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Coup d'œil sur l'éventuelle politique d'Obama au Moyen-Orient?

 

Par Daniel Pipes
Jerusalem Post -30 décembre 2008

Version originale anglaise: Insight into Obama's Middle East Policy?
Adaptation française: Anne-Marie Delcambre

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Deux évènements, intervenus plus tôt ce mois-ci, récapitulent les divergences de vue concernant le compte-rendu sur le Moyen-Orient de George W. Bush.

Dans l'un, Bush lui-même a prononcé un discours d'adieu, dans lequel il déclare que « le Moyen-Orient en 2008 est un endroit plus libre, plus plein d'espoir et plus prometteur qu'il ne l'était en 2001. »

Dans l'autre, un journaliste irakien, Muntadar al-Zaidi, a exprimé son manque de respect et son rejet en lançant des chaussures à Bush alors que le président des Etats-Unis parlait à Bagdad, en hurlant après lui: «Ceci est un baiser d'adieu ! Chien ! Chien !»

Ironie de la chose, l'énorme effronterie de Zaidi confirmait la remarque de Bush au sujet de la plus grande liberté. Aurait-il osé lancer des chaussures à Saddam Hussein ?

 

Alors que j'aime bien et pense du bien de Bush, j'ai critiqué sa réaction à l'Islam radical depuis 2000, sa politique israélo-arabe depuis 2002, sa politique sur l'Irak depuis 2003, et sa politique de démocratie depuis 2005. Durant les deux années 2007 et 2008, j'ai critiqué les défauts de l'ensemble de ses efforts au Moyen-Orient.

Aujourd'hui je suis en désaccord avec son affirmation selon laquelle le Moyen-Orient est plus prometteur et plus plein d'avenir qu'en 2000. Faites le bilan d'une partie de ce qui a dégénéré :

- L'Iran a presque construit des armes nucléaires et il semble que soit prévue une attaque dévastatrice à impulsion électro-magnétique contre les Etats-Unis.

- Le Pakistan est en voie de devenir un Etat voyou islamiste, possédant l'arme nucléaire.

- Le prix du pétrole a atteint son plus haut niveau et seul le spectre d'une récession aux USA a plombé le prix du pétrole.

La Turquie est passée d'allié inconditionnel au statut de pays le plus anti-américain dans le monde.

- L'Irak demeure un boulet (ou une paire de chaussures ?) autour du cou américain, encourant des dépenses, des morts et avec un immense potentiel de danger.

- Le rejet de l'existence d'Israël comme Etat juif est devenu plus répandu et plus virulent.

- La Russie a réapparu comme force hostile dans la région.

- Les efforts de démocratie se sont effondrés (Egypte), ont accru l'influence islamiste (Liban), ou ouvert - la voie aux islamistes pour acquérir le pouvoir (Gaza).

- La doctrine de préemption a été discréditée.

 

Les deux succès de Bush, un Irak sans Saddam Hussein et une Libye sans armes de destruction massive (ADM), compensent à peine ces échecs.

Comme on pouvait s'y attendre, les détracteurs de Bush condamnent son action au Moyen-Orient. Bien, mais maintenant qu'ils sont presque sur le siège du conducteur, comment entendent-ils exactement établir la politique de l'Amérique au Moyen-Orient?

Un aperçu est exposé dans « Rétablissement de l'Equilibre : une stratégie du Moyen-Orient pour le prochain Président », une importante étude émanant conjointement de deux "lions" libéraux, la « Brookings institution » (fondée en 1916) et le « Council on Foreign Relations » (fondé en 1921). Apogée d'un effort de 18 mois, « Rétablissement de l'Equilibre » a nécessité 15 spécialistes, 2 coéditeurs (Richard Haass et Martin Indyk), une retraite au centre de conférences Rockfeller, plusieurs voyages d'enquête et une petite armée d'organisateurs et de gestionnaires.

 

Le lecteur est frappé par deux grandes lacunes. Tout d'abord, alors que le livre couvre six thèmes (le conflit israélo-arabe, l'Iran, l'Irak, la lutte contre le terrorisme, la prolifération nucléaire et le développement politique et économique), ses spécialistes n'ont presque rien à dire au sujet de l'islamisme, le défi idéologique le plus urgent de notre temps, ni au sujet de l'intensification nucléaire iranienne, le danger militaire le plus pressant de notre temps. Ils ont également réussi à contourner des questions telles que la Turquie, l'Arabie saoudite, le rejet arabe d'Israël, le danger russe, et le transfert de richesse aux Etats exportateurs d'énergie.

Deuxièmement, l'étude propose des recommandations de politique défaitiste. "Faire rentrer le Hamas au bercail" conseillent Steven Cook et Shibley Telhami, faisant valoir que l'organisation terroriste doit être incluse dans un « gouvernement d'unité palestinienne » et être invitée à accepter le malheureux plan Abdullah de 2002. Il est difficile d'imaginer une seule politique plus contre-productive sur le théâtre d'opérations israélo-arabe.

Sur le thème de l'Iran, Suzanne Maloney et Ray Takeyh rejettent à la fois une attaque des Etats-Unis contre l'infrastructure nucléaire iranienne et la politique de limitation de l'expansion.

Au lieu de cela, dans un changement de paradigme tiré par les cheveux, ils invitent à un engagement avec Téhéran, la connaissance de « certaines réalités désagréables » (tel un pouvoir iranien grandissant) et l'élaboration d'un « cadre pour le règlement » de l'influence iranienne.

Comme ces exemples le suggèrent, un esprit d'apaisement et de faiblesse imprègne « le rétablissement de l'équilibre ». Qu'est-il arrivé aux solides perspectives d'avenir promises pour les intérêts américains ?

Si l'on espère que l'administration Obama ignorera de telles niaiseries désespérées –(une telle bouillie pour les chats, "pablum" ou pabulum) -, l'on craint également que la mentalité du projet « Brookings-CFR » ne domine les années à venir. Si tel était le cas, le rapport de Bush, toutefois insuffisant, semblerait aujourd'hui brillant par rapport à celui de son successeur.