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NERVOSITE SECURITAIRE
AIDANT, SUITE AUX ELECTIONS,
LES MILITAIRES
VIENNENT AU POUVOIR EN IRAN
Par Amir Taheri, journaliste et écrivain
New York
Post du 19 mars 2008.
Traduction
Artus pour www.nuitdorient.com
Voir aussi les 50 derniers articles & L'Iran des Mollahs a des Visées Hégémoniques sur le Moyen Orient
L'Union
Européenne a rejeté vendredi dernier les élections parlementaires en Iran comme
étant une farce, alors que les Etats-Unis les décrivaient comme une parodie.
Quelles que soient les appréciations de l'Occident, ce vote a donné un
éclairage important sur l'équilibre des pouvoirs à Téhéran.
Les
élections de la République Islamique ressemblent aux primaires américaines. Les électeurs choisissent parmi des candidats
présélectionnés, enquêtés et approuvés par les autorités. Le système est basé
sur le principe que du fait que tous les candidats sont loyaux envers le Guide
Suprême et lui ont juré fidélité et obéissance, peu importe qui gagne. Sur le
plan pratique néanmoins, les choix offerts par le régime et les choix faits par
les électeurs peuvent avoir un sens.
Les choix
offerts par le régime expriment les besoins et les soucis du moment. Au début
du régime des ayatollahs, en 1980 et en 1984, les choix offerts reflétaient un
besoin de consolidation du régime autour d'un noyau dur de mollahs. A la fin de
la guerre Irak-Iran en 1988, le régime cherchait à attirer les classes moyennes
en présentant des universitaires et des hommes d'affaires comme candidats,
parallèlement aux inévitables mollahs. La tendance s'est poursuivie jusque dans
les années 90, le régime cherchant à asseoir une base populaire, en choisissant
des candidats acceptables localement.
Les
dernières élections indiquent 2 tendances.
La
première tendance
montre un sentiment croissant d'insécurité. En dépit de l'attitude provocante
du président Ahmedinejad, le pouvoir khomeyniste
craint une attaque militaire des Etats-Unis, d'Israël ou des deux. La
République Islamique se sent cernée par l'appareil militaire américain dans 12
pays voisins sur 15 au Moyen Orient. Ce sentiment d'insécurité est accentué par
les troubles dans des provinces où les éléments minoritaires ethniques Kurdes, Balouches, Arabes et Turkmènes montrent des signes de
révolte contre le gouvernement central. Les élections ont démontré que le
besoin de sécurité était urgent, puisque le Corps des Gardes Révolutionnaires
Islamiques (CGRI) a dominé le processus et a rempli l'Assemblée Consultative (Majlis) avec ses officiers d'active ou à la retraite. Le
score électoral montre que le CGRI occupe quelques 70% des sièges.
Le CGRI a
présenté des candidats sous 3 factions. Le contingent le plus grand considère Ahmedinejad comme chef, et il est entré en lice sous la
désignation de "fondamentaliste", avec 100 candidats élus sur 290
sièges au Majlis. La 2ème faction est
menée par le maire de Téhéran Mohamed Baqer Qalibaf, un général du CGRI qui a réuni 30 sièges. La 3ème
faction qui a conquis une vingtaine de sièges est entrée sous la direction d'un
ex-commandant du CGRI le général Mohsen Rezal et elle est appuyée par Ari Larijani,
ex-négociateur nucléaire.
Au moins
la moitié des candidats élus sous l'étiquette "indépendants" sont des
membres actifs ou retraités du CGRI ou des services de sécurité liés à lui. Sur
les questions cruciales, ils voteront avec les militaires. Trente sièges iront
à des éléments proches de l'ex-président Ali-Akbar Hashemi
Rafsanjani. Ceux-ci se considèrent comme des
"réformistes" et promettent de former le noyau de l'opposition à Ahmedinejad.
Ainsi, au Majlis, le nombre de membres du CGRI sera deux fois plus
important que celui des mollahs. Utilisant les élections comme moyen de purger
le régime, le CGRI a éliminé nombre de personnes liées à la révolution de 1979.
La plupart des mollahs de cette époque ont disparu, notamment ceux qui se sont
faits un nom lors de la prise d'otages à l'ambassade américaine. Même les
proches du clan Khomeyni n'ont pas eu de siège au Majlis.
En bref,
la République Islamique a suivi le chemin de nombreux régimes du tiers monde en
abandonnant ses illusions populistes et en s'appuyant de plus en plus sur
l'appareil militaire et sur les services de sécurité. Comme toute autre
révolution, celle de Khomeyni a vendu son âme aux
militaires, dans l'espoir d'assurer sa propre sécurité.
La
seconde tendance
qui ressort des élections est que la politique européenne d'encouragement au
changement, récemment évoquée aussi par le président Bush, a eu l'effet
inverse. Loin de montrer un désir de changement sur les sujets les plus
importants, y compris le nucléaire, la République Islamique a produit l'Assemblée la plus
radicale dans son histoire.
Soutenue
par le Congrès, l'Administration américaine a mis l'an dernier le CGRI sur la
liste des organisations terroristes. Plus tard, le Conseil de Sécurité des
Nations Unies a nomme plusieurs commandants du CGRI comme personae non grata.
Les nombreuses banques et sociétés appartenant au CGRI ont vu leurs avoirs
gelés dans 40 pays, y compris l'UE et les Etats-Unis.
Le message
de Téhéran est clair: si vous voulez traiter avec la République Islamique, il
faut parler au CGRI. Bien qu'aucun Bonaparte n'ait émergé encore, le béret
militaire remplace clairement le turban au sommet de la politique en Iran.