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La Libye, la Jordanie et les Histoires d'Obama
Par Caroline B. Glick
18/10/2012 - Jerusalem Post
Traduit par Albert Soued, écrivain http://soued.chez.com pour www.nuitdorient.com
Le fiasco des opérations, du renseignement et de la
politique qui ont conduit à l'assaut jihadiste du consulat américain à
Benghazi, Libye, le 11/09/12, et les autres fiascos qui ont suivi, tous
dérivent du même problème. Ce problème est l'échec du "cadre conceptuel"
du Président américain Barack Obama pour comprendre le Moyen-Orient.
La vague révolutionnaire islamique envahissant le monde arabe a déchiré en morceaux
les fondements du système d'alliance des Etats-Unis au Moyen-Orient. Mais du
fait de l'engagement idéologique d'Obama dans "un cadre conceptuel
anti-Américain" pour comprendre la politique du Moyen-Orient, son
administration ne peut pas voir ce qui s'y produit réellement. Ce "cadre conceptuel"
porte le blâme de toutes les pathologies du monde musulman sur les Etats-Unis
et Israël.
Tout ce qu'Obama et ses conseillers peuvent percevoir, c'est qu'il y a beaucoup
de gens en désaccord avec eux. Et en conséquence, ils ont dû adopter une attitude
politique pour délégitimer, discréditer et faire taire leurs adversaires. À cet
effet, cette administration a purgé le lexique du gouvernement fédéral américain
de tous les mots qui sont nécessaires pour décrire la réalité moyen orientale. "Jihad",
"Islamiste", "Islam radical", "terrorisme
islamique" et toute expression similaire sont proscrites du vocabulaire
administratif. L'étude de la doctrine islamiste par les fonctionnaires de
gouvernement est également interdite.
La dernière victime de cette manière de percevoir le monde est un instructeur à
l'école d'Etat-Major des forces armées à Norfolk, Virginie. Jusqu'à ce qu'il
ait été renvoyé cette semaine, cet instructeur enseignait dans une classe
appelée les "perspectives en Islam et le radicalisme islamique". Selon
Col. Dave Lapan, le porte-parole du général Martin Dempsey, Président du Collège
des Chefs d'état-major des Etats-Unis, l'instructeur a été viré pour avoir
commis "un crime de la pensée".
Il avait dépeint l'Islam d'une manière négative.
Dempsey lui-même a demandé qu'on vérifie tous les cours sur l'islam, dans tout
le système d'éducation militaire des Etats-Unis…!
Le refus de l'administration d'accepter le simple fait que
les régimes et les forces montantes islamiques
à travers le monde musulman menacent aujourd'hui les intérêts des Etats-Unis
n'est pas le seul échec conceptuel.
Un autre échec, dérivant également de l'adoption par Obama d'une politique
étrangère anti-Américaine et anti-Israélienne, est également dévastateur pour
la région. Et comme l'échec conceptuel a mené à l'attaque meurtrière du consulat
des USA à Benghazi, ce même échec conceptuel reviendra également hanter
l'Amérique. Ce deuxième faux cadre conceptuel est la narration que la source de
l'instabilité dans la région est l'absence de traités formels de paix entre Israël
et ses voisins arabes. Il montre que le moyen d'apaiser les forces régionales
radicales est de faire pression sur Israël pour que ce pays fasse des
concessions territoriales et perde de sa légitimité vis-à-vis de ses voisins
arabes.
Obama n'est pas seul dans l'adoption d'un tel cadre conceptuel pour la
politique des Etats-Unis au Moyen-Orient. Il est juste un peu en retard par
rapport à une longue file de présidents américains qui l'avaient l'adopté
auparavant. Il se trouve que ce concept -- les processus et les traités de paix
assurent la paix et la stabilité -- s'est totalement effondré pendant le mandat
d'Obama. Mais ce qui fait d'Obama un cas unique, c'est qu'il est le premier
président à s'accrocher à cette politique, alors que la réalité du terrain
montre qu'elle est entièrement discréditée.
Israël a signé quatre Traités de paix avec ses voisins arabes. Il a signé des
traités avec l'Egypte, la Jordanie, OLP et le Liban. Tous ces traités ont
échoué ou sont rendus sans signification par les événements qui ont suivi.
Aujourd'hui, le Traité de paix de 31 ans d'Israël avec l'Egypte est une
coquille vide. Non, le nouveau régime de la Confrérie Musulmane d'Egypte ne l'a
pas officiellement abrogé. Mais l'arrivée au pouvoir des Frères Musulmans, confrérie
antisémite jusqu'au génocide, l'a rendue sans signification.
