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Macron, Chateaubriand et Jérusalem
Par
Claude Berger, auteur de
« Pourquoi l’antisémitisme ? » et de « Itinéraire d’un Juif
du siècle » aux Éditions de Paris
20/12/17
En 1806, le grand Chateaubriand, de retour de Jérusalem, écrivait :
« Pénétrez dans le demeure de ce
peuple, vous le trouverez dans une affreuse misère, faisant lire un livre
mystérieux à des enfants qui, à leur tour, le feront lire à leurs enfants. Ce
qu’il faisait il y a cinq mille ans, ce peuple le fait encore. Il a assisté
dix-sept fois à la ruine de Jérusalem ; et rien ne peut le
décourager ; rien ne peut l’empêcher de tourner ses regards vers Sion.
Quand on voit les Juifs dispersés sur la terre, selon la parole de Dieu, on est
surpris, sans doute : mais pour être frappé d’un étonnement surnaturel, il
faut les retrouver à Jérusalem ; il faut voir ces légitimes maîtres de la
Judée esclaves et étrangers dans leur propre pays ; il faut les voir
attendant, sous toutes les oppressions, un roi qui doit les délivrer. Si
quelque chose, parmi les nations, porte le caractère du miracle, nous pensons
que ce caractère est ici. » (Chateaubriand, Itinéraire de
Paris à Jérusalem).
En 2017, Macron, devenu président, nous fait part de sa
« préoccupation » que Jérusalem fût enfin reconnue, de plein droit, propriété
de « ces légitimes maîtres de la Judée esclaves et étrangers dans leur
propre pays » par un président américain réaliste entérinant une situation
d’unification de Jérusalem qui remonte à 1967, situation qui assure dans les
faits le libre accès aux lieux saints des trois cultes concernés. En
s’informant, le président- petit ?- pourrait découvrir que lorsque la
Jordanie s’empara de la partie est de Jérusalem de 1947 à 1967, les Juifs
n’avaient plus accès au Mur et des synagogues et des cimetières furent alors
détruits.
Il pourrait alors
s’abstenir de prôner la « négociation » sous des auspices
internationales, alors que celles-ci, en majorité, n’eurent jusqu’ici pour
autre but que de faire pression contraignante sur Israël afin d’abonder dans le
sens palestinien de ne pas reconnaître d’État du peuple juif et d’empêcher
toute présence de juifs dans un futur État, tout comme il est de règle dans de
nombreux pays arabo-musulmans.
Le Hamas, le
Hezbollah et la puissance iranienne montante vont plus loin : ils veulent
l’éradication d’Israël et le génocide de sa population.
Ce refus du fait
juif et du peuple juif, cet antisémitisme d’origine musulmane, se
concrétisèrent autrefois dans le statut de soumission imposé aux juifs tout
comme la rouelle, l’expulsion ou le ghetto s’imposèrent à leur égard en Europe
chrétienne et tout comme le statut des Juifs fut imposé en France vichyste et
tout comme l’étoile jaune et l’extermination s’imposèrent en Europe nazifiée.
Là encore le Grand Chateaubriand avait vu l’avenir potentiel des effets de
l’arrivée du marché du travail et du marché des produits de l’ère industrielle
sur une telle matrice culturelle coranique n’ayant pas connu de Réforme.
Il y a quelque deux
siècles, le même grand Chateaubriand, livrait ce propos toujours
actuel : « Un nouvel Orient va-t-il se
former ? Qu’en sortira-t-il ? Recevrons-nous le châtiment mérité
d’avoir appris l’art moderne des armes à des peuples dont l’état social est
fondé sur l’esclavage et la polygamie ? Avons-nous porté la civilisation
au dehors, ou avons-nous amené la barbarie dans l’intérieur de la
chrétienté ? Que résultera-t-il des nouveaux intérêts, des nouvelles
relations politiques, de la création des puissances qui pourront surgir dans le
Levant ? Personne ne saurait le dire. Je ne me laisse pas éblouir par des
bateaux à vapeur et des chemins de fer ; par la vente du produit des
manufactures et par la fortune de quelques soldats français, anglais,
allemands, italiens, enrôlés au service d’un pacha : tout cela n’est pas
de la civilisation. On verra peut-être revenir, au moyen des troupes
disciplinées des Ibrahim futurs, les périls qui ont menacé l’Europe à l’époque
de Charles Martel, et dont plus tard nous a sauvés la
généreuse Pologne. » (Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, Tome 2, page
390).
