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Les Palestiniens dans le Monde Arabe: Pourquoi
ce Silence?
Par Khaled Abou Toameh, journaliste palestinien
Pour Hudson
Institute
26/07/2010
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À quand remonte la dernière fois où le Conseil de Sécurité des Nations unies s’est réuni pour condamner un gouvernement arabe pour les mauvais traitements infligés aux Palestiniens? Comment se fait-il que les groupes et les individus à travers le monde, qui défendent les Palestiniens, se taisent quand la Jordanie révoque la nationalité à des milliers de personnes "d’origine palestinienne"?
Le sort des Palestiniens vivant dans les pays arabes en général, et au Liban en particulier, est toujours ignoré par les médias occidentaux. Comment peuvent-ils fermer les yeux sur le fait que l’Egypte, la Syrie, le Liban, la Jordanie et beaucoup d’autres pays arabes continuent d’imposer des restrictions sévères sur les déplacements des Palestiniens?
Et où sont toutes ces personnes en ce moment, à l’heure où le
Liban est en plein débat à propos de la question "faut-il permettre aux Palestiniens de vivre
normalement parmi nous ou non ?" Pourquoi ne se battent-elles pas
médiatiquement pour exister comme elles le font au quotidien contre Israël?
Qu’il est triste de n’entendre personne. De voir que tout le Moyen-Orient détourne
son regard de là. Qu’aucun commentateur européen ne se prend au jeu de la
vérité. Une information concernant les Palestiniens qui ne serait pas présentée
sous un angle anti-israélien n’est donc pas intéressante pour Le Monde, le
Figaro, ou Libé (et l’Huma, n'en parlons pas!)?
La démolition d’un bâtiment appartenant à des Arabes de Jérusalem est illégale
pour la plupart des journalistes européens… Et ces destructions de maisons
construites sans autorisations sont beaucoup plus importantes que les lois
d’apartheid mises en place partout dans le monde arabe pour se prévenir de la
vermine palestinienne?
Non seulement les Palestiniens vivant au Liban n’ont pas le droit d’acheter des terres ou des maisons, mais ils n’ont pas accès aux soins de santé, ils n’ont pas le droit de devenir fonctionnaire ou de travailler dans plusieurs corps de métier… Quelqu’un peut-il imaginer ce que serait la réaction de la communauté internationale si, demain, Israël adoptait une loi qui interdirait à ses citoyens arabes de travailler comme chauffeurs de taxi, journalistes, médecins, cuisiniers, serveurs, les ingénieurs et avocats? Ou si le ministère israélien de l’Éducation publiait une directive interdisant aux enfants arabes de s’inscrire dans les universités israéliennes ?
Mais qui a dit que les autorités libanaises n’ont rien fait
pour "améliorer" la situation? En fait, les Palestiniens vivant dans
ce pays devraient être reconnaissants envers le gouvernement libanais. Jusqu’en
2005, la loi interdisait aux Palestiniens de travailler dans 72 professions.
Maintenant, la liste des emplois interdits a été réduit
à 50.
Pourtant, les Palestiniens ne sont toujours pas autorisés à être docteur,
journalistes, avocats ou pharmaciens au Liban.
Ironie du sort, il est beaucoup plus facile pour un
Palestinien d’acquérir la citoyenneté américaine et canadienne que d’obtenir la
nationalité d’un pays arabe. Dans le passé, un Palestinien, vivant en
Judée-Samarie et dans la bande de Gaza, avait droit à la citoyenneté
israélienne, s'il épousait un citoyen israélien.
Les politiciens libanais sont en train de débattre d'une nouvelle législation
qui accorderait des "droits civils" aux Palestiniens. C’est la
première fois en 62 ans qu’on en parle. Le nouveau projet de loi comprend le
droit à la propriété, les prestations de sécurité sociale et les soins médicaux.
Mais la majorité des Libanais semblent être contre cette loi qui ouvrirait la
voie à l’intégration des Palestiniens dans leur société et constituerait
"un fardeau pour l’économie".
Le débat houleux a incité le Parlement à reporter le vote sur le projet de loi
avant le mois prochain. Nadim Khoury, directeur de Human
Rights Watch à Beyrouth, a déclaré: "Le Liban
a marginalisé les réfugiés palestiniens depuis trop longtemps et le Parlement
devrait saisir cette occasion pour tourner la page et mettre fin aux discriminations
contre les Palestiniens". Rami Khouri,
un journaliste libanais, a écrit dans The Daily Star que "tous les pays
arabes maltraitent des millions d’arabes, asiatiques et africains, travailleurs
étrangers qui sont souvent traités comme des esclaves… Les mauvais traitements,
les conditions de vie épouvantables, l’accès limité au marché du travail ainsi
que le déni du droit à la propriété et à la sécurité sociale des Palestiniens
[au Liban] sont la marque de notre manque moral vis-à-vis des Palestiniens".
Les journalistes étrangers
justifient souvent leur incapacité à rapporter les souffrances des Palestiniens
dans le monde arabe, en citant des "problèmes de sécurité" et la
difficulté qu'ils auraient à obtenir un visa d’entrée dans un pays arabe. Mais
cela reste une excuse inacceptable du fait que la plupart d’entre eux peuvent
écrire sur ces questions depuis Paris, Londres ou Berlin. N’est-ce pas ce que
la plupart d’entre eux font de toute façon, quand ils rédigent un article sur
Ramallah ou Gaza?