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IL FAUT SAUVER NOS MAUVIETTES
Par Emmanuel Navon-
Pr de relations internationales à l'Université de Tel Aviv
Efrat 16/04/10
Adapté pour www.nuitdorient.com par danilette
Dans sa conférence de presse la semaine dernière, le Premier
Ministre Benyamin Nétanyahou a déploré que son
homologue turc n'ait pas cessé d'attaquer verbalement Israël depuis l'opération
Plomb durci. En fait, les salves anti-israéliennes d'Erdogan
ont une longue histoire.
En 2004, Erdogan a appelé Israël
"état terroriste" après l'élimination du Cheikh Yassine. En février
2006, il a accueilli le chef du Hamas, Khaled Mashal
à Ankara. En janvier 2009, il s’est mis en scène par un accès caractériel de
colère à la conférence de Davos en invectivant Shimon Peres, en le traitant
d'"expert en assassinat".
En octobre 2009, la télévision d'État turc a commencé à
diffuser des feuilletons qui montrent des soldats israéliens tuant délibérément
des enfants palestiniens. En novembre 2009, Erdogan a
déclaré qu'il préférait rencontrer le président soudanais Omar El Bachir -- accusé
de crimes de guerre et de génocide par la Cour Internationale de Justice --
plutôt que Benjamin Netanyahou. En mars 2010, Erdogan
a déclaré que Le Mont du Temple, Hébron et le tombeau de Rachel n'avaient
jamais été des sites juifs. La semaine dernière, profitant de son voyage
officiel à Paris, Erdogan a affirmé qu'Israël était
la plus grande menace pour le monde et pour la paix.
Israël a tranquillement supporté les pitreries d'Erdogan sans raison valable. Certes, Avigdor
Liebermann a enfin décidé de répondre en comparant Erdogan
à Chavez et à Kadhafi. Cette réaction a été inefficace et stupide : rien ne
pouvait rendre Erdogan plus heureux que d'être
assimilé à un Don Quichotte antiaméricain. Tout ce que Liebermann aurait dû
faire pour embarrasser Erdogan était de dévoiler son
hypocrisie en mentionnant le génocide arménien, le refus de la Turquie
d'accorder un droit au retour aux réfugiés grecs, suite à la première guerre
mondiale, l'occupation turque de Chypre, le mur de l'apartheid et les colons de
Chypre, le refus catégorique de la Turquie d'accepter la création d'un État
kurde et l'obstination de la Turquie à conserver un territoire pris à la Syrie
-- la province d'Alexandrette.
Hélas, Israël est une mauviette et pas seulement avec la
Turquie. Israël n'oserait jamais contrarier l'Égypte en se plaignant du fait
que les médias contrôlés par l'État de Moubarak sont pleins d'antisémitisme,
d'accusations de crimes rituels et de négation de l'holocauste. Lorsque que le
Ministre de la culture égyptien Farouk Hosni a déclaré qu'il brûlerait tout
livre israélien [et juif] qu'il trouverait dans son pays, Israël n'a pas daigné
broncher. Et quand le gouvernement égyptien a soutenu la candidature d'Hosni
pour le poste de Secrétaire Général de l'Unesco, Israël n'a pas voté contre,
parce que Moubarak nous avait demandé de ne pas le faire. En revanche, des
intellectuels juifs à travers le monde -- comme Élie Wiesel et Bernard Henri
Lévy -- ont clamé haut et fort leur opposition à la candidature de Hosni. Des
juifs de diaspora ont plus de courage et d'assurance que l'État juif.
La question qui se pose est :
pourquoi ? Je me souviens avoir eu une conversation avec mes élèves
à ce sujet. Leur réponse a été qu'Israël ne peut pas se permettre d'avoir de
l'assurance. Quand je leur ai demandé pourquoi, leur réponse a été qu'Israël
doit son existence à la bonne volonté des nations et que nous ne pouvons donc
pas perturber ceux qui nous tolèrent. Je crois que
c'est la racine du problème et que ce problème est vraiment grave.
Nos pères fondateurs n’ont certainement pas souffert de
complexe d'infériorité. Prenez Abba Eban et Menahem
Begin. Ils avaient des opinions politiques différentes à propos de presque
tout, mais ils étaient cultivés, avaient leur franc-parler et étaient fiers
d'être juifs. Ils savaient qu'Israël ne doit pas son existence à la bonne
volonté des nations mais à son histoire exceptionnelle et à son courage. Ils
défendaient Israël sans demander pardon et avec clarté, sans avoir la moindre
difficulté à remettre les gens à leur place.
Comparez, par exemple, la crise actuelle entre les
États-Unis et Israël avec celle qui avait éclaté il y a trois décennies. En
décembre
Les jeunes Israéliens sont souvent surpris d'entendre que le
gouvernement américain nous a laissés tomber. Pareil avec la France. Au début
des années 80, le Ministre des Affaires Etrangères français, Claude Cheysson déclarait dans des conférences sur Israël, qu'il
était nécessaire d'établir un État contrôlé par l'OLP en Cisjordanie et à Gaza.
Begin alors avait décidé de répondre publiquement
que la France devait accepter la création en Corse d'un État contrôlé par le
FLNC. Cheysson s’était fâché et avait demandé
à son gouvernement de publier une déclaration condamnant "la crise de nerf
de Begin". Mais le Président Mitterrand a pensé que cela ridiculiserait la
France. "Begin a raison" a-t-il déclaré durant la réunion
hebdomadaire du gouvernement le 24 février 1982. "Ce qu'il a dit est à
la fois irritant et vrai. Après tout, la Corse n’est française que seulement
depuis 1768. C’est plus récent qu’Abraham".
Alors que le Sabra israélien, qui était censé représenté le
juif nouveau et fier, se comporte avec les dirigeants étrangers comme un intermédiaire juif médiéval, les dirigeants
d'Israël fiers et au franc-parler ont tous étés d'anciens juifs de la diaspora.
Je ne dis pas que les jeunes Israéliens doivent retourner à l'exil pour
apprendre les bases de la diplomatie et du leadership, qu'à Dieu ne plaise.
L'histoire, la rhétorique et la fierté nationale peuvent être apprises en
Israël.
Le problème est qu'ils ne le sont pas. Notre système éducatif, en particulier dans les
universités, n'enseigne pas la culture générale, l'histoire juive et la pensée
critique. Et c'est là que le problème commence. Au lieu d'apprendre
à penser par eux-mêmes, d'apprendre l'histoire juive et d’être formés aux
compétences de persuasion et de déduction selon l’enseignement de nos maîtres
du Talmud et de Platon, nos étudiants perdent une grande partie de leur temps
dans ce domaine absurde et charlatanesque appelé "la théorie des
relations internationales".
Nous avons besoin que nos jeunes générations retrouvent la confiance en soi et la fierté de nos pères fondateurs et se rendent compte comme eux, que le monde ne nous respectera pas tant que nous ne nous respecterons pas nous-mêmes.
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