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Al-Sissi n’est pas Moubarak
By Caroline Glick
jpost 12/09/2014
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La justice égyptienne a blanchi
Hosni Moubarak. Pour beaucoup, cet acquittement fait craindre le retour des
vieux démons de l’ancien régime.
Mais vu d’Israël, l’Egypte a bien
tourné la page.
La
décision a fait l’effet d’une bombe samedi dernier. L’ex-président égyptien
Hosni Moubarak a été blanchi, ainsi que ses deux fils Gamal et Alaa, de toutes
les charges portées contre eux, qu’il s’agisse d’accusations de corruption ou
de l’implication dans la mort de manifestants. Beaucoup voient dans cet
acquittement la renaissance de ses cendres de l’ancien régime, sous l’impulsion
d’une justice ouvertement politisée. Comme un terrible retour en arrière. Comme
si la révolution de 2011 n’avait servi à rien et que sous la direction du
général Abdel Fatah al-Sissi, l’Egypte avait simplement changé de dictateur.
Des questions qui restent en suspens, mais du point de vue d’Israël, une chose
est sûre: al-Sissi n’est pas Moubarak.
Pendant
30 années de règne, Hosni Moubarak a toujours soutenu que les menaces qui
pesaient sur Israël et l’Egypte n’étaient pas les mêmes. C’est pourquoi malgré
les appels incessants de Jérusalem, il a laissé les jihadistes prendre racine
dans le Sinaï.
Dès 2005, des groupes terroristes liés au Hamas, au Hezbollah ou à al-Qaeda
opéraient depuis la péninsule, sans que l’ancien président n’ait pris aucune
mesure efficace pour briser ces convergences de forces. Sous ses yeux, l’Egypte
est ainsi devenue la principale voie de contrebande d’armes vers la bande de
Gaza. C’est à cause du refus d’agir de l’ancien raïs, que les différents
groupes terroristes palestiniens ont pu améliorer leur arsenal de roquettes et
de missiles. Rien de tout cela ne serait arrivé sans le laisser-faire du Caire.
Le Sinaï servait également de terre d’asile aux terroristes palestiniens
recherchés par les forces de sécurité israéliennes. Difficile d’énumérer le
nombre de fois où ces derniers ont pu trouver refuge dans la péninsule, avant
de réintégrer la bande de Gaza une fois la menace estompée.
En fait, Moubarak considérait Israël comme une soupape de sécurité. En
facilitant les opérations contre l’Etat hébreu, il assurait la sécurité de son
pays.
Le
Hamas, le Hezbollah, les Frères musulmans et autres groupes chaperonnés par
l’Iran, trop contents de sa précieuse coopération, ne se seraient pas retournés
contre lui.
Erreur. En 2009, l’Egypte démantèle une cellule terroriste composée de membres
du Hamas, du Hezbollah et des Gardiens de la révolution iraniens qui planifiaient
des attentats contre Israël et sur le territoire égyptien. Moubarak a alors
ouvert les yeux. Mais les mesures prises à l’époque n’ont pas été suffisantes.
L’Egypte
d’al-Sissi change de stratégie
A la différence
de Moubarak, al-Sissi, lui, est entré en scène alors que ces mêmes forces
étaient sur le point de détruire l’Egypte. Si les Frères musulmans ont accédé
au pouvoir, c’est en partie grâce au Hamas. Durant les rébellions de 2011
contre Moubarak, l’organisation terroriste palestinienne avait joué un rôle
crucial en prenant d’assaut les prisons égyptiennes dans le Sinaï, libérant de
nombreux chefs du mouvement islamique égyptien, dont l’ancien président
Mohammad Morsi lui-même.
En 2012 et 2013, le Hamas avait réprimé par
la force des manifestations contre le régime de Morsi qui tentait alors de
transformer l’Egypte en un Etat islamique, plateforme d’un futur califat.
Al-Sissi et ses généraux, soutenus par l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes
unis, ont alors renversé le régime des Frères, empêchant l’Egypte de devenir la
charnière du jihadisme sunnite au sein de laquelle le Hamas, al-Qaeda et leurs
alliés iraniens auraient joué un rôle prépondérant.
Les
événements mêmes qui l’ont propulsé au pouvoir ont donc fait comprendre à
al-Sissi qu’il devait rompre avec la politique menée par Moubarak. L’Egypte
considère désormais les jihadistes sunnites et leurs alliés chiites dirigés par
l’Iran comme une menace existentielle pour l’Etat, même si leur première cible
reste Israël.
Frères
musulmans, Hamas, al-Qaïda sont rangés dans le même panier: celui des ennemis
du régime. Finie la politique de l’autruche, désormais Jérusalem et Le Caire font front commun contre ces menaces. Et cela s’est
fait ressentir dans le dernier conflit contre le Hamas cet été.
Après
avoir pris le pouvoir en 2013, al-Sissi a immédiatement ordonné à l’armée
égyptienne de prendre des mesures pour sécuriser la frontière entre Gaza et le
Sinaï. L’Egypte a mené pour la première fois des actions continues pour stopper
la contrebande d’armes et le passage de terroristes entre les deux territoires.
Cette politique s’est avérée efficace: en effet, une des raisons qui ont motivé
le Hamas à initier un conflit avec Israël était sa volonté de voir l’Egypte
ouvrir ses frontières avec Gaza. L’organisation terroriste était certaine que les
images de la souffrance des Gazaouis inciteraient les autorités égyptiennes à
durcir le ton envers Israël et à ouvrir leurs portes.
Mais contre toute attente, et contrairement à ces prédécesseurs Moubarak et
Morsi, Al Sissi n’a pas cédé et a pris le parti d’Israël contre le Hamas.
Mieux
encore, il a invité l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis à rejoindre
une alliance officieuse avec l’Etat hébreu. Le bloc ainsi formé a été assez
fort pour ne pas céder à la pression américaine pour rouvrir les frontières
entre Gaza et l’Egypte et entre Gaza et Israël, comme l’exigeait le Hamas.
Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu il y a trois mois, al-Sissi n’a pas
ouvert sa frontière, empêchant le mouvement islamique de reconstruire ses
infrastructures terroristes à Gaza. Affaiblie, l’organisation terroriste
palestinienne n’est plus d’un grand ressort pour ses complices jihadistes du
Sinaï occupés à monter une insurrection contre le régime égyptien.
Cette alliance entre Israël et l’Egypte, à laquelle participent également
l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis représente un tournant d’un point
de vue stratégique. Pour la première fois, ces pays coordonnent leurs efforts,
convaincus qu’ils font face aux mêmes menaces.
Israël
insiste sur ce point depuis de nombreuses années. Aussi bien auprès de ses
voisins arabes, qu’auprès de ses alliés, les Etats-Unis et l’Europe. Mais pour
de multiples raisons, personne jusqu’à présent n’était prêt à accepter ce
constat. Les Etats-Unis, l’Europe et l’Arabie Saoudite ont longtemps mené des
politiques qui soutenaient indirectement les djihadistes contre Israël. Sissi a
été le premier à briser le consensus. D’un point de vue israélien, il s’agit
d’un tournant décisif. L’Egypte a bel et bien tourné la page.