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DANS L’ŒIL DU CYLONE: TUER LE MONSTRE ISLAMISTE
Politique Internationale, Paris.
Traduit par Stéphane Teicher
Après des mois de préparation en secret, une délégation d’islamistes radicaux devait rencontrer d’importants officiels Saoudiens cette semaine. Ils devaient trouver les moyens de mettre fin à la campagne de terreur qui a secoué le royaume depuis six mois.
Cette rencontre n'aura pas lieu.
L’attaque suicide de Dimanche dernier dans la capitale Riyadh a mis fin à tout espoir de compromis- au moins pour l’immédiat.
"C’est un divorce brutal," dit un officiel Saoudien. "Il est trop tard pour voir un conseiller conjugal" !
Cette opinion est partagée par les Islamistes Saoudiens.
"C’est la guerre!" dit une déclaration de la Jaish al-Ansar (L’Armée des Vainqueurs), l'un des groupes terroristes parmi la douzaine qui sont décidés à détruire la monarchie Saoudienne.
Les Saoudiens subissent ce que d’autres régimes Musulmans ont subi depuis les années 1950 – ils ont créé un Monstre islamiste qui se retourne maintenant contre eux.
* Le président Egyptien Anwar Sadat s’est allié avec les Islamistes contre les panarabes à partir de 1971. Un Islamiste l’a assassiné en 1980.
* Le président Algérien Chadli Bendjedid a fait venir les Islamistes et a lancé une campagne de ré-Islamisation de sa nation. Il a été chassé du pouvoir en 1992 par une révolte Islamiste qui continue de défier l’Etat Algérien jusqu’à aujourd’hui.
* Les Saoudiens ont commencé à jouer la carte Islamiste dès les années 1960, contre les "panarabes" conduits par Nasser. Dès que le Nassérisme a cessé de constituer une menace, les Saoudiens se sont servis de l’Islamisme contre la menace communiste émanant du Yémen du Sud et du Dhofar, dans les années1970. En 1975, un membre Islamiste de la Famille Royale a assassiné le Roi Faiçal, l’homme qui avait été l’instigateur de la stratégie Islamiste du Royaume.
Dans les années 1980, les successeurs de Faiçal ont utilisé l’Islamisme pour contrer le message shiite de "la Révolution Islamique" de Khomeini, en provenance de Téhéran.
Selon des estimations, les Saoudiens ont dépensé quelques 100 milliards de $ pour promouvoir l’Islamisme à l’intérieur et à l’étranger ces 20 dernières années. Une partie de ces sommes est venue de donations collectées par des armées de volontaires Soudanais, Somaliens et Egyptiens, installés à proximité des mosquées, bazars, écoles, hôpitaux et autres lieux publics dans tout le royaume. Certains fonds provenaient d’opérations qui ressemblaient à un racket, perpétrées par des gangs Islamistes. Mais la plus grosse part des fonds est venue de l’état Saoudien.
Les premiers signes de tension dans l’alliance de l’état Saoudien avec les Islamistes sont apparus lors de la première guerre du Golfe en in 1991-92. Les Islamistes ont été outragés de voir les troupes américaines accueillies dans le royaume comme alliées contre l’Iraq de Saddam Hussein.
En 1993, le roi Fahd, sous la pression de Washington, a promulgué une constitution pour le royaume. Cela a provoqué la colère des Islamistes, qui considèrent que le Coran est la seule constitution dont a besoin tout état musulman.
Deux ans plus tard, le roi a établi une Assemblée Consultative, qui, bien que rejetée par les libéraux comme n’étant qu’un ersatz de Parlement, est apparue à beaucoup d’Islamistes comme un outil d’occidentalisation. Le ressentiment islamiste pour Al Saoud s’est encore accru avec les efforts timides, mais incontestables du prince Abdallah pour élargir la base de soutien à la dynastie. Abdullah, qui est chargé du gouvernement quotidien du royaume depuis 1996, a tenté de courtiser les pan-Arabes, les libéraux, et même des personnalités ouvertement laïques, pour contrebalancer les islamistes.
Un geste qui a particulièrement irrité les Islamistes a été la décision d’Abdallah, cette année, de reconnaître les droits des Shiiites comme citoyens. Les Islamistes Saoudiens considèrent les Shiites, qui représentent 15% de la population, comme des hérétiques, qui doivent être passés par le fil de l’épée. Or Abdallah leur a donné deux sièges à l’Assemblée et pour la première fois, il a nommé des Shiites à des postes importants dans les services civils et diplomatiques.
La colère Islamiste contre le régime est montée d’un cran le mois dernier, quand Abdallah a annoncé que les premières élections dans l’histoire du royaume seraient organisées l’année prochaine. D’une portée modeste, ces élections ne concernent que la moitié des sièges aux conseils municipaux. Les Islamistes considèrent cependant que toute élection est une trahison de l’Islam. Pis encore, les femmes pourront se présenter et voter aux élections de l’année prochaine – ce qui est perçu comme un outrage, dans un pays où les femmes n’ont même pas le droit de conduire une voiture.
La colère Islamiste a encore augmenté en Février dernier, quand le gouvernement, sous la pression de Washington, a lancé une chasse contre eux. Au cours des six derniers mois, plus de 800 prédicateurs de mosquées et muezzins ont été renvoyés. Quelques 2000 Islamistes ont été exclus du système éducatif.
La situation s'est encore compliquée avec le retour au royaume ces deux dernières années, d'environ 3 000 anciens mujaheedin d’Afghanistan, du Pakistan et du Caucase. Certains d’entre eux semblent avoir regagné leurs communautés d’origine. Mais plus nombreux sont ceux qui ont constitué des cellules armées secrètes et sont derrière des nombreuses attaques, souvent passées sous silence, qui ont visé le gouvernement et les communautés d’expatriés depuis l’année dernière. Après avoir tenté d’ignorer ces cellules, les autorités ont commencé cette année à les poursuivre et à les démanteler. D’après les chiffres du Ministère de l’Intérieur, les forces de sécurité ont mené plus de 80 opérations contre les Islamistes ces six derniers mois. Plus de 100 Islamistes ont été tués et près de 700 capturés.
La campagne de terreur actuelle peut donc être une tentative désespérée des Islamistes pour reprendre l’initiative dans une guerre secrète qui a commencé il y a près d’un an.
La lutte entre l’état Egyptien et le monstre Islamiste qu’il a créé a duré 20 ans et s’est achevée par la défaite de ce dernier. L’état Algérien a écrasé son monstre Islamiste après 12 ans de guerre. Combien de temps faudra-t-il à l’état Saoudien pour tuer son monstre, personne ne le sait. Ce qui est clair, c’est qu’une défaite Islamiste en Arabie Saoudite permettra plus facilement de couper les autre têtes de l’hydre.