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opposition
politique, réforme, Assad, régime totalitaire, pauvreté
Par Farid Ghadry, président du parti de la réforme de Syrie
À l'Assemblée Nationale le 13 septembre 2004
Merci d'être venus si nombreux ce soir pour nous écouter.
Merci à Claude Goasguen et à l'Institut Jean jacques Rousseau (Michel
Gurfinkiel) de nous avoir invités. Merci à tous les Syriens qui nous honorent
ce soir de leur attention. Et permettez moi, sur un plan personnel de me
féliciter de la présence de ma femme à mes côtés. Je trouve force et
persévérance dans son soutien et dans ses encouragements.
Un humoriste syrien avait l'habitude de raconter la blague suivante:
"Mettez 3 Syriens ensemble dans une salle et ils formeront 4 partis
politiques. Chacun voudra créer son propre parti pour exprimer ses propres
convictions. Mais comme c'est dangereux, ils préféreront adhérer à un 4ème
parti."
Avant de commencer à parler de notre vision du changement en
Syrie, je voudrais d'abord vous parler brièvement du Parti de la Réforme de
Syrie.
Le Parti de la Réforme de Syrie a été fondé après les
événements du 11 septembre par des Syriens vivant dans la diaspora. Il est une
expression de l'alternative au Parti Baa'th et aux Islamistes. Nous sommes un
groupe politique oeuvrant pour la démocratie et qui appelle avec force au
renversement de l'actuel régime syrien.
Pourquoi? Parce que le régime des Assad à Damas ne peut être
amendé et nous devons arrêter l'hémorragie qui dure depuis 41 ans, sous la
férule baa'thiste.
Notre parti se développe rapidement. Radio Syrie libre a
commencé à diffuser cet été et nous envisageons le démarrage d'une Télévision
Syrie libre l'an prochain. Nous sommes ouverts à toute véritable opposition au
régime d'Assad et nous souhaitons œuvrer au sein de "la Coalition
Démocratique Syrienne", avec tous ceux qui veulent mettre en plkace
une démocratie pluraliste et pluripartis dans notre pays, un régime où la loi
ets au dessus du pouvoir et où toutes les opinions puissent s'exprimer. Nous
sommes prêts à rejoindre toute coalition ayant les mêmes buts.
Il suffit
de visiter les Châteaux de la Loire, ou les vignobles de la région bordelaise,
ou les industries du Clermontois par exemple, pour comprendre pourquoi la
France est devenue une grande nation. La France jouit dans le monde entier
d'une plus grande réputation que toute autre nation de sa dimension. Nous
Syriens nous vous envions! Alors que vous avez eu des femmes telles que Marie
Curie, nous, en Syrie, nos femmes sont illettrées et souffrent des oppressions
d'un d'une société malade sous un régime totalitaire. Alors que votre jeunesse
s'exprime librement, la nôtre sont est muselée. Alors que vos médecins et vos
chercheurs excellent chez eux, les nôtres émigrent pour trouver ailleurs une
vie meilleure. La grandeur de la France vient d'une démocratie solide qui a
permis à la nation de prospérer et de devenir une puissance dans le monde
d'aujourd'hui.
Nous le Parti de la Réforme de Syrie, "la
Coalition Démocratique Syrienne" et tous les Syriens de la diaspora,
nous demandons à la France et au Président Jacques Chirac à se tenir à nos
côtés et à nous aider à instaurer la démocratie en Syrie.
À un moment où certains s'interrogent sur les limites de la
politique américaine au Moyen Orient, la France a un rôle historique à jouer.
Elle doit saisir cette opportunité. Il est grand temps que la France ait au
Moyen Orient une politique réaliste, une vision globale et qu'elle le fasse
savoir
Le Parti de la Réforme de Syrie vient d'envoyer une
lettre au Président Chirac pour lui demander de mettre en place une politique
nouvelle à l'égard du gouvernement syrien actuel, compte tenu de son
comportement international et de son attitude à l'égard de sa propre
population. Nous avons aussi demandé que la France prenne des initiatives en vue d'instaurer la
liberté et la démocratie, dans l'ensemble du Moyen Orient. Le Parti de la
Réforme de Syrie espère rester en contact avec l'Elysée sur ce sujet.
Nous avons une nation de 18 millions d'habitants qui, pour
la majeure partie, vit dans la pauvreté. La Syrie est classée comme la 106ème
nation sur l'Index de développement humain de l'Onu; c'est à dire dans le
dernier tiers; si on met de côté l'Afrique, la Syrie se retrouverait dans les
derniers 8%. Pour vivre et parce qu'ils ne trouvent pas d'emplois en Syrie, un
million de Syriens s'expatrient au Liban pour y occuper des emplis non
qualifiés. Le secteur privé est littéralement "privé", puisqu'il est
détenu par une coterie proche des Assad.
