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Le Comble de l'Hypocrisie Saoudienne

 

Par Raymond Ibrahim

Frontpagemag.com -12/2/13

Traduction Nancy Verdier

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Il existe peu d’expériences aussi surréalistes que celles de l'Islam et de l'Occident quand ils interagissent, et que le primordialisme (1) du 7ème siècle rencontre le relativisme du 21e siècle. Si on examine la question du " Dialogue interreligieux", en principe, il s'agit d'un sujet décent: les chrétiens, les juifs, les musulmans, et d'autres tentent de parvenir à un terrain d’entente et à professer leur respect mutuel. Mais que fait-on des contradictions flagrantes qui surgissent quand une nation violant les  droits de l'homme, lance des appels au «dialogue», tout en appliquant l'intolérance religieuse sur sa propre terre?

C’est le cas de l’'Arabie Saoudite. Berceau de l'islam, le royaume d'Arabie est aussi la seule nation musulmane qui parraine régulièrement des initiatives interreligieuses en Occident – tandis qu’à domicile, la politique intérieure officielle de ce pays est de diaboliser et persécuter les religions avec lesquelles il prétend vouloir entretenir un dialogue interreligieux.

Retour en 2008, à titre d'exemple, l'objectif déclaré de ce geste considéré comme sans précédent du roi saoudien Abdallah -- qui fit un vibrant plaidoyer pour le dialogue entre les musulmans, les chrétiens et les juifs, allant même jusqu'à faire référence à ces deux derniers comme nos frères -- était de développer le respect entre les religions. 

L'initiative la plus récente du monarque saoudien s’est concrétisée le 26 Novembre 2012, lors de l’inauguration du Centre International pour le dialogue interreligieux et interculturel du Roi Abdullah Bin Abdulaziz, dans la capitale autrichienne, Vienne. Selon son propre site Web, "le centre a été créé afin d’initier, d'habiliter et d'encourager le dialogue entre les adeptes des différentes religions et cultures du monde entier".  Prêtant une légitimité internationale à ce geste de bonne volonté de l’Arabie Saoudite, le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki-moon était présent dans l’assistance lors de la séance d’ouverture.

 

Tout cela semble à première vue aller dans le bon sens, sauf à considérer  les multiples incongruités, les nombreuses absurdités – manifestées en premier lieu par le simple fait que le Sheikh d’Arabie, Abdul Rahman Al-Soudais, congratulé pour le centre autrichien cité comme preuve que l'islam est une religion de dialogue et de  compréhension et non pas une religion de haine, de fanatisme et de violence , a lui-même désigné les juifs comme "des singes et des porcs" et les chrétiens comme "les adorateurs de la croix".

Il n'est pas un cheikh simple et banal: il est l'imam désigné par le gouvernement de la Grande Mosquée d'Arabie Saoudite à la Mecque – le lieu le plus saint de l’Islam, où les chrétiens, les juifs, et d'autres sont régulièrement condamnés et maudits au cours des prières des fidèles.

Mais il n’y a rien de surprenant à cela. Même le plus récent des rapports internes du Département d'Etat sur la liberté religieuse en Arabie Saoudite note que "La liberté de religion n'est ni reconnue ni protégée par la loi et qu’elle est sévèrement limitée dans la pratique. L'exercice public de toute autre religion que l'islam est interdit, et il n'y a pas de séparation entre l'État et la religion".

Et c'est là le point essentiel. L'Arabie saoudite a comme marque de fabrique l'intolérance religieuse qui n'est ni un produit de la "rue arabe", ni celui du terrorisme ou de la violence populaire. C’est un produit institutionnalisé, mis en pratique par l'Etat lui-même. En d'autres termes, l'intolérance religieuse est pratiquée par ceux-là mêmes qui prétendent rechercher un dialogue avec les chrétiens et les juifs sous l'égide de la "tolérance et du respect mutuel".

 

Dans ce contexte, de quoi exactement veulent-ils parler?

