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L'Offensive Européenne pour la Paix n'est pas Réaliste
Par Pr Efraim Inbar, professeur d'études politiques à
l'université Bar Ilan, directeur au Centre d'études stratégiques Begin-Sadate
Traduit par Albert Soued, http://soued.chez.com pour www.nuitdorient.com
Tel Aviv le 3 juin 2015
Résumé
Les intentions européennes sont à louer, mais sont très éloignées
des réalités du terrain au Moyen Orient. Le partage de ce minuscule territoire
d'Israël entre Juifs et Arabes est souhaitable, mais le mouvement national
palestinien a prouvé à plusieurs
reprises qu'il n'était pas le bon partenaire pour réaliser cette partition, et
il est largement responsable de l'échec de la solution à 2 états. Aujourd'hui,
il n'y a pas d'autre issue que la gestion du conflit pour avoir une chance de réduire
la souffrance des deux côtés et parvenir à un minimum de stabilité dans le
chaos moyen oriental.
--
Au bout d'un siècle,
les Européens ont décidé que le conflit arabo-israélien en Terre Sainte devait
prendre fin. Federica Mogherini, représentante de l'Union Européenne (UE) pour
les Affaires Etrangères, est venue en Israël pour faire connaître l'impatience
de l'UE vis à vis de l'impasse des négociations. La France a signalé son
intention de porter l'affaire devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies
dans un délai de 18 mois, pour fixer les paramètres d'une solution du conflit.
Les intentions européennes sont à louer, mais sont très éloignées
des réalités du terrain au Moyen Orient. Le partage de ce minuscule territoire
d'Israël entre Juifs et Arabes est souhaitable,
mais le mouvement national palestinien a
prouvé à plusieurs reprises qu'il n'était pas le bon partenaire pour réaliser
cette partition, et il est largement responsable de l'échec de la solution à 2 états.
Ce mouvement semble incapable d'atteindre un compromis historique avec le
mouvement sioniste. Il insiste encore pour contrôler en toute exclusivité le
Mont du Temple, pour appliquer la "loi du retour" pour ses réfugiés,
pour éliminer toute présence juive en Judée-Samarie.... Son système médiatique
et d'éducation perpétue le conflit en enseignant la haine du Juif et en dénigrant
tout lien du Juif avec la Terre d'Israël.
Le fossé qui sépare Israéliens et Palestiniens s'élargit
de plus en plus et ne peut être réduit en un clin d'oeil. Il est totalement irréaliste
de s'attendre à un accord sur les points essentiels, à court terme.
Les conflits ethnico-religieux prennent fin d'habitude
quand une partie au moins montre une certaine lassitude. Mais l'amère vérité
est que les sociétés israéliennes et palestiniennes ont encore beaucoup d'énergie
pour se battre pour ce qu'elles considèrent comme important. L'Europe éprouve
beaucoup de difficulté à comprendre que la paix n'est pas encore une valeur
importante pour les 2 parties.
De plus, les Palestiniens n'ont pas réussi à saisir les
opportunités offertes pour construire un état. L'échec le plus cinglant a été
la perte du monopole d'usage de la force, lors de la perte par Ramallah de la
bande de Gaza, au profit du Hamas en 2007. Tant que le Hamas joue un rôle
central dans les affaires palestiniennes, il n'y aura aucune possibilité de réconciliation
avec Israël. Ce qu'on constate sur le territoire palestinien est un reflet du
monde arabe, la disparition des structures étatiques. La culture politique
arabe semble incapable d'arriver à bout des différences d'identités tribales,
ethniques ou sectaires, pour pouvoir établir un état.
L'Autorité Palestinienne (AP) en Cisjordanie n'est pas
différente des autres entités arabes, comme la Libye, l'Irak, la Syrie, le Yémen...,
incapables de gouverner sur leur territoire.
L'AP et son gouvernement ne survivent que grâce aux baïonnettes
israéliennes, qui les protègent des extrémistes qui ne cherchent qu'à renverser
le pouvoir illégitime de Mahmoud Abbas, non réélu. Ceci est la base de la coopération
sécuritaire entre l'AP et Israël. Sur le plan économique, l'AP est aussi dépendante
d'Israël et de la coopération de celui-ci avec les pays donateurs.
Mais surtout l'AP refuse d'accepter Israël comme un état
juif, et c'est le principal sujet de discorde dans l'histoire du conflit
arabo-israélien.
Sous l'autorité du 1er ministre Menahem Begin, Israël a
reconnu en 1978, les droits légitimes du peuple palestinien, mais il n'y a
jamais eu depuis de reconnaissance réciproque. De plus, l'islamisme croissant
dans la société palestinienne, à l'image de toute la région, empêche tout progrès
dans ce domaine. Les Palestiniens nient en outre tout droit légitime du peuple
juif sur la Terre d'Israël et ceci entraîne le renforcement du consensus israélien
sur le fait que le pays n'a pas de partenaire sérieux pour faire la paix.
Le chaos dans le monde arabe a aussi durci les positions
d'Israël dans les négociations. En effet dans ces conditions toute situation
politique peut changer au gré du vent, mettant en danger le pays et la sécurité
des frontières devient un impératif intangible. Ainsi la présence juive le long
du Jourdain est une nécessité vitale. Il est regrettable que les Palestiniens
n'aient pas actualisé leurs positions pour tenir compte des changements
survenus dans la région. Mais leurs revendications maximalistes oblitèrent tout
réalisme politique et créent l'impasse dans tout règlement du conflit. Dans ces
conditions, ladite "solution à 2 états" dont tout le monde semble désirer,
est totalement irréaliste, en toute simplicité.
L'an dernier, le 1er ministre Benjamin Netanyahou a
accepté avec réticence un document de travail soumis par les Américains pour
sauver la situation. Mahmoud a refusé cette initiative, mettant fin à tout
effort diplomatique américain. Même la dernière concession israélienne --
volonté de négocier les limites des blocs d'implantations-- n' a pas satisfait
les Palestiniens. Tout au long des années, ceux-ci ont rejeté toutes les offres
généreuses faites par Barak en 2000, Olmert en 2008, et Netanyahou ne peut pas
faire mieux qu'il n'a déjà fait.
Ainsi une résolution du conflit est illusoire. On ne peut
parvenir qu'à des accords intérimaires, tacites ou formels, à condition qu'ils
ne mettent pas en péril la sécurité du pays. La gestion du conflit est la seule
approche réaliste pour réduire les souffrances des 2 parties et parvenir à
un minimum de stabilité dans le chaos
environnant.
L'offensive européenne pour imposer une paix est un exercice
diplomatique futile qui ne peut qu'échouer, même s'il est l'occasion de
forums successifs. Mais ces échecs ne semblent pas décourager des diplomates
dont c'est la raison honorable de vivre. Le Quartet essaiera lui aussi de
donner un coup de main. Nous souhaitons à tous bonne chance ...