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L'Antisionisme
Judiciaire, une Arme Redoutable
S’il ne doit rester qu’un seul pays pour garantir aux Juifs le droit à la
dignité humaine, ce doit être Israël. L’antisionisme
judiciaire, une arme redoutable qui remet au goût du jour les heures de gloire de
l’antisémitisme
Par Yéhochouaa’ Sultan pour Europe Israël
Le 2 février 2017
Même les
propagandistes les plus aguerris manquent de s’étrangler. Débitant sa sempiternelle
mélopée du méchant colon juif et du pauvre
spolié arabe, le journaliste se met à bafouiller. Interloqué, il manque
de s’étrangler en direct, devant le spectacle désolant de l’évacuation d’Amona. En France, un célèbre employé de la télévision, un
certain Pujadas, ne peut s’empêcher de constater
l’abject décalage entre son laïus prémâché et les images qu’il doit commenter.
Il voit des forces de police s’introduire dans les maisons, en jeter les habitants
dehors, avec brutalité et force cris, quarante-deux familles paisibles et
respectables, dont quelque deux-cent enfants, par une glaciale journée d’hiver.
Des familles démunies de tout, en un instant, dont la maison et la vie économique,
associative, culturelle… s’écroulent du jour au lendemain, n’ayant absolument
pas les moyens de se louer un logement décent ailleurs. Ils ne peuvent pas
même accepter avec résignation cette violence du tribunal et de ses exécutants,
se dire qu’ils iront se reloger ailleurs; les prix de l’habitat, en ville,
à Jérusalem, s’élèvent à des millions, sommes qu’ils ne gagneront pas, dans
toute une vie de travail honnête.
Le
téléspectateur choqué croit entendre «Heraus, Schnell !». Certes, le décalage entre ces
violences et l’association incontournable qu’évoquent ces images dans l’opinion
est immense. Ah, si les Allemands avaient seulement jeté les Juifs dans la rue,
en les laissant partir ! Comment peut-on comparer un village juif en errance à
des événements indicibles des millions de fois plus graves ?
Mais la
conscience collective aujourd’hui, s’est conditionnée de sorte que dès que l’on
pense antisémitisme, on pense Shoah. Personne en Israël
ne souhaite une pareille comparaison, comparaison qui vient s’imposer
paradoxalement par la prépondérance qu’occupent les événements indicibles de la
deuxième guerre mondiale dans le souvenir. Cette tragédie, ce cauchemar ne doit
pas être banalisé, et il convient de toujours s’attacher à ne lui comparer aucun
autre fait, même les plus insupportables pour le bon sens et la
morale. La comparaison redoutée ne peut que conduire à deux résultats diamétralement
opposés : soit l’on fait de ces policiers qui n’ont fait qu’obéir
à des ordres des monstres indignes du genre humain, mais aussi du
tribunal et du gouvernement; soit l’indicibilité de la Shoah se
banalise à la longue. De l’échec moral absolu d’une humanité qui se voulait
éclairée, le génocide devient sémantiquement une notion affaiblie associée à
toute conduite plus ou moins déshonorante.
La restriction des connaissances impose cette comparaison
On a
tellement peur que les falsificateurs de l’histoire ne parviennent à imposer
leurs mensonges, lorsqu’ils prétendent que le génocide est une invention des
Juifs, que l’on fait tout son possible pour que la vérité persiste et triomphe.
Les derniers témoins vont bientôt disparaître, et il ne restera pour l’attester
que tout ce travail immense de documentation, de rassemblement de récits, de
noms, en une besogne opiniâtre et inlassable.
Il y a
cependant un sérieux inconvénient. L’une des conséquences de l’investissement
inouï en vue de récolter, d’archiver et de mettre à la portée de toutes les
consciences le cauchemar irrationnel que fut l’Holocauste, est qu’il serve de référence
exclusive dès qu’il est question de condamner des violations des droits de
l’homme. Cette association se superpose par un réflexe conditionné à
la pensée (4).
Certes,
il ne faut pas oublier ce qui se produisit en Europe. Mais élargissons un peu
nos horizons, ne jouons pas la carte de la mémoire courte, de la tragédie
exclusive et jamais vue en d’autres temps. La destruction du Temple, et surtout
la répression de la révolte de Bar-Kokhba, ont fait des millions de morts. Les
Romains, à Bethar notamment, saisissaient les jeunes
garçons par les pieds et leur fracassaient la tête sur la roche (5), ne lâchant
prise qu’après s’être assurés d’y avoir répandu leur cervelle. Des découvertes
archéologiques récentes ont attesté de l’existence de fosses communes, à
proximité des vestiges du Temple, où les Juifs étaient massacrés par centaines,
jetés et ensevelis, tous âges confondus. L’empire romain fit disparaître les deux millions de Juifs qui vivaient en
Palestine juive pendant les premiers siècles de l’exil d’Édom.
Cette
Shoah est occultée, et les négationnistes de l’Unesco sont bien placés pour le
savoir, puisque leurs décrets renient jusqu’au lien entre les Juifs et
Jérusalem. Nous ne nous étendrons pas non plus sur les tentatives d’anéantir le
peuple juif sous l’Inquisition ou sur les communautés massacrées à l’époque qui
suivit de peu celle de Rashi, ni sur les expulsions répétées des Juifs de
France, plus de dix au total, qui s’étendent sur un millénaire et demi,
de 533 à 1941 de l’ère vulgaire, sous Philippe Auguste en 1182 par exemple, ou
encore en 1394 sous Charles VI. D’aucuns pressentent dans les années 2000 une
nouvelle expulsion, bien qu’en l’occurrence elle se produit indirectement.
