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Le Juif Bouc Emissaire Depuis 2.000 ans, ça Suffit !

 

Par Manfred Gerstenfeld et Jamie Berk

Le Dr. Manfred Gerstenfeld est membre du Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem, qu’il a présidé pendant 12 ans. Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

3/06/15

 

Le Juif bouc émissaire depuis 2.000 ans. Il est temps que cela change.

La transformation des Juifs en bouc émissaire est un phénomène répandu depuis plus de 2000 ans. Il est probable que l'exemple le plus préjudiciable reste l’affirmation, par de nombreux Chrétiens, que tous les Juifs à travers les siècles, sont responsables de la mort de Jésus, "fils de D.ieu". Cette lancée précoce à la vindicte publique a été en partie alimentée par l’apôtre Mathieu, qui a introduit l’idée que les Juifs contemporains de Jésus auraient revendiqué leur responsabilité dans sa mort en disant : "Son sang retombera sur nos têtes et celles de nos enfants".

Une accusation aussi extrême signifiait qu’aux yeux de ces Chrétiens-là, les Juifs incarnaient le Mal absolu : les Juifs étaient, à la fois, capables et coupables de commettre un déicide. Cette accusation que les Juifs étaient le mal absolu est, par extension, devenue le thème central de l’antisémitisme durant des millénaires. Il a fourni l’infrastructure d’une variété d’autres formes de transformation des Juifs en bouc émissaire, avec des versions contemporaines, dont le dénigrement systématique d’Israël, accompagné d’une série d’autres accusations fallacieuses. Au fil des siècles, il a aussi conduit à des pogroms massifs, à des expulsions et à de nombreuses autres formes de discrimination contre les Juifs. 

Le philosophe français René Girard a posé, il y a quelques décennies, l’essentiel des fondements théoriques dans l’analyse du phénomène de l’utilisation d’un groupe comme bouc émissaire. Il écrit : "La victime ou les victimes d’une violence injuste ou de la discrimination sont appelées bouc émissaire, particulièrement lorsqu’ils ne sont pas punis pour les péchés des autres, comme le prétendent la plupart des dictionnaires, mais à cause des tensions, conflits et difficultés de toutes sortes… La fonction du bouc émissaire permet aux persécuteurs d’éluder les problèmes qui leur semblent impossibles à  résoudre". La définition de Girard couvre de nombreux aspects de la fonction de bouc-émissaire des Juifs et d’Israël. 

Une partie de ce rôle de bouc émissaire que jouent les Juifs et Israël est fondée sur la mutation de motifs de haine éculés, mais récurrents. Quelques exemples suffiront à illustrer ce point. 

 

Un thème classique du besoin de bouc émissaire prétend que les Juifs rendent intentionnellement les autres malades. Au Moyen-âge, quand de nombreux Européens mouraient de la peste, qu’on surnommait la Mort Noire, on se servait du Juif comme bouc-émissaire et on l'accusait mensongèrement d’avoir provoqué l’épidémie en empoisonnant les puits et autres points d’eau.

De façon identique, au cours de ces dernières années, les Israéliens ont été accusés, de façon malveillante, par des medias égyptiens, d’avoir empoisonné les fruits et les légumes exportés en Egypte. En 2007, un état de panique a couru en Arabie Saoudite, provoqué par une rumeur disant qu’Israël avait livré clandestinement, dans le pays, des melons infectés du SIDA, "à travers un couloir terrestre resté secret ". Le gouvernement saoudien a essayé d’informer le public que ce virus ne se transmet pas aux gens par l’intermédiaire des fruits. Au plus fort de l’angoisse suscitée par la grippe aviaire, en 2006, al-Thawra, le quotidien d’Etat syrien a publié qu’Israël avait intentionnellement développé ce virus dans le but d'infecter ses voisins arabes. Ces exemples ne représentent qu’une sélection rapide d’échantillons contemporains de ce motif particulier de quête d’un bouc émissaire, appliqué à l’Etat Juif. 

