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LAMENTATION A OSLO

 

Par Elena Bonner, veuve d’Andreï Sakharov

 

Jerusalem Post, 24 mai 2009

Texte anglais original "Lament in Oslo"

Adaptation française  D.E. Guez & mis en ligne sur le site www.upjf.org

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Le Président du Forum, Thor Halvorssen, qui m’a invitée à cette conférence, m’a demandé de parler de ma vie, des souffrances que j’ai endurées et de la manière dont je les ai surmontées. Mais aujourd’hui, tout cela me semble vraiment inutile. Je dirai seulement quelques mots sur ma vie.

A l’âge de 14 ans, je suis restée sans mes parents. Mon père a été exécuté, ma mère a passé 18 ans en prison et en exil. Ma grand-mère nous a élevés, moi et mon jeune frère. Le poète Vladimir Kornilov, qui a eu le même destin, a écrit : « Dans ces années-là il semblait que nous n’avions pas de mères. Nous avions des grands-mères ».

Il y avait des centaines de milliers de ces enfants-là. Ilya Ehrenburg nous a nommés « les étranges orphelins de 1937 ».

Puis est arrivée la guerre. Ma génération a été coupée presque jusqu’aux racines par la guerre ; mais j'ai eu de la chance, j’en suis revenue. Je suis revenue dans une maison vide. Ma grand-mère était morte de famine dans le siège de Leningrad. Puis est venue l'époque d'un appartement commun, l’époque des études de médecine, pendant six années de privations, l’époque de l'amour, de mes deux enfants et de la pauvreté d'un médecin soviétique. Mais je n'étais pas la seule, tout le monde vivait ainsi. Puis vint ma période de dissidence suivie de l'exil. Mais Andreï Sakharov et moi étions ensemble, et c'était un vrai bonheur !

Aujourd'hui, si je fais un bilan de ma vie (à l'âge de 86 ans j'essaie de faire cela chaque jour où je suis encore vivante), je peux le faire avec trois mots. Ma vie a été typique, tragique et belle. Que ceux qui veulent des détails lisent mes deux livres « Seule ensemble », et « Mères et filles ». Ils ont été traduits dans de nombreuses langues. Lisez les mémoires de Sakharov. Il est vraiment dommage que ses journaux n'aient pas été traduits ; ils ont été publiés en Russie en 2006. Apparemment les pays occidentaux ne sont désormais plus intéressés par Sakharov.

L'Ouest n'est pas très intéressé par la Russie non plus, un pays qui n'a plus de vraies élections, plus de tribunaux indépendants ou de presse libre. La Russie est un pays où journalistes, activistes des droits de l'homme et immigrés sont régulièrement tués,  presque quotidiennement. Une corruption extrême fleurit, d'une manière et avec une ampleur qui n'avaient jamais existé auparavant en Russie, ni nulle part ailleurs. Mais de quoi discutent principalement les médias occidentaux ? Du gaz et du pétrole dont la Russie est très riche. L'énergie est son seul atout, et la Russie l'utilise comme un instrument de pression et de chantage. Et il y a aussi un autre sujet qui ne disparaît jamais des journaux : qui gouverne la Russie ? Vladimir Poutine, ou Dimitri Medvedev ? Mais quelle différence cela fait-il, puisque la Russie a complètement perdu la dynamique pour un développement démocratique que nous pensions avoir perçue, au début des années 90. La Russie va rester ce qu'elle est maintenant pendant des décennies, à moins qu'il ne se produise un bouleversement violent.

Dans les années qui suivirent la chute du mur de Berlin, il s'est produit dans le monde des changements incroyables durant une période exceptionnellement courte. Mais est-ce que le monde est devenu meilleur ou plus prospère pour les 6 milliards 800 millions d'individus qui vivent sur notre petite planète ?

