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LETTRE A UN CITOYEN DE GAZA :

« JE SUIS LE SOLDAT QUI A DORMI CHEZ VOUS »…

 

Yishaï - Arouts Shewaa' -12/02/09

Texte original anglais : "Letter to Gaza Citizen: I Am the Soldier Who Slept in Your Home". 

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Alors que le monde découvre les ruines de Gaza, vous revenez dans votre maison restée debout. Cela dit, je suis sûr qu’il est clair pour vous que quelqu’un a occupé votre maison lorsque vous en étiez absent. Je suis ce quelqu’un.

 

J’ai passé de longues heures à imaginer, en déambulant à l’intérieur de votre maison, de quelle façon vous réagiriez. Ce que vous ressentiriez en comprenant que les soldats de Tsahal avaient dormi sur vos matelas et utilisé vos couvertures pour trouver un peu de chaleur.

Je savais que cela vous mettrait en colère et vous rendrait triste, et que vous ressentiriez, avec une irritante humiliation, cette violation des lieux les plus intimes de votre vie, par ceux-là mêmes qui sont définis comme étant vos ennemis. Je suis convaincu que vous me haïssez d’une haine sans borne, et que vous n’avez pas même la plus petite envie d’écouter ce que j’ai à dire. En même temps, il est important pour moi de dire ce qui va suivre, avec l’espoir qu’il reste ne serait-ce que la plus infime chance que vous m’écoutiez.

J’ai passé de longues journées dans votre maison. Dans chaque recoin, je pouvais sentir votre présence et celle des vôtres. J’ai vu les photographies de votre famille sur le mur, et j’ai pensé à ma famille. J’ai vu les flacons de parfum de votre femme sur sa commode  et j’ai pensé à ceux de ma femme. J’ai vu les jouets de vos enfants et leurs livres d’école en anglais. J’ai vu votre ordinateur personnel et la façon dont vous aviez installé le modem et le téléphone sans fil juste à côté de l’écran, exactement comme je le fais moi-même.

Je veux que vous sachiez qu’en dépit de l’immense désordre causé par une fouille à la recherche d’explosifs et de tunnels (qui en fait ont été trouvés dans d’autres habitations), que vous avez trouvé en rentrant chez vous, nous avons fait notre maximum pour traiter vos biens avec respect. Lorsque j’ai déplacé la table sur laquelle repose l’ordinateur, j’ai débranché les câbles et les ai soigneusement posés sur le sol, comme je l’aurais fait s’il s’agissait de mon propre ordinateur. J’ai même recouvert l’ordinateur avec un morceau de tissu pour le protéger de la poussière.. J’ai essayé de remettre à leur place les vêtements qui étaient tombés, lorsque nous avons déplacé l’armoire, certes, pas exactement comme vous l’auriez fait, mais au moins de telle manière qu’aucun ne soit égaré.

Je sais pertinemment que la dévastation, les impacts de balles sur vos murs et la destruction des maisons voisines donnent à mes descriptions un éclairage ridicule. Cependant, j’ai besoin que vous me compreniez, que vous nous compreniez, et j’espère que vous pourrez canaliser votre colère et vos reproches dans une juste mesure.

J’ai décidé tout spécialement de vous écrire cette lettre, précisément parce que j’ai demeuré dans votre maison.

Je présume que vous êtes intelligent et cultivé et que des membres de votre famille vont à l’université. Vos enfants apprennent l’anglais et vous êtes connecté à internet. Vous n’êtes pas un ignorant ; vous savez ce qui se passe autour de vous.

De plus, je suis sûr que vous savez que des roquettes Qassam ont été tirées à partir de votre voisinage vers les villes et cités israéliennes.

Comment avez-vous pu assister à ces tirs, des semaines durant, sans penser qu’un jour nous dirions « C’en est assez! ». N’avez-vous pas envisagé parfois que c’était mal de tirer des roquettes sur des civils innocents cherchant à vivre une vie normale, tout comme vous ? Combien de temps pensiez-vous que nous resterions les bras croisés sans réagir ?

Je vous entends déjà me dire : « Ce n’est pas moi, c’est le Hamas! ». Mon intuition me dit que vous ne comptez pas parmi leurs plus fervents supporters. Si vous regardez de près la triste réalité dans laquelle vit votre peuple et que vous n’essayez pas de vous leurrer ou de trouver des prétextes dans "l’occupation", vous devez certainement aboutir à la conclusion que le Hamas est votre véritable ennemi.

La réalité est si simple que même un enfant de 7 ans peut la comprendre : Israël s’est retiré de la Bande de Gaza, et a enlevé ses bases militaires et ses citoyens du Goush Katif. Néanmoins, nous continuons à vous fournir l’électricité, l’eau courante et des marchandises (et cela, je le sais d’autant mieux que, durant mes périodes de réserviste, j’ai gardé plus d’une fois les points de passage et j’ai été témoin du passage de centaines de camions bourrés de marchandises, qui entraient chaque jour dans Gaza libre de tout blocus).