 

Un autre mobile de recherche de bouc-émissaire, dans l’antisémitisme populaire, est l’accusation de meurtre rituel. Dans l’Europe chrétienne, on tient les origines de la rumeur de Norwich, en Angleterre. En 1144, la communauté juive a été mensongèrement accusée d’avoir tué un jeune garçon chrétien de 12 ans, appelé William, pour des objectifs liés à ses rituels. De telles accusations de meurtre rituel ont été proférées durant des siècles, dans les milieux chrétiens, d’où ils se sont ensuite répandus dans le monde musulman. 

Une variante contemporaine de meurtre rituel accuse mensongèrement Israël de trafic d’organes. En août 2009, le plus grand quotidien suédois, Aftonbladet, de tendance sociale-démocrate, a publié un article de Donald Boström, intitulé : “Våra söner plundras sina organ”  (“Nos enfants se font voler leurs organes”). Boström prétendait qu’il existait des rumeurs disant que Tsahal tuait des Palestiniens et leur prélevait leurs organes sans leur consentement pour les transplanter – de mèche avec l’Institution médicale israélienne.

Une nouvelle dimension de ce rôle de bouc émissaire concerne les données quantitatives qui sont, maintenant, disponibles et permettent d’évaluer son importance. Un exemple particulièrement parlant est relatif aux attentats meurtriers du 9 Septembre, commis aux Etats-Unis par des Musulmans en majorité saoudiens. De nombreux Musulmans dans le monde ont préféré ne pas les attribuer à leurs coreligionnaires qui les avaient perpétrés, mais plutôt à Israël. Un sondage de l’Université de Maryland, de 2009 – quand même, huit ans après le 11 Septembre – démontrait que 31% des Jordaniens, 19% des Palestiniens et 6% des Azerbaïdjanais pensaient qu’Israël était responsable des attentats du 11 Septembre.

En 2010, un sondage, mené par le journal officiel de l’Autorité Palestinienne, Al-Hayat al-Jadida, peu de temps après les attentats terroristes contre Charlie-Hebdo et l’HyperCacher de Vincennes, a montré que 84,4% des Palestiniens interrogés pensent que "ces attentats sont suspects et qu’Israël doit forcément être derrière". Il n’y a que 8, 7% des interviewés qui ont mis ces attentats sur le compte du surgissement du fondamentalisme islamique en Europe.

Depuis la Grande Dépression, on se sert aussi du Juif comme bouc émissaire, dans le cas des crises financières mondiales. On a accusé les Juifs et Israël d’être responsables de la récession globale de 2008 et de la crise de l’Eurozone. Une enquête de l’Anti-Defamation League (ADL) de 2009, qui s’est déroulée dans sept pays européens, démontrait que 31% des sondés pensent que les Juifs, présents dans la sphère financière, sont responsables de l’effondrement économique. Une étude du Boston Review portant sur la population américaine, découvre, cette même année, que 38,4% des interviewés imputent aux Juifs une part de culpabilité dans cette récession.

De la même façon, Israël sert de bouc émissaire comme étant la cause de tout le chaos qui se répand au Moyen-Orient. Certains hommes politiques européens prétendent, de bien mauvaise foi, que si Israël cessait de construire dans les implantations des territoires disputés, toute violence cesserait, au Moyen-Orient. Autre alternative, et au moins aussi absurde, on prétend que l’instauration de la paix entre Israël et les Palestiniens mettrait fin aux campagnes de meurtres de masse entre des Musulmans et d’autres Musulmans moyen-orientaux. Il existe encore d’autres moyens de se servir d’Israël comme bouc-émissaire, en accusant l’Etat Juif des persécutions menées par les Musulmans palestiniens contre les Chrétiens palestiniens. 

 

Il est grand temps que l’Etat d’Israël commence systématiquement à montrer du doigt ceux qui sont fréquemment responsables de ces procédés d’attribution du rôle de bouc-émissaire et de tant de fausses accusations. Chaque fois que possible, Israël doit attribuer spécifiquement les crimes dont il est accusé à ceux qui les ont réellement commis, et qui sont bien souvent des Musulmans, mais aussi d’autres parfois.


Note
Le mystère des Juifs 

https://www.youtube.com/watch?v=j6k1jHAYtbI&sns=em