Personne ne peut répondre clairement à cette question malgré toutes les réalisations de la science et de la technologie et ce processus que nous avons l'habitude d'appeler « progrès ». Il me semble que le monde est devenu plus inquiétant, plus imprévisible et plus fragile. Cette inquiétude, cette instabilité et cette fragilité sont ressenties, dans une certaine mesure, par tous les pays et tous les individus. Et la vie civique et politique devient de plus en plus virtuelle, comme une image sur un écran d'ordinateur.
Même comme cela, la vision de la vie transmise par la télévision, les journaux, ou la radio, reste la même, avec, sans fin, des conférences, des sommets, des forums et des concours, allant du concours de beauté au concours du plus gros mangeur de sandwiches. Ils disent que les gens se rassemblent, mais, en réalité, ils deviennent étrangers les uns aux autres.

 

Et ce n'est pas parce qu'une crise économique a soudainement éclaté, ou parce que la grippe aviaire se développe. Cela a commencé le 11 septembre 2001. D'abord la colère et l'horreur, provoquées par les terroristes qui ont détruit les tours jumelles du World Trade Center et par leurs complices à Londres, Madrid et d'autres villes, et par les shahids ['martyrs'] qui commettent des attentats-suicide en se faisant exploser dans des espaces publics comme des discothèques ou des salles de mariage, et dont les familles recevaient de Saddam Hussein 25 000 $ chacune.

Plus tard, (Georges W.) Bush a été déclaré responsable de tout, et avec lui, comme toujours, les Juifs, c'est-à-dire Israël. On en a eu un exemple avec la première conférence de Durban et le développement de l'antisémitisme en Europe, comme l'a relevé dans un discours, il y a quelques années, Romano Prodi. Puis, est arrivé Durban II, avec Ahmadinejad comme principal orateur, qui a proposé d'annihiler Israël. 

 

Donc c'est d'Israël et des Juifs que je vais parler. Et pas seulement parce que je suis juive, mais, par-dessus tout, parce que le conflit du Moyen-Orient, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, a été une plate-forme pour des jeux politiques et des paris de la part des grandes puissances, des pays arabes et de certains politiciens qui tentent, par le biais du prétendu "processus de paix", de se mettre en valeur et de recevoir peut-être un prix Nobel de la paix.

Autrefois, le prix Nobel de la paix était la plus haute récompense morale de notre civilisation. Mais, après décembre 1994, lorsque Yasser Arafat est devenu l’un des trois nouveaux lauréats, la valeur morale de cette distinction a été sapée. Je n'ai pas toujours accueilli avec joie chaque sélection du comité Nobel du Parlement norvégien, mais celle-ci m'a choquée. Et jusqu'à aujourd'hui, je ne peux comprendre ni accepter le fait que Andreï Sakharov et Yasser Arafat partagent maintenant, à titre posthume, l’honneur de faire partie du club des lauréats du prix Nobel.
Dans de nombreux écrits de Sakharov (dans ses livres, « Coexistence et liberté intellectuelle », « Mon pays et le monde », dans ses articles et dans ses interviews) Andreï Dmitrievich a écrit et parlé d'Israël. Je possède une collection de citations de ses écrits sur ce sujet. Et s'ils étaient publiés en Norvège, alors, de nombreux Norvégiens seraient étonnés de constater combien leur vision contemporaine d’Israël diffère totalement de celle de Sakharov.

Voici quelques citations de Sakharov :

- « Israël a un droit incontestable à exister ».

- «Israël a le droit d'exister dans des frontières sûres ».

- « Toutes les guerres menées par Israël ont été justes et lui ont été imposées par l'irresponsabilité des dirigeants arabes ».

-  « Avec tout l'argent qui a été investi dans le problème des Palestiniens, il aurait été possible, depuis bien longtemps, de les réinstaller dans des pays arabes, en leur procurant de bonnes conditions de vie ».

 

Durant toutes les années d’existence d'Israël, il y a toujours eu une guerre. Des guerres victorieuses, et également des guerres qu'Israël n'a pas été autorisé à gagner. Chaque jour et tous les jours - littéralement chaque jour -, on s’attend à un attentat terroriste, ou à une nouvelle guerre. Nous avons vu les initiatives de paix d'Oslo et la poignée de mains [entre Arafat et Rabin] à camp David, et la « Road Map » [Feuille de Route], et aussi [le slogan] « La terre en échange de la paix » (il n'y a pas beaucoup de terre : si l’on se trouve dans une partie d’Israël, par une journée claire, on peut voir l'autre partie à l’œil nu).