Malgré tout cela, pour des raisons incompréhensibles et contre toute logique rationnelle, le Hamas a continué à tirer des missiles sur les villes israéliennes. Durant trois ans, nous avons serré les dents et nous nous sommes contenus. A la fin, nous ne pouvions plus nous y tenir et sommes entrés dans la bande de Gaza, dans votre quartier, dans le but d’éliminer ceux qui veulent nous tuer. Une réalité douloureuse, mais très facile à expliquer.

Dès l’instant où vous serez d’accord avec moi pour reconnaître que le Hamas est votre ennemi et qu’à cause d’eux, votre peuple est misérable, vous comprendrez aussi que le changement doit venir de l’intérieur. Je suis tout à fait conscient que ce que je dis est plus facile à écrire qu’à faire, mais je ne vois pas d’autre moyen. Vous qui êtes connecté au monde entier et soucieux de l’éducation de vos enfants, vous devez déclencher, avec vos amis, un soulèvement civil contre le Hamas.

Je vous jure que si les citoyens de Gaza étaient occupés à paver les routes, construire des écoles, ouvrir des usines et des institutions culturelles, au lieu de s’apitoyer sur eux-mêmes, de faire du trafic d’armes et de nourrir de la haine pour leurs voisins israéliens, vos maisons ne seraient pas en ruines comme aujourd’hui. Si vos dirigeants n’étaient pas corrompus et motivés par la haine, vos maisons n’auraient pas été endommagées. Si quelqu’un s’était levé en criant que cela ne mène nulle part de lancer des missiles sur des civils innocents, je n’aurais pas été obligé de me trouver dans votre cuisine, en tant que soldat.

Vous n’avez pas d’argent, me direz-vous? Vous en avez plus que vous ne l’imaginez.

Avant même que le Hamas prenne le contrôle de Gaza, durant la période d’Arafat, des millions, si ce n’est des milliards de dollars, donnés aux Palestiniens par la communauté internationale, ont été utilisés pour acheter des armes, ou versés directement sur les comptes personnels de vos dirigeants. Les Etats du Golfe, les Emirats – vos frères, votre chair et votre sang, sont parmi les nations les plus riches du monde. S’il y avait le moindre sentiment de solidarité entre les nations arabes, si ces nations avaient ne serait-ce que le plus petit intérêt à remettre sur pieds le peuple palestinien – votre situation serait très différente.

Vous devez bien connaître Singapour. La superficie de ce territoire n’est guère plus grande que celle de la bande de Gaza, et il est considéré comme le second pays le plus peuplé au monde. Pourtant, Singapour est un pays prospère, bien géré, qui réussit. Pourquoi la même chose  vous serait-elle impossible ? 

Mon ami, j’aimerais vous appeler par votre nom, mais je ne le ferai pas publiquement. Je veux que vous sachiez que je suis à 100% en accord avec ce que mon pays a fait, avec ce que mon armée a fait, avec ce que j’ai fait. Pourtant, je ressens votre souffrance. Je suis désolé de la destruction que vous constatez dans votre quartier en ce moment. A mon niveau personnel, j’ai fait tout ce que j’ai pu pour limiter au maximum les dommages causés à votre maison.

Selon moi, nous avons davantage de choses en commun que vous ne pourriez l’imaginer. Je suis un civil, pas un soldat, et dans ma vie privée je n’ai rien à voir avec l’armée. Cela dit, j’ai obligation de quitter ma maison, de porter l’uniforme et de protéger ma famille, à chaque fois que nous sommes attaqués. Je n’ai nul désir de me retrouver à nouveau en uniforme dans votre maison et je serais plus qu’heureux de m’asseoir avec vous, en tant qu’invité, sur votre magnifique balcon, en buvant un délicieux thé, assaisonné avec la sauge qui pousse dans votre jardin.

La seule personne qui peut faire de ce rêve une réalité, c’est vous. Soyez responsable de vous-même, de votre famille, de votre peuple, et commencez à prendre votre destin en main. Comment ? Je ne sais pas. Peut-être y a-t-il quelque chose à retenir du peuple juif qui s’est dressé, après la tragédie humaine la plus destructrice du XXe siècle et, plutôt que de sombrer dans l’apitoiement sur lui-même, a construit un pays florissant et prospère. C’est possible et cela ne dépend que de vous. Je suis prêt à me trouver là pour soutenir, vous épauler et vous aider.

Mais il n’y a que vous qui puissiez faire tourner la roue de l’histoire

Avec toute ma considération,

 

Yishai (Soldat de réserve)