Le traité n'est plus crédible, parce que la Confrérie, y compris le Président
égyptien Mohamed Morsi, nient le droit d'exister à Israël. Leur rejet du droit
d'exister d'Israël n'est pas une position essentiellement politique, mais
religieuse. Morsi et son régime perçoivent les Juifs comme des ennemis d'Allah
qui méritent l'annihilation.
Morsi lui-même a un passé riche de déclarations montrant cela. Par exemple, en
novembre 2004 il a dit "le Coran a établi que les juifs sont au degré
d'hostilité le plus élevé envers des
musulmans". Il a poursuivi, "il n'y a aucune paix possible
avec les descendants des singes et des porcs"
En janvier 2009, Morsi a traité les Israéliens "de Draculas qui ont
toujours faim de plus de massacre et le carnage, utilisant toutes sortes
d'armes de guerre modernes fournies par l'administration américaine".
Il a accusé les Israéliens de "semer les graines de la haine entre les hommes"
Avec des positions comme celles-ci, Morsi n'a aucun besoin de déclarer mort le
Traité de paix pour lequel Israël a rendu la
péninsule du Sinaï, et avec elle, sa capacité de dissuader et de bloquer
des invasions venant du sud. Sa mort est évidente en soi.
La paix a été signée avec un régime. Et une fois que le régime a disparu, la
paix était terminée. Le fait que la paix soit liée à la survie du régime qui
l'a signée était tout à fait prévisible.
En 1983, Israël a signé un Traité de paix avec le Liban. Le traité a été abrogé
dès que le régime qui l'a signé a été renversé par les radicaux islamiques et
la Syrie.
Puis, il y eut la paix avec l'OLP. Cette paix – ou plutôt le processus de paix
– a été officiellement déclenchée par la signature de la Déclaration de
principes, sur la pelouse de la Maison Blanche, le 13 septembre 1993.
Aujourd'hui, l'administration d'Obama est amenée à s'opposer aux tentatives de
Mahmoud Abbas, chef de l'OLP, de recevoir la reconnaissance internationale d'un
état palestinien, en élevant son statut à l'ONU, comme état non membre. Lundi, l'ambassadeur
des Etats-Unis à l'ONU, Susan Rice a expliqué que l'administration d'Obama
s'opposait à la démarche de l'OLP parce qu'elle pensait qu'elle "compromettait
le processus de paix". Mais ceci n'est pas une raison crédible pour
s'opposer à la démarche. La raison profonde devrait être que la démarche
d'Abbas nuit à Israël. Le processus de paix est mort. Il est mort parce que
c'était une fraude. Parce que dès le début les Palestiniens étaient de mauvaise
foi. Il est mort parce que l'Autorité Palestinienne (AP) a perdu la bande de
Gaza à l'avantage du Hamas, en 2007. Il est mort parce qu'Abbas et son AP n'ont
aucune capacité de faire la paix avec l'Israël, même s'ils l'avaient voulu – mais
ils ne l'ont jamais voulu. C'est ainsi parce que leur peuple n'acceptera jamais
une coexistence pacifique avec Israël. Le mouvement national palestinien a, non
pas le désir de créer un état palestinien, mais le désir de détruire l'état
juif.
Abbas l'a dit clairement – encore une fois – cette semaine
dans une déclaration publiée sur sa page officielle de Facebook. Là il a dit sans
détour que "sa revendication qu'Israël occupe illégalement le
territoire palestinien ne s'applique pas seulement à la Judée et à la Samarie,
mais aussi, qu'elle s'appliquait à tous les territoires qu'Israël a occupés
avant juin 1967".
Avec des partenaires de paix comme ceux-là, il est bien d'évident qu'Israël ne
peut rien faire d'autre qu'un suicide national pour les satisfaire.
Ceci nous amène à la Jordanie. La Jordanie est l'une de ces histoires dont
personne ne veut parler, parce qu'elle détruit tous les mythes imaginés à
propos des relations israélo-arabes, de la popularité relative de l'Islam
jihadiste et de l'avancée des options américaines.
Le royaume hachémite de Jordanie se compose de trois groupes de population. Les
Palestiniens ethniques forment la majorité des habitants de la Jordanie. Les
Hachémites ont toujours considéré les Palestiniens comme une menace pour le
régime, et c'est pourquoi ils ont bloqué leur entrée dans le gouvernement et
les hiérarchies militaires. Ces Palestiniens ont toujours été opposés à
l'existence d'Israël.