Veulent-ils parler de la façon dont le Grand Mufti d'Arabie Saoudite - encore un autre responsable religieux de premier rang - déclare qu'il est "nécessaire de détruire toutes les églises de la région", en fondant son jugement sur les commandements du prophète musulman Mahomet?

Veulent-ils parler de la façon dont, malgré les promesses de réformer ses manuels scolaires, le système éducatif saoudien continue d'endoctriner les enfants musulmans à la haine et à l'incitation à la haine, en enseignant que "les chrétiens sont les ennemis des croyants et que les singes sont les gens du sabbat, les juifs ; et les porcs sont les infidèles de la communion de Jésus, les chrétiens ?" Rien d’étonnant à ce que l'imam de la Grande Mosquée de La Mecque utilise de tels sobriquets – tout en s’extasiant sur le Centre de Vienne sponsorisé par l’Arabie Saoudite pour une initiative de "dialogue".

 

Peut-être veulent-t-ils parler de cette femme saoudienne de 28 ans, Maryam, qui, après s'être convertie au christianisme, a dû fuir le pays, et serait actuellement cachée clandestinement en Suède, alors même que les autorités tentent de l’extrader vers l’Arabie Saoudite pour y être confrontée à des accusations d'apostasie, crime pour lequel elle encourt la peine de mort ? Au préalable Maryam avait dit que, "si elle a été élevée dans la haine du judaïsme et du christianisme, elle a appris à aimer ces religions car elle a trouvé la paix dans le christianisme"

 

Veulent-ils parler de la façon dont 35 Éthiopiens chrétiens ont été arrêtés et maltraités pendant presque un an, simplement pour avoir tenu un service de prières dans une maison privée? Après sa libération, l'un des chrétiens a observé que "Les autorités saoudiennes ne tolèrent aucune autre religion que l'islam. Ils considèrent les non-musulmans comme des mécréants. Ils sont pleins de haine contre les non-musulmans".

 

Ou veulent-ils parler de la façon dont en Décembre dernier 2012, la police religieuse saoudienne a pris d'assaut une maison dans la province d'Al-Jouf, et a détenu plus de 41 invités pour, selon les termes de la déclaration de la police, "complot visant à célébrer Noël" ? 

 

Bien sûr, le Centre international de Vienne du roi Abdallah pour le dialogue interreligieux et interculturel ne souhaite parler aucunement de ces exemples d’intolérance religieuse exécutés par l’état. Au contraire. L'existence du centre a pour but  de détourner les critiques envers l'Arabie Saoudite et autres pays musulmans, pour les réorienter contre l'Occident. Cela a été amplement démontré au cours de colloque inaugural du centre, quand Ekmeleddin Ihsanoglu, le chef de l'Organisation de la Coopération islamique, a exhorté les gouvernements occidentaux à adopter des lois contre l'islamophobie, parce qu'"elle conduit aux crimes haineux et à ce titre, elle génère la peur, des sentiments de stigmatisation, de marginalisation, d'aliénation et de rejet".  En d'autres termes, le dialogue interreligieux parrainé par l’Arabie Saoudite a pour but de faire taire la vérité, de faire pression sur l'Occident pour qu’il fasse preuve de tolérance envers les musulmans en leur épargnant toute critique concernant les persécutions qu’ils infligent aux autres, critiques qui seraient présentées comme de l’islamophobie».

 

Il reste encore à déterminer ce qui est le plus surréaliste, le plus incroyable: que l'Arabie Saoudite, qui est en tête du classement dans l’intolérance religieuse imposée par l’état, parraine le dialogue interreligieux, ou que les Occidentaux, avec dans leurs rangs les éminences religieuses dont les fidèles sont persécutés quotidiennement par l'intolérance saoudienne et musulmane, avancent en cortège, chacun d’eux le visage bâillonné et impassible.

 

Note du traducteur

(1) Primordialisme : principe qui confond nation et ethnie