Il y a maintenant un nouveau slogan à la mode (en fait, il est ancien) : « Deux états pour deux peuples ». Ça paraît bien. Et il n'y a pas de contestation au sujet de l'initiative de paix du Quartet, comprenant les États-Unis, les Nations unies, l'Union Européenne et la Russie (grande faiseuse de paix, avec sa guerre en Tchétchénie, et sa provocation en Avkhazie-Ossétie). Le Quartet et les Pays arabes, les leaders palestiniens (du Hamas et du Fatah) ont accru leurs exigences concernant Israël. Je parlerai d'une seule d’entre elles : qu'Israël accepte le retour des réfugiés palestiniens. Et ici, il est nécessaire de parler un peu d'histoire et de démographie.

Selon la définition officielle des Nations unies, sont considérés comme réfugiés ceux qui ont fui la violence et les guerres, mais pas leurs descendants qui sont nés dans un autre pays. A une époque, les réfugiés palestiniens et les réfugiés juifs des pays arabes représentaient un nombre à peu près égal, environ 700 à 800 000 individus. L’Etat d’Israël, qui venait d’être créé, a absorbé environ 600 000 de ces juifs. Ils furent officiellement reconnus comme réfugiés par la résolution 242 des Nations Unies, mais n’eurent droit à aucune assistance de l’ONU. Les Palestiniens, au contraire, sont considérés comme des réfugiés non seulement à la première génération, mais à la deuxième, la troisième, et même, maintenant, à la quatrième génération. Selon le rapport des travaux de l'organisme d'aide humanitaire de l'ONU, le nombre de réfugiés palestiniens enregistrés est passé de 914 000 en 1950, à plus de 4,6 millions en 2008, et il continue d'augmenter en raison de la croissance démographique naturelle. Toutes ces personnes ont les droits des réfugiés palestiniens et celui de recevoir de l'aide humanitaire.

La totalité de la population d'Israël compte 7,5 millions d'habitants, parmi lesquels il y a deux millions et demi d'Arabes qui se nomment eux-mêmes Palestiniens. Imaginez alors [ce qui se passerait en] Israël, si 5 millions d'Arabes de plus s'y engouffraient. Le nombre des Arabes dépasserait considérablement celui de la population juive. Ainsi, créé à côté d’Israël, et il y aurait un État palestinien "nettoyé" de Juifs, parce qu'en plus de la demande du retour des réfugiés palestiniens en Israël, il y a aussi la demande que l'on "nettoie" la Judée et Samarie de [leurs] Juifs et qu'on la rende aux Palestiniens, tandis qu’à Gaza, aujourd'hui, il n'y a plus désormais un seul juif.

Le résultat est à la fois étrange et terrifiant, parce qu'Israël sera véritablement détruit. Il est terrifiant de voir la mémoire courte de l'auguste Quartet faiseur de paix, de leurs dirigeants et de leurs citoyens s’ils laissent cela arriver. Parce que ce que signifie la formule, « deux Etats pour deux peuples », c’est la création d'un État, ethniquement nettoyé de juifs et d'un deuxième Etat, candidat potentiel au même nettoyage. Une Terre Sainte Judenfrei - le rêve d'Adolphe Hitler ! - se réalise enfin. Alors - que ceux qui sont encore capables de réfléchir le fassent -, quelle est la partie qui porte en elle les germes du fascisme, aujourd'hui ?

 

Et voici une autre question qui m'a hantée pendant très longtemps. C'est une question pour mes collègues des droits de l'homme. Pourquoi le sort du soldat israélien Gilad Shalit ne vous trouble-t-il pas de la même manière que celui des prisonniers de Guantanamo ?

Vous vous êtes battus et avez obtenu que le Comité International de la Croix-Rouge, des journalistes et des avocats puissent visiter Guantanamo. Vous connaissez les conditions de vie dans la prison, la routine quotidienne des prisonniers, leur nourriture. Vous avez rencontré des prisonniers soumis à la torture. Le résultat de vos efforts a été l'interdiction de la torture, ainsi qu’une loi pour fermer cette prison. Le président Obama l’a signée dans les premiers jours de son arrivée à la Maison-Blanche. Et, bien qu'il ne sache pas quoi faire des prisonniers de Guantanamo, comme le président Bush avant lui, il y a un espoir que la nouvelle administration trouve une solution.