Le deuxième grand groupe de Jordaniens est constitué des tribus bédouines.
Jusqu'à la dernière décennie, les tribus bédouines de Jordanie, comme celles d'Israël
et du Sinaï, n'étaient pas particulièrement religieuses, et elles n'étaient opposées
pas en soi à une coexistence pacifique avec Israël.
Les Bédouins israéliens servent dans l'armée en grand nombre. Les Bédouins du
Sinaï ont servi dans l'administration civile d'Israël au Sinaï et se sont
opposés au Traité de paix qui les mettait de nouveau sous la tutelle égyptienne.
Et les Bédouins de Jordanie ne se sont pas opposés, mais ont largement reconnu
l'alliance stratégique secrète de la monarchie avec Israël.
Toute ceci a changé pendant les dernières 10/15 années du fait que les Bédouin
de la région ont subi un processus drastique de radicalisation islamique.
Aujourd'hui les Bédouins du Sinaï sont derrière la violence jihadiste. Les Bédouins
d'Israël soutiennent de plus en plus les causes de l'irrédentisme, de l'Islam
radical et du Jihad. Et les Bédouins de Jordanie sont bien plus opposés à la
coexistence pacifique avec Israël que les Palestiniens.
Il reste les Hachémites. Un petit clan d'Arabie installé au
pouvoir par les Anglais, les Hachémites ont historiquement considéré Israël comme
un partenaire stratégique et un protecteur de leur régime.
Depuis la chute du régime de Moubarak, le Roi Abdallah II de Jordanie a été
soumis de plus en plus à des contraintes dues aux événements régionaux et aux changements
chez lui. La montée des Frères Musulmans en Egypte a renforcé la Confrérie en
Jordanie. La montée des forces shi'ites pro-Iraniennes en Irak, après le
retrait américain, a fait de la Jordanie pro-Occidentale une cible attrayante
pour les jihadistes, triomphants de l'autre côté de la frontière. La montée des
forces islamistes dans l'opposition syrienne, sans compter les activités
subversives constantes effectuées par des agents syriens, a limité encore plus les
possibilités de manoeuvre de la Jordanie.
Encouragés par toutes ces forces, les Bédouins jordaniens sont aujourd'hui en
révolte ouverte contre la monarchie et son refus d'abroger
le Traité de paix avec Israël.
Cette révolte a montré toute sa laideur lors des dernières semaines qui ont suivi
la nomination par Abdallah de Walid Obeidat, comme nouvel ambassadeur de
Jordanie en Israël.
Dans cette situation, la valeur stratégique du traité de
paix d'Israël a été détruite. Même si Abdallah a souhaité se tourner vers
Israël comme protecteur stratégique, comme l'a fait son père, le roi Hussein en
1970, au moment de la guerre civile des Hachémites contre les Palestiniens, lui
ne peut pas. En 1970, les Syriens partageaient l'antipathie de
Hussein vis-à-vis de Yasser Arafat et de l'OLP et ne sont donc pas intervenus
en leur faveur. Aujourd'hui, aucune force arabe ne le soutiendra dans un combat
soutenu par Israël contre les fondamentalistes islamiques.
Peut-être que reconnaissant la fragilité du pouvoir des Hachémites, les
Etats-Unis ont déployé la semaine dernière des forces militaires pour protéger
le royaume. Selon les médias, ces forces se composent de quelques centaines de
conseillers et d'équipes chargées d'aider la Jordanie à contrôler les 200.000
réfugiés venant de Syrie et qui ont afflué à la frontière, depuis le début de
la guerre civile en Syrie, et pour aider à sécuriser les arsenaux chimiques et
biologiques de la Syrie. Il est plus que probable que ces forces sont également
en place pour évacuer les Américains, dans le cas où le régime s'effondrait.
Dans la situation actuelle, les États-Unis ont très peu de bonnes options
stratégiques. Mais ils ont un pari sûr. Aujourd'hui, les Etats-Unis n'ont plus
qu'un seul allié au Moyen-Orient auquel ils peuvent faire confiance: Israël. Et
la seule démarche sans risque qu'ils peuvent faire, c'est de tout faire en leur
pouvoir pour renforcer Israël.
Mais pour adopter cette politique, les Américains doivent d'abord se défaire de
leurs faux concepts sur le Moyen-Orient. Malheureusement, comme la réponse
américaine à l'attaque de Benghazi et les agressions continues contre Israël l'ont
montré clairement, il n'y a aucune chance que cela se produise, aussi longtemps
qu'Obama reste à la Maison Blanche.