nuitdorient.com

 

Je voudrais bien comprendre. D’un côté, nous avons un régime qui met la pression pour aller de l’avant avec son programme nucléaire, et dont le président a menacé d’effacer un autre Etat souverain de la surface de la carte.

Et de l'autre côté des pourparlers, nous avons le Secrétaire Principal de Sa Majesté britannique pour les Affaires Etrangères et le Commonwealth, un membre de "l’EU3",  (l’équipe franco-germano-britannique que Washington a laissée prendre la tête des négociations avec l’Iran), j'ai désigné Jack Straw qui a pris un grand soin pour souligner qu’aucune action militaire contre Téhéran n’était envisagée par lui ou par personne d’autre. Mais pour signaler aux mollahs qu'ils perdaient quand même patience, les officiels travaillant avec Straw ont indiqué "qu’ils se préparaient à considérer, qu’ils étaient prêts à considérer la possibilité d’envisager peut-être la considération d’une motion possible, pour envisager des sanctions devant le conseil de Sécurité de l’ONU, pour considérer la possibilité de considérer…."

Mais ne vous faites pas de souci, ils ne font pas grimper cette affaire plus haut qu’il n’est nécessaire. D’abord, la Grande-Bretagne envisage "des sanctions étroitement ciblées, telle qu’une interdiction de voyager aux dirigeants iraniens". On va leur montrer! Des missiles iraniens peuvent quitter l’espace aérien iranien, mais le ministre adjoint du commerce ne pourra pas, lui. Plus de voyages pour les collections de printemps ou pour skier à Gstaad, pour la liste "A" des ayatollahs. Pas besoin de le dire, le ministre adjoint allemand des affaires étrangères, Gernot Erler, a déjà averti même que cela pourrait aller trop loin, et que des sanctions pourraient bien faire plus de mal à l’Europe qu’aux Iraniens. Peut-être que dans ce jeu du "bon contre le méchant flic", Herr Erler pourrait aimablement suggérer aux voyous de coopérer, ou bien qu'il serait obligé d'envoyer son pote Jack Straw pour déchirer les tickets qu'on leur avait offerts pour la "première" de Michael Moore, au festival du cinéma de Cannes.

Mais si j’étais le président Ahmadinejad ou même un ayatollah parmi les plus farfelus, je retournerais dans ma tête les enfantillages de l’UE en me disant : "Bingo! Si c’est là le respect qu'ils nous témoignent, avant même que les têtes nucléaires ne soient totalement opérationnelles, imagine-toi comment ils nous traiteront alors l’an prochain".

À propos, l’hypothèse que la charge nucléaire ne sera pas prête avant trois ou quatre ans, rapportée par la presse européenne, est ridiculement optimiste. Et toute stratégie Occidentale qui consomme du temps est en faveur du régime.

Après tout, l’expérience pédagogique du président Ah-mais-netenvapasdici a été sa participation à la prise de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran en 1979. Je crois que c’était Andreï Gromyko qui avait observé que, si ces étudiants avaient monté le même coup à l’ambassade soviétique, Téhéran aurait été transformé en cratère, dès l’heure du déjeuner.

 

Alors que peut-on faire ? Dès à présent, l’Iran peut compter sur au moins deux veto au Conseil de Sécurité, contre toute action significative de la "communauté internationale". Il en est de même pour ceux qui penchent pour la voie unilatérale. La difficulté pour les Etats Unis et Israël est qu’il n’y a vraiment pas de solution du problème, de type Osirak – une frappe chirurgicale rapide, aller et retour. Dans la plupart des estimations, il y a une évaluation d'au moins deux cents sites potentiels, largement disséminés sur des territoires très variés, depuis les forteresses montagneuses éloignées, jusqu'aux banlieues résidentielles. Pour les neutraliser tous, il faudrait une campagne de bombardement continu pendant plusieurs semaines, avec des dommages collatéraux tels qu'écoles, hôpitaux, etc…, qui seront couverts en long et en large par CNN et la BBC. Pendant ce temps, le sud shiite irakien se transformerait en un autre triangle sunnite pour les forces de la coalition.