Mais depuis deux ans [en fait, près de trois que Shalit est retenu prisonnier par des terroristes, la communauté mondiale des droits de l'homme n'a rien fait pour sa libération. Pourquoi ? C'est un soldat blessé, et [à ce titre] il est sous la protection pleine et entière des conventions de Genève. Ces conventions stipulent clairement que la prise d'otages est interdite, que l'on doit permettre aux représentants de la Croix-Rouge de rendre visite aux prisonniers de guerre, en particulier quand ils sont blessés ; et il y a bien d'autres choses encore, dans les conventions de Genève, sur les droits de Shalit.

Le fait que des représentants du Quartet négocient avec les gens qui détiennent Shalit dans un lieu et des conditions inconnus, démontre, de manière éclatante, leur mépris des documents internationaux afférents aux droits [des personnes] et leur total nihilisme juridique. Les militants des droits de l'homme auraient-ils oublié, eux aussi, ces textes fondamentaux du droit international ?

Et pourtant, je pense toujours (et certains me jugeront naïve) que le premier pas, minuscule mais réel, vers la paix, doit être la libération de Shalit. Libération, et non pas échange contre 1000 ou 1500 prisonniers qui purgent leur peine dans les prisons israéliennes pour des crimes réels. Revenant à ma question de savoir pourquoi les militants des droits de l'homme restent silencieux, je ne trouve aucune réponse, sauf que Shalit est un soldat israélien, Shalit est un Juif. Alors, là encore, il s'agit d'un antisémitisme conscient ou inconscient. Là encore, il s'agit de fascisme.

 

Trente-quatre années se sont écoulées depuis le jour où je suis venue dans cette ville pour représenter mon mari, Andreï Sakharov à la cérémonie des prix Nobel 1975. J'étais alors amoureuse de la Norvège. La réception que j'ai reçue m'a remplie de joie. Aujourd'hui, je ressens préoccupation et espoir (c'est le titre que Sakharov a donné à son essai de 1977, rédigé à la demande du comité Nobel) :

- Préoccupation à cause de l'antisémitisme et du sentiment anti-israélien grandissant partout en Europe et ailleurs.

- Espoir, pourtant, que tous ces pays, leurs dirigeants et leurs peuples se souviendront du credo moral de Sakharov et l’adopteront : « En définitive, le choix moral s'avère être aussi le choix le plus pragmatique ».

 

 

Lament in Oslo


Jerusalem Post -

From a speech to the Freedom Forum in Oslo on May 19.

 

In his invitation to this conference, the president of the forum, Thor Halvorssen, asked me to talk about my life, the suffering I have endured and how I was able to bear it all. But today all that seems to me quite unnecessary.

So I will say only a few words about myself.

At the age of 14, I was left without my parents. My father was executed, my mother spent 18 years in prison and exile. My grandmother raised me and my younger brother. The poet Vladimir Kornilov, who suffered the same fate, wrote: "And it felt that in those years we had no mothers. We had grandmothers." There were hundreds of thousands of such children. Ilya Ehrenburg called us "the strange orphans of 1937."

Then came the war. My generation was cut off nearly at the roots by the war, but I was lucky. I came back from the war. I came back to an empty house. My grandmother had died of starvation in the siege of Leningrad. Then came a communal apartment, six half-hungry years of medical school, falling in love, two children and the poverty of a Soviet doctor. But I was not alone in this. Everyone lived this way. Then there was my dissident period followed by exile. But Andrei [Sakharov] and I were together! And that was true happiness.

Today, summing up my life (at age 86, I try to sum up my life every day I am still alive), I can do so in three words. My life was typical, tragic and beautiful. Whoever needs the details - read my two books, Alone Together and Mothers and Daughters. They have been translated into many languages. Read Sakharov's Memoirs. It's a pity his diaries haven't been translated; they were published in Russia in 2006. Apparently, the West isn't interested now in Sakharov.