De telles conditions économiques engendrent la violence, comme
un marécage génère des moustiques. La politique du parti Baa'th provoque la
violence et l'extrémisme, y compris l'islamisme. Le régime baa'thiste prétend
combattre l'islamisme, mais en fait il s'en sert pour justifier son maintien.
Les Syriens de moins de 40 ans, soit 70% de la population,
ont été conditionnés par l'idéologie baa'thiste, née dois-je le rappeler dans
l'esprit de Michel Aflaq, qui a vécu à Paris dans les années 30, mais dont le
véritable modèle était l'Allemegne nazie. Résultat: Un nationalisme exacerbé,
la haine de quiconque n'est pas baa'thiste, une éducation de troisième zone,
voilà les marques de qualité laissées par ce parti dans notre génération
perdue.
Les plus riches, les intellectuels, et la vieille génération
de syriens échappent, il es vrai à cette malédiction. Les uns veulent
construire une vraie démocratie. Les veulent renouer avec un passé arabe
glorieux. Cette mosaïque peut paraître un peu déprimante, mais néanmoins le
Parti de la Réforme de Syrie veut travailler avec eux et les premiers
résultats encourageants.
Je voudrais parler à ce niveau d'une doctrine qui est chère
au cœur de tout Syrien démocrate.
Les démocrates syriens évoquent souvent la théorie "du
tueur à gages". Je veux essayer de la résumer ici. À chaque fois que les
Américains ou les Européens s'appuient sur un tyran arabe, jugé plus fiable
qu'un dirigeant démocratique, celui-ci finit par se retourner contre eux.
Les exemples ne manquent pas, Oussama Ben Laden utilisé
contre l'Union soviétique, Saddam Hussein, utilisé contre l'Iran, le H'amas
utilisé contre le Fatah', Assad utilisé contre Arafat…..
À chaque fois cette stratégie a échoué. Nous, nous disons
que sacrifier la sécurité à long terme pour des intérêts à court terme est une
vision dangereuse du monde et malheureusement nous subissons aujourd'hui les
conséquences de cette doctrine. Nos ennemis communs se sont renforcés, ils sont
passés d'un discours incendiaire à l'attentat-suicide.
La solution, c'est la démocratie. Les droits de l'homme
conduisent à la prospérité économique. La prospérité économique conduit à la
paix civile et à la paix internationale. La paix au sein des sociétés et entre
les nations conduit à la "paix des esprits". Nombreux sont ceux,
parmi vous qui peuvent contribuer à la formulation de la politique étrangère de
la France et de l'Europe. Prenez bien en considération cette idée d'une
"paix des esprits". C'est la clé du Moyen Orient actuel. Avec la
"paix des esprits", tout sera possible. Sans elle rien ne sera
possible.
D'abord et avant tout nous voulons la démocratie. Nous avons
traversé tant d'années de tourments pour ne pas nous assurer qu'une véritable
démocratie s'installe dans notre pays, après le départ des Assad. C'est la
pierre angulaire de notre existence. Nous voulons aussi la paix et la
prospérité, pour que les Syriens ait un avenir meilleur. Nous voulons aussi
la coexistence avec tous nos voisins,
sur une base d'égalité, avec des frontières ouvertes, et des accords commerciaux
bénéficiant à tous.
Nous pensons que le plateau du Golan est un territoire
syrien et qu'il doit être rendus à la Syrie. Cependant nous sommes réalistes et
nous savons que la Syrie doit d'abord devenir une démocratie avant que ces
territoires ne soient rendus. Un ami américain m'a dit un jour "comment
peut-on faire confiance à la Syrie sur le Golan, quand ce pays a envahi et a
occupé le Liban pendant plus de 27 ans" ?
C'est là une question sérieuse. Le monde fera confiance à
une Syrie démocratique. Avec la démocratie, les Syriens sauront où se situe
leur véritable intérêt national. Et les Israéliens obtiendront la garantie de
leur sécurité.
Les droits de l'homme
doivent être respectés dans le pays tout entier. Il va de soi, par exemple, que
la population kurde syrienne doive bénéficier de la plénitude de ses droits et
être associée sur un pied d'égalité à la reconstruction politique, économique
et sociale de la nation. De même pour toutes les minorités, y compris la
minorité chrétienne, marginalisée par le pouvoir totalitaire, en dépit de son
niveau socio-éducatif.