L’expulsion
de Juifs était une malheureuse tradition pendant leur exil, et ce qui choque
aujourd’hui le téléspectateur qui n’en croit ni ses yeux ni ses oreilles, c’est
de constater que l’Etat juif ne garantit pas que ses citoyens puissent enfin
considérer ces pratiques comme révolues, définitivement rattachées au passé où
le Juif semblait apatride
Cette
question n’est contournable que par hypocrisie : qui, encore une fois de trop,
a mis en scène des policiers s’introduisant dans des foyers privés, boutant
brutalement, dans le froid, des pères, des mères, des enfants ? Attention ! Ne
dites surtout pas que vous avez cru revoir des kapos, vous risqueriez d’être
grièvement accusé d’immoralité. Enoncer une vérité qui dérange peut coûter
cher. Le prophète Jérémie, vers la fin de l’époque du Premier Temple, en avait
fait les frais, emprisonné parce qu’il en prédisait la destruction. «Comment oses-tu dire que le Temple va être
détruit en raison de nos fautes? Quelles fautes? Oiseau de mauvais augure ! ».(3)
Choqués, sans plus
Cependant,
si l’opinion est choquée, elle ne s’en formalisera pas pour autant. Les Juifs n’ont
jamais eu droit à la considération des défenseurs des droits de l’homme.
La célèbre Licra française prend les antijuifs pour des antiracistes, ce qui a
poussé même Finkielkraut à émettre de sérieuses réserves. Rien à attendre de ce
côté-là. Et les Américains ? Parlons-en. Les Américains n’ont pas débarqué en
Normandie pour sauver les Juifs. Pire, des documents déclassifiés montrent
qu’ils ont refoulé des navires bourrés de réfugiés juifs (6).
Le
problème, c’est que le comportement du gouvernement Netanyahou qui n’a pas
le choix banalise la
haine et normalise les mauvais traitements contre les Juifs. Choqué? C’est vrai
au fait, mais pourquoi? Aucun dirigeant d’aucun pays n’a été outré, ni n’a
condamné, critiqué, cette répétition de l’un des traitements inhumains que les
Juifs subissaient jadis en Europe ou ailleurs. Après tout, si les antisémites
n’ont plus besoin de taper sur les Juifs parce qu’il y en a qui s’en chargent,
que voulez-vous que l’on fasse? On oublie que sous cape, cette Europe libre n’y
est pas complètement pour rien (7). L’opinion non seulement s’en accommodera
bien vite, mais elle trouvera ce fait normal. Les plus antijuifs doivent déjà
bien rire : «Eh, regardez! On n’a plus
besoin de taper sur les Juifs, ils s’en chargent eux-mêmes !» (2)
Un
documentaire de la télévision israélienne sur les Juifs de Tunisie pendant les
heures noires de la deuxième guerre mondiale démonte l’un des principaux
clichés solidement incrustés dans les consciences, mais inappropriés. Le
journaliste n’y coupe pas. Interrogeant un homme âgé qui avait vécu en Tunisie,
où plus de cent personnes, surtout parmi les hommes réquisitionnés pour le
travail obligatoire, ont été tuées par les nazis, il l’interroge : «Donc, vous avez été vous aussi victimes de
crime contre l’humanité ?» - On est tellement rodés par cette pensée
rabâchée que la réponse du vieil homme semble avoir à première vue quelque
chose de risible. «Vous n’y êtes pas.
C’est un crime de l’humanité contre les Juifs»
Leibowitz
avait donc tort (1). Cette extériorisation de tous les mauvais traitements
subis par les Juifs des centaines d’années durant, doit servir de signal
d’alarme au pays d’Israël, afin qu’il ne fasse pas subir aux Juifs ce que
l’Allemagne leur a fait subir, ainsi que, par extension, bien d’autres nations.
Et nous n’avons pas parlé de l’expulsion de tous les Juifs manu militari en 1948, partout où l’occupant jordanien n’a pu être
délogé, surtout à Jérusalem.
Notes
[1] L’intellectuel
israélien Yeshayahou Leibowitz, très médiatisé,
disparu à la fin du siècle dernier, se pose en philosophe et moraliste. Il
défend que si les Juifs en exil n’ont pas fait preuve de l’usage de la force,
c’était en raison d’un motif non pas dû à sa haute moralité mais purement
circonstanciel.
[2] Voir le
Chasseur et le rabatteur.
[3] Lamentations
IV, 30.
[4] La Journée
internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, International
Holocaust Remembrance Day est une journée du
souvenir de l’Holocauste et de prévention des crimes contre l’humanité instituée à initiative des
ministres de l’Éducation des États membres du Conseil de l’Europe en octobre 2002 et suivie par
l’Organisation des Nations
unies. Par
une résolution intitulée « Mémoire de l’Holocauste » adoptée
le 1er novembre 20051, l’Assemblée générale a décidé que
les Nations unies la célèbreraient chaque année, le 27 janvier, à la date
d’anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz2. Sur Wikipedia
: https://fr.wikipedia.org/wiki/Journ%C3%A9e_internationale_d%C3%A9di%C3%A9e_%C3%A0_la_m%C3%A9moire_des_victimes_de_l’Holocauste
[5] http://www.israel-flash.com/2013/07/deuil-national-et-jeune-du-9-av/#axzz2Z2htj7Xg
[6] http://www.lemonde.fr/big-browser/article/2017/01/31/il-y-a-75-ans-les-etats-unis-renvoyaient-254-migrants-vers-la-mort-dans-les-camps-nazis_5072398_4832693.html. Bien sûr, le monde exploite ces
informations à des fins pernicieuses, en comparant l’incomparable.
[7] Nous
le traiterons plus en profondeur par la suite.