THE WEST isn't very interested in Russia either, a country that no longer has real elections, independent courts or freedom of the press. Russia is a country where journalists, human rights activists and migrants are killed regularly, almost daily. And extreme corruption flourishes of a kind and extent that never existed earlier in Russia or anywhere else. So what do the Western mass media discuss mainly? Gas and oil - of which Russia has a lot. Energy is its only political trump card, and Russia uses it as an instrument of pressure and blackmail. And there's another topic that never disappears from the newspapers - who rules Russia? [Vladimir] Putin or [Dimitry] Medvedev? But what difference does it make, if Russia has completely lost the impulse for democratic development that we thought we saw in the early 1990s. Russia will remain the way it is now for decades, unless there is some violent upheaval.

During the years since the fall of the Berlin Wall, the world has experienced incredible changes in an exceptionally short period. But has the world become better, or more prosperous for the 6 billion 800 million people who live on our small planet? No one can answer that question unambiguously, despite all the achievements of science and technology and that process which we customarily call "progress." It seems to me that the world has become more alarming, more unpredictable and more fragile. This alarm, unpredictability and fragility are felt to some extent by all countries and all individuals. And civic and political life becomes more and more virtual, like a picture on a computer screen.

Even so, the picture of life, formed by television, newspaper or radio remains the same - there is no end to the conferences, summits, forums and competitions from beauty contests to sandwich-eating ones. They say people are coming together - but in reality, they are growing apart.

And that isn't because an economic depression suddenly burst forth, and swine flu to boot. This began on September 11, 2001. At first, anger and horror was provoked by the terrorists who knocked down the Twin Towers of the World Trade Center and by their accomplices in London, Madrid and other cities, and by the shahids, suicide bombers who blew themselves up at public spaces like discotheques and wedding parties whose families were rewarded $25,000 each by Saddam Hussein. Later, [George W.] Bush was blamed for everything, and as always, the Jews - that is, Israel. An example was the first Durban Conference, and the growth of anti-Semitism in Europe, noted several years ago in a speech by Romano Prodi. Then there was Durban-2; the main speaker was [Mahmoud] Ahmadinejad proposing to annihilate Israel.

SO IT IS about Israel and the Jews that I will speak. And not only because I am Jewish, but above all because the Middle Eastern conflict since the end of World War II has been a platform for political games and gambling by the great powers, the Arab countries and individual politicians, striving, through the so-called "peace process," to make a name for themselves, and perhaps win a Nobel Peace Prize. At one time, the Nobel Peace Prize was the highest moral award of our civilization. But after December 1994, when Yasser Arafat became one of the three new laureates, its ethical value was undermined. I haven't always greeted each selection of the Nobel Committee of the Storting [Norwegian parliament] with joy, but that one shocked me. And to this day, I cannot understand and accept the fact that Andrei Sakharov and Yasser Arafat, now posthumously, share membership in the club of Nobel laureates.

In many of Sakharov's publications (in his books Progress, Coexistence and Intellectual Freedom and My Country and the World, in his articles and in his interviews), Andrei Dmitrievich wrote and spoke about Israel. I have a collection of citations of his writing on this topic. If it were published in Norway, then many Norwegians would be surprised at how sharply their contemporary view of Israel differs from the view of Sakharov.

Here are several citations from Sakharov: "Israel has an indisputable right to exist"; "Israel has a right to existence within safe borders"; "All wars that Israel has waged have been just, forced upon it by the irresponsibility of Arab leaders"; "With all the money that has been invested in the problem of Palestinians, it would have been possible long ago to resettle them and provide them with good lives in Arab countries."

THROUGHOUT THE YEARS of Israel's existence there has been war. Victorious wars, and also wars which Israel was not allowed to win. Each and every day - literally every day - there is the expectation of a terrorist act or a new war. We have seen the Oslo peace initiatives and the Camp David handshake and the road map and land for peace (there is not much land - from one side of Israel on a clear day you can see the other side with your naked eye).

 

Now, a new motif is fashionable (in fact it's an old one): "Two states for two peoples." It sounds good. And there is no controversy in the peacemaking Quartet, made up of the US, the UN, the EU and Russia (some great peacemaker, with its Chechen war and its Abkhazian-Ossetian provocation). The Quartet, and the Arab countries, and the Palestinian leaders (both Hamas and Fatah) put additional demands to Israel. I will speak only of one demand: that Israel accept back the Palestinian refugees. And here a little history and demography are needed.