Et là encore le
président –le petit ?- ne semble
avoir en vue que les contrats potentiels, iraniens entre autres, qu’il espère
obtenir pour sa boutique, les affaires étant bien les affaires ?
Il est donc utile
de rappeler ce qui fait obstacle à la paix entre palestiniens et israéliens.
En 1947 le
mouvement arabo-palestinien dirigé par le mufti nazi, deux ans en poste à
Berlin près de son ami Hitler et exfiltré par la France à la libération pour
échapper à la justice anglaise, refuse le plan de partition, mu par une seule
obsession : le refus d’un État Juif et la croyance au panislamisme pour
chasser « les intrus juifs ». S’ensuit l’occupation de la Judée et de
la Samarie et de Jérusalem Est par la Jordanie mais aussi la victoire d’Israël
naissant sur la part qui lui était octroyée.
Ce refus de l’État
d’Israël comme État du peuple juif – qui compte tout de même 20 pour cent
d’arabes musulmans ou chrétiens jouissant des mêmes droits que les
Israéliens -(ce que certain sans rire appellent « apartheid »)- est
toujours actuel et explique pourquoi le parti de Abbas rejette toujours
des négociations directes et n’envisage pas d’accueillir de juifs au sein d’un
futur État palestinien.
L’islamisme
palestinien, à l’origine du conflit israélo-palestinien est donc toujours
présent et influent dans le discours et les actes du Fatah, le parti de
Abbas, qui ne réprime pas, loin de là, le terrorisme. Et si les
palestiniens ont leurs réfugiés de 1948, les juifs ont aussi les leurs expulsés
des pays arabo-musulmans par la coalition pan-islamiste
du monde arabe de l’époque.
Il est donc temps
de saluer la décision de Donald Trump de reconnaître
Jérusalem capitale d’Israël en vue de favoriser une issue réaliste au
conflit en satisfaisant des aspirations raisonnables des palestiniens pour une
coexistence paisible.
C’est d’ailleurs ce
qui semble se dessiner avec les initiatives américaines et saoudiennes. Le
prince Mohammed Ben Salman aurait d’ailleurs invité Mahmud Abbas à accepter une
Palestine démilitarisée dans les zones A et B qu’il occupe, avec Abu Dis pour
capitale, car faut-il le rappeler, il n’y eut jamais d’État palestinien ni de
capitale palestinienne ayant pour nom Jérusalem.
Mais il est temps
également que l’Europe, hormis la Tchéquie qui a salué la décision
américaine, ausculte et rejette la part de son inconscient culturel qui
lui fait diaboliser Israël et voter des résolutions hostiles à l’Onu et à
l’Unesco, des résolutions qui abondent dans le sens de l’islamisme sans
orienter les palestiniens dans le sens de la coexistence pacifique. N’oublions
pas que l’antisémitisme (muté désormais en antisionisme) a une longue histoire
en Europe et en France.
Après le temps de
la rouelle, ses formes sécularisées se sont exprimées à l’extrême droite
comme à l’extrême gauche. Marx, Proudhon, Bakounine, Fourier font pendant à
Drumont, Toussenel, Rebatet, Céline, sans qu’on
étudie les effets de leur antisémitisme sur la religiosité de leurs idéologies.
Le grand
Chateaubriand avait pressenti les conséquences de l’islamisme sur la
civilisation de la France.
Peut-on espérer que
Macron s’adonne à sa lecture ? Parole d’un
porteur d’étoile au temps de Vichy.