L'invasion de l'Irak,
nous le constatons aujourd'hui, se solde par un échec. L'objectif était bon,
mais la méthode était erronée. Pour vaincre un régime totalitaire, ce n'est pas
son armée qu'il faut briser, mais la chape de peur qu'il fait peser sur son
peuple. 5% de la population ne peut pas éternellement terroriser 95% de la
population. Notre devoir en tant que Syriens est de mettre foin à la paralysie
mentale et morale imposée par le pouvoir actuel. Plus nous travaillerons dans
ce sens, plus nous obtiendrons des résultats. Sans vous, nous ne pourrons pas
libéere la Syrie, instaurer la liberté, vivre dans un pays dont nous serons
fiers.
Comme tous vous le savez, aujourd'hui le Parti de la
Réforme de Syrie travaille avec le Congrès Américain en vue de la
promulgation de "la loi de Libération de la Syrie" et nous enjoignons
la communauté syrienne de France d'en comprendre la portée et de la soutenir.
Nous avons demandé au Congrès Américain de geler les avoirs de la famille
Assad, afin qu'un jour la Syrie puisse récupérer ces capitaux. Nous travaillons
aussi avec un cabinet d'avocats pour poursuivre les Baa'thistes syriens qui ont
torturé ou tué des Syriens innocents.
Parlant à la communauté syrienne de France, je suis très
honoré d'apercevoir dans cet auditoire des visages familiers. Certains des
esprits les plus brillants sont parmi nous et ceci est la preuve que vous tous,
vous voulez une Syrie meilleure. Permettez-moi de vous dire que "Vous êtes
l'avenir de la Syrie et nous partageons avec vous, vos points de vue et vos
sentiments. Vous êtes ceux que nous appellerons pour mener notre pays à la
démocratie et moi le premier, je serai honoré ce jour là de travailler à vos
côtés.
Mais aujourd'hui, je vous conjure de trouver le courage de
vous lever publiquement contre le régime de Damas! Parce que c'est seulement à
travers des protestations publiques que nous pourrons nous frayer le chemin de
l'unité contre les oppresseurs. Un pays entier est à sauver et notre avenir,
celui de la Syrie, dépend de notre courage!"
Je voudrais conclure sur une note
optimiste.
Un ami Syrien, par ailleurs fort ouvert, avait quelque difficulté
à accepter le point de vue d'un voisin Juif sur la question du conflit
israélo-palestinien. Dès qu'il abordait la question avec lui, il se mettait en
colère. Ainsi un jour, je lui ai donné le conseil de ne plus parler politique
avec son voisin. Il a suivi mon conseil et quand nous nous sommes rencontrés
quelques mois plus tard, il m'a confié combien il était devenu agréable de
converser avec son voisin Juif. Il m'a dit qu'il avait appris qu'ils avaient
les mêmes problèmes. Il m'a dit "mot pour mot": "je n'avais pas
réalisé combien il était facile d'aimer ce voisin, en dehors de la
politique!"
Mesdames et messieurs, la démocratie en Syrie ce sont des
voisins qui cherchent à se connaître, lentement mais sûrement. C'est trouver ce
qui nous unit et non pas ce qui nous sépare. C'est une paix basée sur l'équité
et la justice, une paix basée sur le respect de l'autre. C'est retrouver notre
dignité et l'estime de soi, c'est avoir la force d'accepter la paix et de
travailler avec confiance pour un Moyen Orient meilleur.
Pour nous tous l'enjeu vaut la peine, nous n'offrons pas de
solution miracle et nous ne faisons pas des promesses grandioses. Le chemin de
la démocratie pour la Syrie ne sera facile, et nous sommes les premiers à
l'admettre. Mais nous n'avons pas le choix, nous sommes le dernier espoir de
l'espoir pour la Syrie, et si vous avez la foi comme nous, que nos enfants
méritent de vivre dans un monde où ils n'auront pas à faire un choix de vie et
de mort à chaque fois qu'ils entrent dans un immeuble, une gare, un dancing ou
une pizzeria; où ils pourront naviguer sur Internet librement, jouissant des
bienfaits de la liberté; et où ils ne seront pas réveillés en pleine nuit par
les sbires illettrés des services secrets pour être torturé dans un quelconque
cachot, alors nous sommes sûrs que vous apprécierez la gravité de ce qui nous
attend. La démocratie approche en Syrie et quand elle sera là, la paix et la
coexistence suivront.
Le grand poète syrien Adonis disait autrefois "aujourd'hui
il n'est plus temps pour nous de comprendre le monde, nous devons le
changer"
Merci pour votre attention!
Nota: à ma question si la Syrie détenait des armes de
destruction massive, Mr Ghadri a confirmé publiquement que la Syrie des Assad
cachait des armes de destruction massive, notamment en provenance d'Irak.
Artus