 

Chaque défi au monde civilisé commence par une mise à l'épreuve de sa volonté – et au cours de l’histoire récente des Iraniens, depuis la chute du Shah et le siège de l’ambassade jusqu’à "l’insurrection" irakienne, et les brefs extraits enregistrés de Jack Straw --  ce défi leur indique que l’Occident ne peut rassembler la force et la volonté nécessaires pour les obliger à reculer.

Mais après la déstabilisation de l’Irak par l’Iran et son parrainage des groupes terroristes du Liban et de l’Autorité Palestinienne, et avec un budget américain du renseignement de 44 milliards de $, il ne devrait pas être difficile de trouver assez d’argent disponible pour donner un avant-goût de leur propre médecine à ces Iraniens. Après tout qui aime le régime de Téhéran ? Les gouvernements Russe, Chinois, Nord Coréen et l’obséquieux Straw, semble-t-il. Mais il est moins évident que le Peuple iranien soit de cet avis. La majorité de la population d’Iran est plus jeune que la Révolution. Qu’ils soient ou non pro-américains, comme on le prétend parfois, il n’ont pas de souvenirs du Shah. Tout ce qu’ils ont connu, c'est une république islamique délabrée où le taux de chômage est actuellement de 25 %. Si la guerre éclate, ces jeunes gens en surplus seront en uniforme pour défendre leur patrie. Pourquoi ne pas exploiter leur excès d’énergie dès à présent ? Comme les terroristes étrangers l’ont démontré en Irak, on n’a pas besoin d’un soutien local important pour donner l’impression d’une insurrection populaire (aux moins aux gauchistes occidentaux). Ne serait-il pas faisable de changer de direction et de transformer des dissidents quelque peu léthargiques en quelque chose de plus vivant ? S’ils peuvent nous déstabiliser, pourquoi ne pourrions-nous pas les déstabiliser ? Occupé à une répression interne, Téhéran trouvera plus difficile de hisser ses prétentions au statut de superpuissance régionale.

Qui d’autre pourrions-nous provoquer ? Eh bien, avez-vous lu cette histoire dans le Sunday Telegraph britannique ? Huit gardes frontières du régime ont été kidnappés et menacés de décapitation par un groupe sunnite fanatique dans le Balouchistan iranien. Je suis d’avis que les shiites soient à long terme un bien meilleur pari comme Musulmans réformables, mais comme il y a 6 millions de sunnites en Iran et qu’ils forment la majorité dans certaines provinces, ne serait-il pas possible de donner au régime son propre triangle sunnite pour le plonger dans un bourbier du style Vietnam ?

Aucune option n’est sans risque, bien que certains risques soient exagérés, y compris la colère de la région contre toute action occidentale. Comme l’Egypte et l’Arabie saoudite l’ont montré, il n’y a pas beaucoup de régimes arabes sunnites qui souhaitent vraiment vivre sous le parapluie nucléaire d’une superpuissance shiite perse. Et pour le chef le plus sensible à cette perspective, une raison supplémentaire de faire déraper le jeune Assad à Damas, c’est de souligner qu’il aura un prix à payer en étant trop "gentil" avec Téhéran.

Que le Secrétaire d’Etat britannique dorlote les mollahs est particulièrement indigne, dans la mesure où l’Iran a une stratégie : le conseiller principal du président, Hassan Abbassi, l’a fondée  sur l’hypothèse que "la Grande-Bretagne est la mère de tous les maux", les maux étant l’Amérique, l’Australie, Israël, et les Etats du golfe, qui sont tous la progéniture de l’Empire britannique.

 

Le croit-il vraiment ? Eh bien, chaque risque doit être pesé contre la certitude que l’Iran utiliserait sa capacité nucléaire de la même manière qu’elle a déjà utilisé ses autres capacités, en soutenant des groupes terroristes qui opèrent contre ses ennemis. Dans ce sens, que l’Amérique soit ou non en guerre avec l’Iran, l’Iran est déjà en guerre contre l’Amérique.