According to the UN's official definition, refugees are considered those who fled from violence and wars, but not their descendants who are born in another land. At one time the Palestinian refugees and the Jewish refugees from Arab countries were about equal in number - about 700,000-800,000. The newly-created state Israel took in Jews (about 600,000). They were officially recognized as refugees by UN Resolution 242, but not provided with any UN assistance. Palestinians, however, are considered refugees not only in the first generation, but in the second, third and now even in the fourth generation. According to the UN Works and Relief Agency's report, the number of registered Palestinian refugees has grown from 914,000 in 1950 to more than 4.6 million in 2008, and continues to rise due to natural population growth. All these people have the rights of Palestinian refugees and are eligible to receive humanitarian aid.

The entire population of Israel is about 7.5 million, of which there are about 2.5 million ethnic Arabs who call themselves Palestinians. Imagine Israel then, if another 5 million Arabs flood into it; Arabs would substantially outnumber the Jewish population. Thus created next to Israel will be a Palestinian state cleansed of Jews, because in addition to the demand that Palestinian refugees return to Israel, there is also the demand that Judea and Samaria are cleansed of Jews and turned over to Palestinians - while in Gaza today there is not a single Jew already.

The result is both strange and terrifying, because Israel will essentially be destroyed. It is terrifying to see the short memory of the august peacemaking Quartet, their leaders and their citizens if they let this happen. Because the plan "two states for two peoples" is the creation of one state, ethnically cleansed of Jews, and a second one with the potential to do the same. A Judenfrei Holy Land - the dream of Adolph Hitler come true at last. So think again, those who are still able, who has a fascist inside him today?

AND ANOTHER question that has been a thorn for me for a long time. It's a question for my human rights colleagues. Why doesn't the fate of the Israeli soldier Gilad Schalit trouble you in the same way as does the fate of the Guantanamo prisoners?

You fought for and won the opportunity for the International Committee of the Red Cross, journalists and lawyers to visit Guantanamo. You know prison conditions, the prisoners' everyday routine, their food. You have met with prisoners subjected to torture. The result of your efforts has been a ban on torture and a law to close this prison. President Obama signed it in the first days of his coming to the White House. And although he, just like president Bush before him, does not know what to do with the Guantanamo prisoners, there is hope that the new administration will think up something.

But during the two years Schalit has been held by terrorists, the world human rights community has done nothing for his release. Why? He is a wounded soldier, and fully falls under the protection of the Geneva Conventions. The conventions say clearly that hostage-taking is prohibited, that representatives of the Red Cross must be allowed to see prisoners of war, especially wounded prisoners, and there is much else written in the Geneva Conventions about Schalit's rights. The fact that representatives of the Quartet conduct negotiations with the people who are holding Schalit in an unknown location, in unknown conditions, vividly demonstrates their scorn of international rights documents and their total legal nihilism. Do human rights activists also fail to recall the fundamental international rights documents?

And yet I still think (and some will find this naïve) that the first tiny, but real step toward peace must become the release of Schalit. Release, and not his exchange for 1,000 or 1,500 prisoners who are in Israeli prisons serving court sentences for real crimes.

Returning to my question of why human rights activists are silent, I can find no answer except that Schalit is an Israeli soldier, Schalit is a Jew. So again, it is conscious or unconscious anti-Semitism. Again, it is fascism.

THIRTY-FOUR YEARS have passed since the day when I came to this city to represent my husband, Andrei Sakharov, at the 1975 Nobel Prize ceremony. I was in love with Norway then. The reception I received filled me with joy. Today, I feel Alarm and Hope (the title Sakharov used for his 1977 essay written at the request of the Nobel Committee).

Alarm because of the anti-Semitism and anti-Israeli sentiment growing throughout Europe and even further afield. And yet, I hope that countries, their leaders and people everywhere will recall and adopt Sakharov's ethical credo: "In the end, the moral choice turns out to be also the most pragmatic choice."