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Argent & Paradis

Les 2 mamelles du pouvoir islamique

 

Par Albert Soued, écrivain http://soued.chez.com pour www.nuitdorient.com  

Le 26 Août 2012

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Le nouveau président égyptien Mohamed Morsi a réussi en 2 mois à accumuler plus de pouvoirs que son prédécesseur Hosni Moubarak en 40 ans. Et il semble vouloir transformer en 1 an l'Egypte en une théocratie, en introduisant la sharia'h dans la nouvelle Constitution et en nommant des Frères Musulmans à la tête de tous les rouages et organes sensibles de l'Etat (Armée, médias, syndicats, judiciaire, administration, gouvernorats des régions…) (1), alors qu'Erdogan n'a réussi à faire qu'une partie de ce programme, en Turquie, en plus de 10 ans ! Comment Morsi s'est-il pris pour réinstaller une dictature dans le pays aussi rapidement et comment s'y prend-t-il pour transporter sa nation 14 siècles en arrière ?

Ce sont les questions que tout le monde se pose en ce moment. Tantawi a sans doute négocié son départ avec Morsi bien avant que celui-ci ne soit élu à la présidence. En 60 ans, la nomenklatura militaire égyptienne a accumulé d'immenses richesses, une part non négligeable du patrimoine national qu'elle ne veut pas perdre. Par ailleurs, l'organisation des Frères Musulmans ne s'est pas privée de prêcher la bonne parole auprès des soldats, puis des officiers subalternes qui, progressivement en 3 ou 4 générations, sont montés en grade. Le maréchal Tantaoui et les officiers démis ou mutés ont trouvé leur compte en retrouvant des fonctions honorifiques, des médailles et l'assurance de conserver leurs acquis financiers, et surtout une superbe et tranquille retraite. Peut-être qu'en bon stratège, Morsi a forcé la dose et concocté avec ses amis du Hamas (2), spécialistes de l'attentat-suicide, une sanglante attaque contre l'armée égyptienne au Sinaï, faisant ainsi coup double. D'une part, il force un peu plus la main des officiers réticents pour qu'ils s'en aillent, en leur démontrant leur incapacité à protéger le pays, d'autre part, il a un prétexte en or – la chasse aux terroristes d'al Qaeda et autres bédouins -- pour réintroduire l'armée au Sinaï (3), contrevenant ainsi aux accords de Camp David, au grand dam de Benjamin Netanyahou et d'Israël.

 

C'est qu'aujourd'hui l'attentat-suicide est entré dans les mœurs moyen orientales. Autrefois, c'était un outil exceptionnel des dirigeants persans cherchant à se débarrasser d'un chef ennemi et actionnant les "hashashin" (origine du mot assassin), des drogués formés pour tuer et mourir, utilisés comme bombe à retardement. Aujourd'hui, après plus de 60 ans d'enseignement de la haine dans les écoles, les madrassas et les mosquées, prélude à l'enseignement du "jihad" -- élimination physique de l'infidèle qui ne croit pas en Allah (4) -- les pays arabes ont formé des armées de candidats au jihad et au suicide. Mais ce n'est pas n'importe quel suicide, le suicidé est un martyr-shahid honoré publiquement, sa famille reçoit beaucoup d'argent et lui-même part au paradis des 72 vierges jouir d'une vie nouvelle fastueuse…!

Israël a subi les attentats-suicide surtout entre l'an 2000 et 2005, mais depuis la construction d'une clôture de sécurité, ces attentats sont exceptionnels. Les candidats au suicide et au jihad sont allés assouvir leurs nouveaux instincts en Afghanistan, en Irak, en Syrie, en Afrique, en Europe et ailleurs, tuant pour la "bonne cause", surtout des Musulmans, civils ou militaires, devenus des "mécréants", car coopérant avec les ennemis du militant jihadiste. Nous sommes tous les jours abreuvés de nouvelles annonçant ici ou là nombre d'attentats meurtriers au nom du jihad, avec une dérive exponentielle, à la mesure des prêches pratiqués dans toutes les mosquées du monde.

Qui finance ces mosquées et ces madrassas, qui envoit les "bons" enseignants du wahabisme et du salafisme ? L'Arabie Saoudite et le Qatar, avec l'argent du pétrole.

 

Mohamed Morsi fera semblant de composer avec Israël à propos de la militarisation du Sinaï, parce qu'il a besoin de l'aide américaine pour payer son armée et la mettre à jour (entre 1,3 et 1,8 milliard $); il a besoin des 4,8 milliards $ du Fonds Monétaire International pour nourrir son peuple. Il a déjà reçu 4 milliards $ de l'Arabie et du Qatar pour l'aider à prendre le pouvoir.

Mais les troubles s'intensifieront au Sinaï, car c'est l'intérêt des Frères Musulmans d'avoir une zone de tensions, tout en terrorisant le voisin israélien. Et il y aura des heurts avec Tsahal malgré la nouvelle clôture de sécurité de 230 km séparant Israël de l'Egypte, protection relative qui coûte fort cher. De même que les sabotages répétés du gazoduc par les jihadistes ont entraîné sa fermeture, obligeant Israël à s'approvisionner à un prix du marché qui s'est envolé.

 

Et comme l'a dit l'ex-ministre de la Défense Mohamed Hussein Tantaoui, en mai 2012, si les troubles persistent au Sinaï, l'Egypte perdra la péninsule qu'Israël sera amené à réoccuper. Peut-être qu'alors les militaires égyptiens auront-ils l'occasion de récupérer le pouvoir qu'ils ont dû abandonner aux Frères Musulmans…(5).

 

Notes

(1) 50 cadres des principaux medias ont déjà été remplacés, de nouveaux gouverneurs sont en cours de remplacement dans les 27 provinces, l'armée est en cours d'épuration

(2) D'après un sondage réalisé par " Palestinian Center for Policy and Survey Research", 70% des Palestiniens considèrent leurs dirigeants comme des "gens corrompus" et 57% des Gazaouis considèrent le Hamas comme un groupe corrompu qui ne roule que pour ses dirigeants. Leur chef Ismail Haniyeh a monopolisé la vente de terrains qui ne sont octroyés qu'aux fidèles. Ceux-ci construisent des villas somptuaires avec l'argent public. Les journalistes qui rapportent ces méfaits sont éliminés. Même  Sheikh Nabil Naim, dirigeant du Jihad islamique égyptien se plaint, "le Hamas n'est intéressé que par la contrebande, le commerce à travers les tunnels, le pillage et la liquidation du Fatah"

(3) Malgré les accords de paix prévoyant que la péninsule du Sinaï qui reste démilitarisée, Israël a accepté que 7 bataillons y maintiennent l'ordre. Mais Morsi ne veut plus entendre parler d'autorisation à demander pour y faire entrer chars, blindés, avions et hélicoptères en nombre. De même, il lorgne vers les réserves de gaz offshore d'Israël…

(4) Le Jihad contre les mécréants dans leur territoire est une obligation individuelle, mais collective sur un territoire musulman. D'où la chasse aux chrétiens qui s'intensifie en territoire musulman, tous les juifs ayant été pratiquement tous éliminés des pays arabes. Le jihad contre Israël est un devoir collectif des croyants…

(5) Voir aussi "Un Atlas pour le Moyen-Orient Musulman"

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